jeudi, janvier 31, 2008

dimanche 3 février - l'harmonéon de monsieur Monichon

Jeudi soir, en ouvrant mes courriels, j’ai trouvé un message de Paul de Witasse, dont je veux ici me faire l’écho. A l’occasion d’un échange entre nous au sujet d’un dvd de Pierre Barouh intitulé « Accordéon », édité par Frémeaux & Associés, dvd dont nous nous accordons à estimer qu’il est d’une qualité technique - image et son - fort médiocre, et que sa valeur tient exclusivement aux évocations qu’il suscite, à l’occasion de cet échange donc, j’avais dit à Paul combien j’appréciais la séquence de rencontre entre Richard Galliano et un vieux monsieur, manifestement expert en accordéon. Par retour de courriel, voici le message que j’ai pu lire ce jeudi soir :



« Si je ne m'abuse le collectionneur d'accordéon était l'auteur de la très technique "histoire de l'accordéon", Pierre Monichon, décédé récemment.
Vous trouverez ci-après un petit reportage à son sujet.





Ce reportage est intitulé « L’harmonéon de monsieur Monichon ». Je l’ai trouvé fort intéressant au plan informatif, j’y ai appris des choses, comme on dit, et très touchant par la passion et la culture sans esbroufe que manifeste ce vieux monsieur.



C’est pourquoi je n’ai pas voulu garder pour moi seul cette information. Bien entendu, j’ai l’intention d’explorer ultérieurement ce nom de l’accordéon ou, plus précisément d’une espèce d’accordéon. En attendant, cette très belle photographie récupérée avec sa légende sur le site de « La boite d’accordéon ».






Très bel harmonéon de l'atelier BUSATO, Paris (le deuxième exemplaire fabriqué à la demande de M. Pierre MONICHON,créateur de l'harmonéon, circa 1948)

mercredi, janvier 30, 2008

samedi 2 février - mélodéon melodion

Franchement, le site des « chercheurs de sons » me fascine. On se croirait dans un monde parallèle ou dans un monde à cinq dimensions : longueur, largeur, hauteur, temps et « ailleurs »… Mais il faut bien aller de l’avant !


Non sans quelques regrets, je me résous à reprendre la route en suivant le panneau « mélodéon » ou « melodion ». Le site de « La boite d’accordéon » me donne tout de suite la définition :


http://www.boite-accordeon.com/accordeon.html


« Le MÉLODÉON est un accordéon diatonique du type des instruments qui ont existés vers la fin du XIXème siècle. Pourvu d'un clavier mélodique de 10 boutons et d'un clavier d'accompagnement doté d'une basse et d'un accord, organisé sur le principe tonique-dominante, le MÉLODÉON, de fabrication allemande à l'origine, possède 4 voix sur 3 octaves (basson - 2 flûtes - piccolo) ce qui lui confère une sonorité particulière. Vers 1885 la Louisiane adopte le MÉLODÉON et les musiciens cadiens créent rapidement un véritable style musicale avec ce " petit accordéon ", qui est également très répandu en Irlande et au Québec ».




L’essentiel est dit et mes recherches suivantes ne feront que confirmer ces informations en les illustrant.



Un petit tour sur YouTube me convainc en effet de l’universalité du mélodéon / melodion. Au moins vingt-cinq pages… que je parcours sans hâte ni halte, au pas tranquille de celui qui marche sur des chemins sans surprises.



Parmi la multitude des sites qui donnent telle ou telle information sur le mélodéon / melodion, ou qui se contentent d’y faire allusion, un cas particulier : le site dédié au mélodéon. Très complet et tout à fait intéressant, il propose en particulier une présentation des principaux instrumentistes avec, souvent, des extraits. C’est un site qui vaut le voyage et qui mérite qu’on y fasse étape :



http://info.melodeon.net/

vendredi 1er février - mélophone

Après avoir jeté un coup d’œil en diagonale sur les noms de l’accordéon, mon choix s’est porté sur le terme « mélophone ». Et je ne l’ai certes pas regretté. Interrogeant « Google », suivant mon habitude, j’ai d’abord trouvé deux définitions :

- "Dictionnaire français adapté du Littré"
- Mélophone (nom masculin, terme de musique) : instrument à soufflet et en forme de guitare, ayant sur le manche de petites touches métalliques qui ouvrent les tuyaux

- "Dictionnaire français des définitions et synonymes"
- Mélophone, instrument à vent voisin de l’accordéon ayant la forme d’une petite guitare

La rencontre d’un accordéon et d’une guitare sans cordes suffit à ravir mon imagination. Mais, de plus, certains textes parlent d'un mécanisme analogue à celui du trombone. Je pense à Galliano qui, en son début de carrière, a joué du trombone parallèlement à l'accordéon. Il n'y a pas de hasard. J’essaie donc de me représenter la chose, puis, pour vérifier mes hypothèses, je cherche une photographie de cet instrument. Parmi maintes images d'accordéon, une seule photographie de mélophone, mais c’est suffisant.

















Muni de cette représentation, j’ai poussé un peu plus loin mes investigations. C’est ainsi que j’ai découvert une page d’un certain « Nouveau manuel du facteur d’orgue ». Cette page est un fac-similé du dit manuel. Elle est peu lisible, mais on peut en demander l’affichage du contenu… ce qui donne le texte ci-dessous, résultat sans nul doute d’une lecture automatique :




« MÉLOPHONE. Instrument à anche» libres, àe I' ""' l'accordéon, imaginé par M. Lee 1ère Ters i83o.ll*'' d'une grande guilare; le clavier se trouvé sur le """'; une pompe semblable à une coulisse de tronilmw''- • aux lauoruettes, eu la tirant et en la repoussant ».

Mais, grâce à mon obstination, j’ai pu accéder à une autre source, « Organographie : essai sur la facture instrumentale, art, industrie et commerce ».

