lundi, mai 21, 2007

mardi 22 mai
















Je fais une petite pause dans le compte-rendu de « Trentels », que j’ai entrepris. Cela me permettra en effet de sélectionner les photographies que je veux retenir parmi celles, nombreuses, que j’ai prises, car le choix n’est pas facile si l’on veut s’en tenir aux images significatives. D’autre part, ce temps me permettra d’assimiler et de mettre en perspective les impressions qui aujourd’hui me submergent. Je donne ainsi du temps au travail de décantation nécessaire pour ne conserver que l’élixir de Trentels 2007.

Ce matin, heureuse surprise, le facteur a déposé dans la boite à lettres un envoi de Bruno Maurice, qui contient « Appassionata ». Cette surprise se redouble d’une autre à savoir qu’il s’agit bien du premier album « Appassionata », alors que Bruno Maurice m’avait dit qu’il y avait rupture de stock sur celui-ci et que seul le numéro II était disponible. Après échange de courriel, j’apprends que c’est bien le dernier exemplaire disponible que je viens de recevoir. C’est sans doute puéril, mais cela me fait plaisir.

Bien entendu, il faudra que j’écoute ce disque encore et encore, mais d’ores et déjà quelques observations me viennent à l’esprit. Très exactement trois : d’abord, le sentiment qu’il s’agit d’une lecture originale et personnelle des œuvres interprétées, ensuite, le sentiment que la maîtrise technique permet à cette lecture de s’exprimer dans toutes ses nuances et dans son entière complexité, enfin, cette évidence qu’il s’agit d’un instrument d’exception, tout à fait adéquat pour traduire cette lecture et pour manifester les capacités techniques de Bruno Maurice. En écoutant les différentes pièces de l’album, le jeu entre ces trois pôles : lecture / maîtrise / instrument s’impose à moi comme l’origine même du très grand plaisir que j’éprouve. Je dois avouer que je suis particulièrement touché par la « Valse triste » de Sibelius, la « Vieille valse » d’Alexandre Grabilin et par « Andalousia » de Granados.

Comme j’ai déjà pris connaissance du disque de Bemsha, « Swing-a-ning », je ne sélectionne que les morceaux de Thelonious Monk et de John Coltrane : « In Walked Bud », « Friday 13th » pour Monk, « Giant Steps », « Impressions » pour Coltrane. J’y ajoute « Lucy » et « Sol de Algarve » de René Sopa… Mon impression première se vérifie : ce quintet et René Sopa en particulier me font apprécier Monk et Coltrane comme jamais auparavant. Il se passe quelque chose de mélodique que je n’avais pas perçu chez ces deux compositeurs. Quant à « Lucy » et « Sol de Algarve », c’est du Sopa, et ça me plait. Si je reprends mes remarques ci-dessus sur la correspondance entre lecture / maîtrise / instrument, j’ai l’intuition que René Sopa possède toutes les qualités techniques pour traduire ses intention, qu’il a l’instrument approprié, mais qu’il pourrait aller plus loin dans sa lecture personnelle, disons dans sa traduction des grandes compositions de jazz. Je ne saurais dire d’où me vient cette intuition, mais j’ai la conviction d’un potentiel qui d’ici peu prendra forme de très grandes interprétations.

Quant au disque de René Lacaille, ça va devenir une rareté, car il ne reste plus beaucoup d’exemplaires disponibles. Qu’en dire ? C’est de la musique des îles. C’est agréable à écouter. René Lacaille y joue de l’accordéon, des percussions, de la guitare et de la voix. Je trouve d’ailleurs qu’avec l’âge celle-ci s’est bonifiée, comme le bon vin. On a l’impression, alors même que le temps est pourri et que l’humidité est partout, qu’on est face à un océan bordé de sable planté de palmiers, et que le vent sucré lui-même hésite à se déplacer pour s’épargner tout effort superflu. René Lacaille y joue peu de l’accordéon et cela me confirme dans l’idée que ce n’est pas forcément son instrument de prédilection. Certains le comparent à Gizavo. En l’occurrence, il me semble que ce dernier est plus accordéoniste, ce qui n’enlève rien aux qualités de multi-instrumentiste de Lacaille qui n’a pas son pareil pour « mettre le feu »…