1837.— Leclerc, horloger, inventa le Mélophone qui ressemblait à une guitare d'une structure grossière. La caisse renfermait divers sommiers sur lesquels se trouvaient ajustés des jeux d'auches libres. Le clavier se trouvait sur le manche et se composait d'une série de boutons appuyant sur une bascule, à l'extrémité opposée de la bascule était un fil de laiton ou de soie dont le second bout adhérait à chaque soupape, en poussant un bouton, il faisait par son appui jouer la bascule qui attirait le fil, lequel soulevait alors la soupape et l'air amassé dans un réservoir à l'aide d'un souflet intérieur mis en mouvement par la main droite, faisait parler les anches libres. Cet instrument eut une certaine vogue tant qu'on ne connut pas son mécanisme intérieur; aussitôt qu'on reconnut que le mélophone n'était qu'un accordéon perfectionné, il fut rejoindre le chef de famille. Après avoir paru à l'orchestre de l'Académie Royale de Musique, où l'avait introduit M. Halévy, le secrétaire perpétuel de l'Académie put rencontrer chaque jour sur le Pont des Arts, son enfant d'adoption entre les mains des aveugles : Sit transit gloria mundi! (B. F.) —


Mais ce n’est pas tout, continuant ma route à la recherche de quelque éventuelle trouvaille nouvelle, je suis tombé sur un site que je qualifierais de surréaliste : « chercheurs de sons : entrée des machinistes ». Il faut le voir pour le croire. J’ai passé je ne sais combien d’heures à m’y promener. Un vrai feu d’artifice… Des surprises à chaque page et même plusieurs par page. Quelque chose comme l’enfant né de la rencontre d’un polytechnicien et d’une divinité hindoue, d’une carte à puces et d’un petit vélo chromé, d’un piano-bar et d’un portique de bouteilles d’apéro. Il suffit d’aller faire un tour sur ce site pour se convaincre que je reste encore très au-dessous de ses élucubrations. Allez-y voir, lâchez les amarres, vous ne le regretterez pas !




http://chercheursdesons.hautetfort.com/entree_des_machinistes/

J'ai bien l'intention de continuer mon exploration de ce site, sans bien savoir d'ailleurs si j'espère ou si je redoute d'y trouver quelque chose d'apparenté à l'accordéon...

mardi, janvier 29, 2008

jeudi 31 janvier - nomenclature... chemins de forestiers







J'ai décidé de reprendre ma besace ou, si l'on veut, ma musette et de repartir sur les pistes des noms de l'accordéon. De ma nomenclature de référence, je retiens "aerophone"... mais je découvre vite - ce qui est déjà un apprentissage non négligeable - que ce terme a valeur générique. Il comprend l'accordéon parmi ses espèces, mais il ne le désigne que de manière très générale. Et en tout cas, c'est un terme international, qui ne situe aucun des instruments, qu'il désigne, par sa localisation. C'est donc un chemin de forestier, au sens où Heidegger nommait ainsi ces chemins que l'on emprunte sans savoir qu'ils se terminent en cul-de-sac parce qu'ils ne sont pas des voies de passage, mais seulement des saignées que les forestiers font pour couper les arbres des zones d'exploitation.



Accordéon
Générique : aérophone à anches libres


Terme : accordéon


Pluriel : accordéons


Note explicative : Instrument portatif à clavier constitué par un ensemble d'anches libres métalliques contrôlées par des clés ou des boutons. L'air est activé par des soufflets.


Note applicative : Créé en Autriche en 1829, selon les principes de l'harmonica. L'accordéon peut être diatonique ou chromatique




Aérophone
Générique : instrument de musique


Terme : aérophone


Note explicative : Terme générique désignant des instruments qui produisent un son en utilisant la vibration de l'air.


Note applicative : On distingue les instruments où la colonne d'air se déplace librement et ceux où la colonne d'air est enfermée dans un conduit. Cette deuxième catégorie se subdivise entre les instruments sans anche ou avec anche.


Terme spécifique : aérophone à anches battantes, aérophone à anches libres, instrument à vent proprement dit





Aérophone à Anches Battantes
Générique : aérophone


Terme : aérophone à anches battantes


Terme spécifique : régale






Générique : aérophone


Terme : aérophone à anches libres


Terme spécifique : accordéon, harmonica, harmonium



.........






Bien décidé à continuer mes investigations, je choisis à présent le terme "buzika". Ce n'est plus de chemins de forestiers qu'il s'agit, mais d'un maquis inextricable, où je me retrouve sur des sites en langue cyrillique ou en hébreu... Indéchiffrable. Des recherches plus poussées sur "Google" ne donnent rien d'intéressant, sauf peut-être cette indication, à savoir que "buzika" désigne l'accordéon en Géorgie et qu'il est sysnonyme de "garmon".




Mais plus que cette information factuelle, c'est le site qui vaut la peine d'être parcouru. On y trouve des informations surprenantes, en particulier en ce qui concerne l'accordéon. Il est vrai que ce n'est pas un site hexagonal ! Où l'on découvre que la Belgique est le centre du monde.

mercredi 30 janvier - "accompagner", dites-vous ?

Alors que nous petit-déjeunons, Françoise, me fait remarquer, à propos de mon blog d’hier, qu’il faudrait que Jean-François Zygel fasse une série d’émissions sur l’accordéon pour que celui-ci trouve la notoriété qu’il peut légitimement revendiquer. Et je trouve cette idée très juste. Il faudra que je voie s’il est possible de lui adresser un message en ce sens… J’imagine déjà ce que pourrait être son travail passionné / passionnant de déconstruction / reconstruction avec quelques grands interprètes…

………

… écouté « Annick Cisaruk chante Barbara accompagnée par David Venitucci ». J’observe qu’Annick Cisaruk, sans me faire oublier la voix de Barbara (comment serait-ce possible ? Serait-ce même souhaitable ?), arrive à donner de l’œuvre de celle-ci une interprétation très personnelle. Sa voix est certes moins voilée et moins fragile que celle de Barbara, mais sa tension est bien fidèle à l’original. Une tension incandescente, à la limite de la rupture ; un fil tendu prêt à se rompre, mais qui ne rompt pas.

Mais ce disque m’intéresse aussi par la présence de David Venitucci. Il est présenté en couverture comme accompagnateur ; au verso, on lit « accordéon et arrangement, David Venitucci ». En fait, le mot et la notion d’accompagnement me paraissent un peu inadéquats pour rendre compte de sa présence. Accompagner, dans la conception commune, c’est suivre, pour le soutenir, un interprète principal. Cette représentation ne rend pas justice du rôle de Venitucci ici. Si l’on parle d’accompagner, il faut alors lui donner le sens fort d’aller en même temps que… d’un même pas… Mais cela ne correspond encore pas à ce qu’il en est en réalité. En fait en effet il faudrait parler d’une sorte de double fonction ou de double rôle : accompagnement au sens usuel, mais aussi improvisations lumineuses, solo, qui éclairent les différents morceaux d’une signification particulière.

Cette posture de David Venitucci me parait intéressante aussi parce qu’elle s’inscrit dans un courant de plus en plus manifeste, qui donne à l’accompagnement un sens nouveau, qu’il n’avait pas jusqu’ici. On pense certes à des accompagnateurs prestigieux comme Azzola pour Brel, Galliano pour Nogaro, Romanelli pour Barbara ou d’autres encore, mais ils ne jouaient pas les premiers rôles. Aujourd’hui, j’observe de plus en plus de duos voix / accordéon où les deux partenaires jouent à égalité, chacun tenant un rôle spécifique, et où l’accordéon se fait une place de premier plan. A certains moments, c'est lui qui ouvre la voix, qui trace le chemin.

Je pense, outre cet album, au disque de Daniel Mille et J.-L. Trintignant à partir des poèmes à Lou d’Apollinaire, aux concerts de Toucas avec Michèle Bernard ou encore au spectacle de Lionel Suarez avec Jean Rochefort.

De manière générale, je préfère l’accordéon purement instrumental, mais en l’occurrence je constate que je prends goût à ces créations, qui me paraissent préfigurer par leur originalité un type de création plein d’avenir.

lundi, janvier 28, 2008

mardi 29 janvier - "êtes-vous bien accepté ?"

Pendant une semaine environ, ma messagerie a dysfonctionné à cause d’un serveur défaillant. Hier matin, j’ai pu cependant recevoir un message de Sylvie Jamet m’informant de l’existence d’une émission du 22 janvier (20h-22h) sur France-Musique, « Un mardi idéal », qui pouvait être écoutée jusqu’à ce jour. Dans cette émission d’Arièle Butaux, un moment était consacré à l’accordéoniste classique, Mélanie Brégand, qui y interprétait deux morceaux :

- Mendelssohn, choral et variations, extrait de la sonate n°6 pour orgue
- Sofia Gubaidulina, extrait de la sonate pour accordéon « Et expecto »

Le temps consacré à Mélanie Brégand était relativement court, mais au moins il avait le mérite d’exister. Je note cependant que le premier morceau est une transcription d’une œuvre pour orgue, comme s’il fallait d’abord légitimer l’accordéon. Je dois dire que les échanges qui ont eu lieu à propos de la pratique de Mélanie Brégand et de son instrument m’ont à la fois intéressé et réjoui. Les personnes présentes dans le studio étaient toutes, à des titres divers – concertiste, journaliste spécialisé, professeur -, des professionnels du monde de la musique. C’étaient des personnes ouvertes à l’information et bienveillantes, je veux dire sans a priori négatifs, à l’égard de l’accordéon. Leurs questions m’ont étonné. Ils se demandaient et demandaient à Mélanie Brégand où en était la filière de formation à l’accordéon classique, si la classe de musique de chambre était ouverte à l’accordéon, avec qui et comment elle avait l’occasion de jouer, si elle trouvait des compositeurs disposés à créer pour son instrument, etc… L’un des participants, par exemple, lui demanda si elle était bien acceptée, un autre parla des cloisons qui existent encore, une autre encore avoua, en tant que professeur, qu’elle ignorait quasiment l’existence d’une classe de perfectionnement en accordéon, alors qu’elle connaissait bien l’équivalente à Moscou. On parla aussi d’un commun accord des possibilités encore inexploitées de l’accordéon, de domaine encore inconnu, de méconnaissance de la part du monde classique et de certains a priori tenaces ; Mélanie Brégand expliqua qu’elle devait prochainement présenter son instrument en classes de composition, pour susciter des vocations, je suppose, ou au moins pour déclencher un travail créatif ; elle fit part de ses projets : créations originales, transcriptions, associations avec d’autres instrumentistes… labellisés classiques.

J’ai retenu aussi cette notion, qui m’a paru pleine de pertinence, à savoir que l’accordéon, suivant l’expression d’un participant, n’est pas « connoté », expression reprise et affirmée avec force et conviction. Cela voulait dire, m’a-t-il semblé, qu’il est tellement exotique que les autres instrumentistes classiques ignorent à peu près tout de lui. Un instrument venu d'ailleurs...

Cette émission m’a réjoui, car je l’ai perçue comme chargée d’espoirs. Des professionnels de la musique classique avouent leur ignorance quant à l’accordéon, mais ils sont tout disposés à mieux le connaître, ils lui reconnaissent des possibilités inexplorées et inexploitées et ils lui prédisent un bel avenir. Le monde des compositeurs commence à s’y intéresser…Des duos, des trios, des quatuors se forment. On en est au début de la boule de neige. Dès que la masse critique sera atteinte, alors tous ces essais se multiplieront. Forcément, l’accordéon sera l’instrument du XXIe siècle. Forcément.

Quelquefois, je me dis que le jour où, entendant le mot accordéon, les gens n’évoqueront plus une grosse boite pleine de boutons rutilants, pleine de chromes et de vernis bariolés, tenue par des gens affublés d’un sourire Email Diamant et d’un pantalon pattes d’ef., mais qu’ils imagineront un artiste vêtu de sombre, le regard fixé sur une partition, manipulant un instrument noir éclatant, ce jour-là l’accordéon aura acquis ses lettres de noblesse ou en tout cas le statut d’instrument classique à part entière. Et je me demande tout aussitôt après si ce changement d’image est possible sans la médiation de la télévision. Ce qui m’amène à me demander si ce cheminement n’implique pas en préalable que la télévision fasse place à un accordéon comme celui de Galliano, d’Azzola, de Mille, de Venitucci, d’Amestoy, de Macias, de Lassagne, etc… et à côté d’eux à des accordéonistes classiques, je pense à Bruno Maurice, que j’ai vu jouer avec Alan Bern, ou à de Ezcurra, jouant avec Roberto de Brasov, Macias ou Amestoy. Parfois, je me dis, mais je rêve, bien sûr, que Nagui pourrait être assez audacieux pour tenter ce pari, une sorte de provocation esthétique. Après tout, « Taratata » est bien diffusé sur une chaine du service public, qui a vocation à participer à la culture musicale pour tous.

dimanche, janvier 27, 2008

lundi 28 janvier - hradcany



… écouté avec assiduité l’album « Hradcany Balkanic Jazz », que j’ai reçu de David Venitucci il y a quelques jours. J’avais souhaité me procurer ce disque après avoir écouté « Hradcany » du trio Serge Adam, trompette, Philippe Botta, saxophones et flûte, et David Vanitucci, accordéon.

- « Hradcany », 2003 Quoi de neuf docteur
- « Hradcany, Balkanic Jazz », 2006, Buda Musique / Quoi de neuf docteur

Pour ce dernier disque, au trio se joint Bijan Chemirani, zarb, darf et tambourin.

Ces deux disques m’intéressent car au premier abord ils sont difficiles pour moi eu égard à ma culture musicale limitée. J’ai envie en effet de surmonter cette difficulté première, car j’ai bien l’intuition que lorsque je me serai laissé apprivoiser par ce disque j’aurai fait un réel progrès dans mon appréhension musicale. Pour l’instant, j’essaie d’entrer dans cette musique qui se propose comme une sorte de relecture jazzy d’une tradition que l’on peut situer en Turquie et dans l’est de l’Europe. On est en pays de connaissance, mais tout se passe comme si on le découvrait avec un regard neuf. Un regard réflexif, cultivé et en même temps décalé, dérangeant.

Bien entendu, mon attention se focalise prioritairement sur l’accordéon. A plusieurs reprises, j’ai trouvé que Venitucci brossait le décor, installait le climat, avec beaucoup de précision. Il y a dans son jeu quelque chose qui me le fait dire classique, au sens où le classicisme produit le maximum d’effets expressifs avec le minimum de moyens. Rien de trop. La mise en scène est nette et sans fioritures.

J’ai noté que le premier titre de « Hradcany Balkanic Jazz », signé de Serge Adam, est « Trifonov Market’s Place ». Je me suis rappelé cet album de Winter & Winter :

- « Trifon Trifonov & Stanimaka, Bulgarian Wedding », 2005.

S’agit-il du même Trifonov, qui joue du saxophone alto ? J’ai pensé aussi au travail du Didier Labbé Quartet, « Bazar Kumpanya » ou encore à « Kaba Horo » de Lubo Alexandrov, mais aussi à Martin Lubenov, qu’il s’agisse de « Dui Droma » ou de « Veselina » de son Jazzta Prasta Band. J’ai besoin de ces amers, car ils me permettent de baliser mon écoute et de ne pas aller me perdre en haute mer par manque de références.

Et j’observe d’ailleurs que d’écoute en écoute, une familiarité se crée, l’exotisme initial prend sens peu à peu.

Pour en savoir un peu plus sur le trio / quartet…

http://vibrationsmusic.com/2007/03/06/download-le-folklore-imaginaire-de-hradcany-bijan-chemirani/

… sur ce que signifie « Hradcany »…

http://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2teau_de_Prague

… sur Venitucci lui-même…

http://www.davidvenitucci.fr/discographie/discographie.html

samedi, janvier 26, 2008

dimanche 27 janvier : nomenclature des accordéons (suite et non fin...)

Je voudrais signaler ici le commentaire déposé par Paul le 7 janvier, car c'est une contribution à notre "machine à rêver". J'y vois en effet un double intérêt : son intérêt informatif, comme on va le voir ci-dessous, et son intérêt onirique ou, si l'on peut se permettre ce néologisme, "rêvogène" ou "rêvigène". Ou, pourquoi pas "onirogène" ou "onirigène" ?

Paul nous dit en effet qu'il connait deux termes d'argot allemand qui qualifient aussi l'accordéon :

- "Quetsch Kommode", de quetschen = presser. L'accordéon est ici défini comme une commode que l'on presse. Je pense ici à Galliano disant toute son admiration pour Gus Viseur par cette formule, en substance : "Vous imaginez ce que ça peut-être de swinguer avec une commode normande... pleine de vaisselle". Bon, d'accord, il disait "armoire", mais il pensait "commode".

- "Touristen Kompressor". Ici, je pense aux grosses Mercedes qui arborent fièrement sur les flancs de portes et sur la malle arrière le signe de puissance : "Kompresseor". Evidemment, il ne s'agit pas de diatoniques, mais de Bayans survitaminés.

samedi 26 janvier - (quatre) chemins faisant...

Mercredi après-midi, à notre retour de Toulouse, plusieurs messages sur le répondeur téléphonique. Parmi ceux-ci, un appel de Daniel Brel qui nous informe de la tenue d’un concert, qu’il donne vendredi 25 janvier, à 20h30, avec le quatuor « Quatre chemins » au Château d’Orion, à l’Hôpital d’Orion, un village près de Salies de Béarn. Nous avons ce jour même un rendez-vous de chantier à Hossegor, mais bien entendu notre décision est vite prise.

Passons sur la réunion de chantier. Le temps à Hossegor est superbe, mais si froid que Françoise et moi nous nous y faisons agripper par un rhume carabiné. Peu importe. En fin d’après-midi, petite halte à Saint-Vincent de Tyrosse. Thés et pâtisseries : noir-violettes pour Françoise avec un beignet à l’abricot ; noir miel-orange avec un mini gâteau basque pour moi. Evidemment les murs sont couverts d’affiches de corridas. Avant de quitter la bourgade, nous nous approvisionnons en granules homéopathiques contre les attaques de rhume. Et surtout, nous roulons le chauffage réglé au maximum.


Après avoir quitté l’autoroute à hauteur de Salies, nous suivons « à la boussole » des routes de piémont : étroites et tortueuses. Notre boussole fonctionne si bien que nous nous retrouvons à 19 heures devant ce qui ne peut être que le château d’Orion. Nous nous garons dans un chemin creux pour changer de vêtements : les mocassins contre les souliers de chantier, le pull en cachemire contre le gros pull de laine qui a beaucoup vécu, les vestes en cuir fin contre les grosses doudounes…

Vers 19h30, au moment où nous quittons la voiture, tous phares éteints, nous sommes surpris par la pureté de l’air, par le noir profond du ciel et par le nombre astronomique d’étoiles visibles à l’œil nu. Paraphrasant Kant, on pourrait dire : « Le ciel étoilé au-dessus de nos têtes et le désir insatiable de plaisirs esthétiques en nous ». Deux infinis.

Le lieu est beau. Le salon de musique est chaleureux, traversé de présences bienveillantes pour les musiciens et pour les auditeurs. Le programme est un bel équilibre entre des tangos, arrangés par Daniel Brel, et des œuvres de sa composition appartenant à différentes périodes de son travail de création. On pourrait dire que cet équilibre tient à une alternance heureuse entre ces tangos classiques et ces compositions modernes. En fait, tout au long du déroulement du concert, je me suis représenté les morceaux du programme comme les parties d’un tissage où tangos et compositions se croisent comme fil de chaine et fil de trame. Au bout du compte, un tissage complexe dont on oublie l’origine des différentes composantes.

Parmi les tangos, des pièces d’A. Bardi, d’A. Troïlo, d’O. Puglise ou deJ.C. Cobian. Parmi les œuvres de Daniel Brel, un triptyque : « Nuit », « Lune », « Soleil froid » ou encore « Marine » ou « Exil ». Autre élément de variété, le quatuor est en fait à géométrie variable, tour à tour solo, duo, trio et quatuor.


Qu’il s’agisse des arrangements de tangos ou des pièces originales, toutes œuvres écrites, j’ai été frappé par l’importance primordiale des nuances. Une musique en demi-teinte, je veux dire intime, introspective, méditative, sans excès, sans cris ni tremblements. Plutôt confidences et chuchotements. En tout cas, une musique qui résonne longtemps après les dernières notes. Si j’osais, je parlerais volontiers de musique impressionniste. Je la perçois en effet comme un travail d’analyse subtile à partir d’une impression immédiate, globale et indifférenciée : un paysage marin, une promenade en forêt, un soleil qui tour à tour est masqué par des nuages puis se dévoile, et ainsi de suite, la présence ambiguë de la nuit, etc… Cette analyse se déploie alors comme les touches d’un peintre impressionniste construisant son tableau. A la fin, l’impression première est là, recomposée, complexe. Du coup, elle se manifeste comme une impression-mère. J’appelle impression-mère, par analogie avec les formes-mères de Paul Klee, une impression générée par un phénomène particulier (mer, nuit, forêt) mais qui, en s’exprimant, accède à un autre statut et prend valeur d’archétype.



A l’issue du concert, un buffet très convivial permet aux artistes et aux auditeurs de diner et de discuter ensemble. La route du retour est d’abord d’un noir profond et pur, presque lumineux, mais les derniers kilomètres se font dans un épais brouillard. Nous parlons peu, mais Françoise et moi, nous savons bien à quoi nous pensons. Par moments, l’un de nous, exprimant à haute voix ses pensées, commente tel ou tel morceau, telle ou telle impression ressentie. L’autre enchaine… et nous sommes heureux.




jeudi, janvier 24, 2008

vendredi 25 janvier - robert santiago vino tinto




Il y a quelques jours, j’ai reçu de Robert Santiago ses deux derniers albums :

- « El Camaleon, Robert Santiago et son orchestre typique », 2003 Buda Musique
- « Panamericana, Robert Santiago y su Tipica », 2008 Buda Musique

J’avais eu connaissance de Robert Santiago et de son travail par un article, qui lui était consacré, dans le numéro 70, décembre 2007, de la revue « Accordéon & accordéonistes ». Il faisait la couverture : « Robert Santiago / Le son chaud ! ». La rubrique « Tête d’affiche » le présentait en cinq pages signées Françoise Jallot, sous le titre « Robert Santiago / Touche-au-rêve ». Cet article m’avait donné envie de mieux le connaître et pour ce faire j’étais allé visiter son site :




http://robertsantiago.free.fr/

Ce site vaut beaucoup plus qu’un simple détour. Il est ergonomique, complet, convivial, généreux, cultivé… bref, un espace dédié à la musique et à l’accordéon, qui suscite intérêt et sympathie. Chaque morceau des deux albums, « El Camaleon » et « Panamericana » est présenté et commenté avec pertinence et précision. Pour moi, c’est un modèle du genre, un exemple à donner à tous les accordéonistes, même talentueux, qui enfilent les morceaux comme les perles d’un collier, sans un mot, sans même daigner donner les titres. Le dernier album, « Panamericana » montre ce que pourrait être un cd en tant qu’objet culturel irremplaçable, notamment irréductible au téléchargement. Avant même d’écouter les premières notes de Robert Santiago et son orchestre typique, j’ai éprouvé une très grande sympathie pour son engagement, pour son militantisme et pour la qualité de ses créations.

Mais évidemment, cela ne serait que peu de choses sans la qualité musicale de ses deux albums. Une énergie festive et colorée qui interdit de rester immobile en les écoutant. On croirait un feu d’artifice, mais il ne faudrait pas s’y tromper, c’est du grand art. Comment dire ? La culture vivante à l’état pur. On hésite entre l’ethnomusicologue accordéoniste ou l’accordéoniste ethnomusicologue. Et l’on ne sait qui admirer le plus. Question sans objet peut-être tant les deux compétences sont intimement liées et indissociables.

Robert Santiago joue de moult instruments : accordéons diatoniques, harmoschka, cuatro vénézuelien, tiple, cavaquinho, charango, mandoline, vihuela, toyos, tarka, percussions et chant lead, ronrroco, requinto, rondador, quena, harmonica, güiro, clave, triangle, maraca, cloche et vibraslap… Peut-être en ai-je oublié un ou deux.

L’écoute de Robert Santiago et son orchestre typique, dont les deux cds tournent sans discontinuer, m’enthousiasme, car j’y retrouve les deux dimensions du plaisir esthétique définies par Roland Barthes : le studium, l’intérêt intellectuel et quasi réflexif pour une œuvre, et le punctum, le choc quasi émotionnel qu’on en ressent immédiatement.

jeudi 24 janvier - duo kosk au chapeau rouge

21h04. Sur la scène obscure et vide, deux chaises, un accordéon Hohner, la feuille sur laquelle est inscrite le programme. La clarinette arrivera avec le clarinettiste. Il manque une bouteille d'eau qu'Aimé Brees réclamera bientôt. Entre chaque morceau, il se plaindra d'avoir la bouche sèche ; il boira un grand verre d'eau tout en prenant le temps d'accorder son instrument. Avant de continuer, il fera une petite présentation pour localiser sur le pourtour méditerranéen chaque nouveau morceau.

21h21. le "duo Kosk, contrefaçon traditionnelle" aime chiner, suivant sa propre expression, des airs traditionnels, appartenant donc à tout le monde, pour les restituer dans leur forme originelle ou pour les arranger / déranger à sa façon. C'est leur façon de rendre hommage au génie populaire et de le perpétuer en l'adaptant continuellement. On sait bien en effet qu'adopter, c'est toujours adapter. Sans ce travail, il n'est que travail de momification. Or ici c'est bien d'une vie jaillissante qu'il s'agit.

21h25. C'est ainsi que s'enchainent, suivant un mouvement à la fois varié et constant, tarentelle italienne, bourrée bulgare, romance grecque, danse tzigane venue de la Roumanie ou mélodie klezmer. On passe d'une région à l'autre, mais l'unité du style est le fil rouge qui relie toutes ces interprétations.

21h32. A propos, "Kosk" signifie en langue turque le "sérail", le palais royal, et plus modestement "le chalet", c'est-à-dire un lieu où il fait bon se rencontrer en toute quiétude et partager des moments heureux. Bien entendu, les deux instrumentistes dominent leur art et chacun dans son registre soutient l'autre de toute son attention. Il faut voir comment Jean-Philippe Bessière regarde les doigts d'Aimé Brees de la première à la dernière note. Evidemment, la clarinette est sur le devant de la scène, mais l'accordéon emplit l'espace de sa présence et tisse, pour chaque morceau, un environnement souple, chatoyan et moiré comme un tapis persan.



22h04. Un parcours à travers un folklore réel et imaginaire, traditionnel et novateur. En tout cas, un moment de vrais plaisirs... que nous prolongerons par l'écoute du disque du duo, qui perpétue bien l'atmosphère de cette soirée.




mercredi, janvier 23, 2008

mercredi 23 janvier - alan bern accordéon klezmer

20h31. Dans la pénombre de la scène en attente de musiciens, les instruments se concentrent comme des athlètes de haut niveau : accordéons, marimba, percussions, harpe, guitare. Assis au premier rang, Bruno Maurice et Alan Bern se mettent d'accord sur leurs discours de présentation respectifs. Alan Bern dit à Bruno Maurice qu'il a apprécié au plus haut point la qualité de ses étudiants au cours de la master-classe qu'il a animée et il lui dit qu'il tient à exprimer publiquement son sentiment. Ce qu'il fera en effet en fin de soirée. Quelque chose de cette satisfaction d'Alan Bern passera tout au long de la soirée et donnera à ce concert sa couleur très particulière. Exigence et simplicité. Tellement exigeant qu'on peut se comporter avec la plus grande simplicité. Cette dimension morale n'est pas dissociable de la qualité musicale des prestations.
20h41. En quelques mots, Bruno Maurice présente le programme, ses étudiants, le cadre de la soirée et Alan Bern, musicien klezmer.

20h46. Bruno Maurice et deux de ses élèves donnent deux ou trois pièces avec deux percussionnistes, une harpiste et un guitariste. Ils ont, dit-il, l'habitude de travailler ensemble.




21h13. Bruno Maurice dirige ici vingt de ses étudiants dans l'exécution de quelques arrangements originaux dont il est l'auteur.


21h31. Après une présentation verbale où Alan Bern s'est situé dans la tradition klezmer et dans la perspective d'une ouverture à d'autres traditions et d'un renouvellement incessant de celle-ci, la magie opère. Comment dire ? C'est comme une voix, venue de très loin, qui nous parle et nous insuffle une sorte de nostalgie paradoxalement désespérée et sereine. Une sorte de conscience aigue, comme un scalpel, crispée et apaisée à la fois.


Mais on sent bien qu'Alan Bern ne pourra pas rester longtemps assis. L'accordéon sera un mouvement total ou ne sera pas. En tout cas, on sent bien aussi que la méditation musicale ne peut pas rester longtemps étrangère à une véritable aspiration religieuse, voire mystique. Ce n'est certes pas un hasard si Alan Bern fait allusion à un mouvement religieux juif qui s'efforce de créer un langage musical immédiat et sans paroles, sans support discursif. Au-delà des mots et des phrases, l'accordéon, seul avec son souffle, son âme.





21h39. C'était inévitable. il ne pouvait rester assis. Il devait se lever et danser.



21h59. Un moment que je qualifierais de sublime. "Angel Blue", duo Alan Bern et Bruno Maurice. J'ai longuement hésité avant d'écrire ce mot, sublime, mais je crois qu'il est pertinent. Dois-je l'avouer, j'aurais voulu que chaque instant dure indéfiniment.



22h08. La fin approche. Il n'est plus question de rester en place. Les vingt jeunes accordéonistes sont emportés dans le tourbillon de leurs deux maîtres. In fine, tout le monde descend de la scène, se disperse dans les coulisses, puis revient en scène, etc...


Dernière remarque enfin : tous ceux qui le connaissent auront reconnu Yvan M ... sur presque toutes les photos. Je garde trace, je prends date. On en reparlera dans dix ans... D'ici là, on aura pu parler, je l'espère, des relations entre l'accordéon et l'orchestre et de la manière dont l'accordéon, suivant la belle expression d'Yvan, lui-même, "vient" aux compositeurs non accordéonistes eux-mêmes. La problématique m'intéresse en effet, car j'imagine qu'elle n'est pas sans rapport avec l'orchestre en tant que système et avec l'accordéon en tant qu'il se situe dans une configuration orchestrale. Rapport du tout et de la partie : dans un système, les parties, les éléments font partie du tout, c'est évident, mais réciproquement le tout est en chacune de ses parties, ce qui est moins évident.














mardi 22 janvier

Jeudi après-midi. Retour à Pau. Pour s’y retrouver, il faut mettre un peu d’ordre dans nos activités depuis samedi midi.

- samedi midi donc, départ pour Bordeaux, où Alan Bern donne un concert avec les étudiants de Bruno Maurice, après trois journées de master-classe. Auparavant, le facteur a sonné une fois pour me remettre en main propre un paquet envoyé par Robert Santiago. Dans ce paquet, deux cds : « El Camaleon » et « Panamericana »… La première impression, visuelle, est très favorable. Une impression de vrai professionnalisme. La première impression auditive, à partir de trois extraits, nous indique qu’on va se régaler. Pour l’instant, on laisse reposer. Nous n’avons pas envie de prendre contact avec ces deux albums en voiture. Ils nous attendront tranquillement à la maison.
























- samedi, fin d’après-midi, on se promène le long des quais. On y rencontre un clown qui nous offre contre quelques pièces une carte postale représentant « le clown à l’accordéon ». On boit un chocolat et un lait chaud vanillé au café Castan, un lieu mythique, hors d’âge. On va repérer les lieux où se déroulera le concert d’Alan Bern, à 21 heures, à l’Atelier, salle qui jouxte le conservatoire, quai Sainte-Croix. L’affiche annonce « Alan Bern, musique klezmer ». Avant le concert, retour à l’hôtel, à deux minutes du conservatoire et à trois minutes de la gare Saint-Jean, où nous nous contentons d’une bavette échalottes au "Terminus".





- samedi soir : le concert. J’y reviendrai, car il faut mettre un peu de recul et un peu d’ordre dans nos émotions esthétiques. En tout cas, la simplicité et la très haute qualité musicale font bon ménage. Par moments, on sent comme un souffle de mysticisme et de transes dans cette musique d’inspiration klezmer.



- dimanche matin : musée des Beaux-Arts et galerie des Beaux-Arts. De la peinture plein les yeux. Mes pas, que je laisse volontairement et presque méthodiquement me mener à leur guise, me font passer de la perplexité devant la peinture bourgeoise, réaliste et comme vide de toute psychologie, à l’émotion devant une piéta du XVe. Si je n’étais pas incurablement athée, je crois que je comprendrais devant un tel chef-d’œuvre ce qu’est le sentiment religieux. Non pas la religiosité des bénitiers mais l’étonnement, qui glace le sang, devant le mystère de la mort du fils de Dieu. Déjeuner au Grand Café, à deux pas de la place Gambetta. En ce midi de janvier, toutes les tables sur la terrasse sont occupées. Nous déjeunons à l’intérieur. Puis nous rentrons à Toulouse rejoindre les petits. En fin de parcours, détour par le cloitre de Moissac. Je rêve d’un concert d’accordéon dans un cloitre : Moissac, les Jacobins ou les Augustins à Toulouse.







- lundi est consacré à jouer à Papou & Mamou. Charlotte et Camille en profitent. Une journée en pyjama. Le rêve ! En fin d’après-midi, repérage des lieux : espace Saint-Cyprien, chapeau rouge. On photographie l’affiche du concert qui sera donné mardi soir, à 21 heures, par le duo Kosk, Jean-Philippe Bessières, accordéon et Aimé Brees, clarinette. Il y a une exposition de peintures et diverses petites compositions, comme des miniatures. Par exemple, des danseuses qui donnent envie à Charlotte d’en fabriquer des semblables avec du fil de cuivre et du canson.








- mardi soir : concert du duo Kosk. Une quarantaine se spectateurs. Un périple autour de la Méditerranée. On est enchanté ; on discute avec les musiciens autour d’un pot offert par le « centre occitan des musiques et danses traditionnelles Toulouse Midi-Pyrénées » ; on en profite pour leur acheter un de leurs deux derniers disques. On parle de Galliano et Portal, de Trovesi et Coscia, qui sont à l’origine de la formation du duo, de Galliano et Mirabassi… A minuit moins le quart, on prend le métro qui nous ramène à la Roseraie.












- mercredi midi. Arrivée à Pau après une route sans histoires. A hauteur de Tarbes, le brouillard en se dissipant dévoile le pic du Midi de Bigorre. Masse formidable et étincelante. On a beau connaître ce paysage, la surprise est toujours renouvelée. Et l’on se dit qu’il faut la garder intacte, car ce serait goujaterie sans nom de ne pas prêter attention à une telle beauté, qui n’appartient à personne sinon à ceux qui savent l’admirer. En ouvrant la boite à lettres, Françoise me dit : "C’est Noël qui continue". Et en effet, le facteur père Noël a déposé dans notre petite hotte deux disques expédiés par David Venitucci et un dvd de Pierre Barouh, édité par Frémeaux & Associés, assurance qualité.






- Bien entendu, pendant que j’écris ces lignes, j’ai commencé une écoute en diagonale de toutes ces merveilles, mais mes impressions, mêlées aux souvenirs des deux concerts, se bousculent un peu… Trop, c’est trop ! Demain, c’est sûr, je mets un peu d’ordre dans toutes ces sensations.

jeudi, janvier 17, 2008

lundi 21 janvier - les pupilles de satie

Le musée de la ville de Pau est un musée de province. Deux ou trois oeuvres de valeur internationale, qui ne sont justement pas mises en valeur - je pense à un Gréco accroché dans une encoignure obscure - et un grand nombre d'oeuvres régionalistes ou d'artistes de second rang, dont les thèmes comme la facture me laissent, à chaque visite, perplexe. J'ai toujours pensé que ces oeuvres comme ces artistes étaient indispensable pour former le goût esthétique : ils se dévouent pour que l'on puisse sentir la différence entre leur art et celui qui produit des chefs d'oeuvre. On trouverait la même chose en musique et pour l'accordéon en particulier.





Parmi les oeuvres exposées au musée de Pau, quelques unes me fascinent. Dès que j'ai un peu de temps, disons une petite heure à consommer, j'aime bien aller leur rendre visite. Celle que l'on voit ici est grande. Trois mètres de large ! Des orphelines en rang d'oignons font, placées suivant un ordre croissant, leur promenade dominicale. Les rues sont vides. Une bonne soeur et deux dames patronnesses veillent sur leur vertu avant les vêpres. Mais ce n'est pas l'anecdote qui donne tout son sel à cette peinture. Sa qualité me parait plutôt résider dans sa géométrie et dans le rythme des notes noires sous la tutelle de la note blanche, immaculée - évidemment immaculée de la cornette - ; cet alignement à la queue leu leu, c'est déjà un rythme musical.





Chaque fois que je regarde ce tableau, invariablement je pense à trois pièces d'Erik Satie, intitulées "Peccadilles importunes" et plus particulièrement à leur interprétation par Théodoro Anzellotti :





- "Sports et divertissements, Erik Satie compositeur de musique et Theodoro Anzellotti joueur d'accordéon", Winter & Winter, 1998.





Ces trois pièces de "Peccadilles importunes" ont pour titres :





- "Etre jaloux de son camarade qui a une grosse tête"


- "Lui manger sa tartine"


-"Profiter de ce qu'il a des cors aux pieds pour lui prendre son cerceau".





Il ne faut pas se fier à l'eau qui dort, les sages orphelines ont aussi un inconscient.

dimanche 20 janvier - tuyaux réseau

J’ai reçu à quelques jours d’intervalle trois courriels dont je voudrais répercuter le contenu. Ils contiennent en effet des "tuyaux" dont j’ignorais l’existence et il me semble que c’est en raccordant ces « tuyaux » dont chacun d'entre nous possède une partie que nous pourrons en faire un « réseau ». Où l’on voit qu’un blog dédié à l’accordéon s’inscrit dans la logique de distribution de la « Lyonnaise des eaux ». Simplement, les fluides qui circulent, ce sont des sons d’accordéon.




- dans son premier courriel, un heureux parisien qui n’a que l’embarras du choix devant l’offre pléthorique de concerts d’accordéon proposés chaque semaine, Paul de Witasse, me signale l’existence d’un coffret de 3 cds : « Planet Squeezebox ». Je l'ignorais. C’est une compilation de qualité, une référence ; on peut en écouter des extraits :













- dans ce même courriel, un autre disque de compilation, dont j’ignorais aussi l’existence, "Accordions of the world" :










- ayant fait à partir de là quelques investigations sur internet, j’ai plaisir à apporter à mon tour ma contribution à cette documentation : « De Paname à Zanzibar, l’accordéon à travers le monde ». C’est un bon article de Télérama. Qui rend compte de la compilation de 3 cds, « Planet Squeezebox » avec des commentaires de lecteurs tout à fait intéressants.







- dans un second courriel, plus récent, Paul m’indique un dvd, dont encore une fois j’ignorais l’existence, publié chez « Audio archives », ce qui est une garantie de qualité. Je note au passage, ayant avoué mon ignorance dans les trois cas, que je vérifie ce que j’ai toujours pensé : plus on s’informe, plus on découvre que le champ de ce que l’on ignore augmente. D’une certaine façon, s’informer, c’est d’abord prendre conscience que, proportionnellement, la quantité de ce que l’on ne connaît pas s’accroit. Plus je sais de choses, plus je prends conscience de tout ce que je ne sais pas. Mais savoir que je ne sais pas, c’est déjà un progrès… sur le chemin de la connaissance. Ne serait-ce que parce que ça incite à chercher sans cesse.













- dans la même période, Sylvie Jamet me signale l’existence d’un blog -comment dire ? - une sorte d’obni, objet boutonneux non identifié, qui prolifère sur le web. Bien entendu, quand il s’agit d’un clavier-piano, on parle d’opni. C’est un détail. Idem pour le diatonique : odni. Toujours est-il qu’il faut aller visiter ce site, car en dehors des informations que l’on y trouve au plan descriptif ou anecdotique ou documentaire ou factuel, il s’agit d’un véritable récit d’apprentissage, d’un roman de formation. Une mine de renseignements, mais bien plus encore un texte tellement personnel qu’il est de nature à intéresser tout le monde. Quand l’expérience personnelle trouve les mots pour se dire, elle prend valeur sinon universelle, du moins générale. Chacun, au fil de la lecture, peut se situer soit par ressemblance (ah ! oui, c’est bien comme ça pour moi aussi !) soit par différence (tiens, ça ne se passe pas comme ça pour moi). Et puis, ce site est plein de générosité, plein d’un souci constant de partage. Il exprime toute une philosophie qui suscite ma sympathie ; ça me fait plaisir de le parcourir…




http://survoje.free.fr/accordeon


… Et ça me fait plaisir de partager tout ça…