lundi, août 06, 2007

lundi 6 août

- « Johann Sebastian Bach, The Goldberg Variations, Mika Väyrynen, accordion”, Alba Records, 2004
- “J.S. Bach, Goldbergvariationen, Wolfgand Dimetrik, akkordeon”, Telos Music records, 2003


Hier, dimanche, Françoise, Nadja, Sébastien, Charlotte et Camille sont allés passer la journée à Hossegor. Je suis resté à Pau, car je devais rendre visite à ma mère en sa maison de retraite dans l’après-midi. Cette visite a occupé une partie de mon temps, mais j’ai trouvé cependant le loisir d’écouter les deux disques en exergue dans la maison vide et sombre, car j’avais rabattu les volets et baissé les stores pour faire obstacle à la chaleur orageuse et poisseuse. Ce fut une expérience étonnante.
Bien sûr, lorsque j’écoute l’un et l’autre, je perçois des différences et je suis plus ou moins sensible, sur le moment, à tel mouvement, à tel effet d’interprétation, mais tout ceci est fugace et ne laisse quasiment pas de traces. Tout en les écoutant et en parcourant la liste des variations, je découvre tout à coup quelques informations qui me surprennent. J’en note quelques unes à titre d’exemples :
- Aria initial. MV – 4 :25 / WD – 3 :08
- Variation 13. MV – 7 :06 / WD – 3 :28
- Variation 30, Quodlibet. MV – 1 :57 / WD – 2 :13
- Aria final. MV – 2 :32 / WD – 3 :38

Au total, MV – 75 :37 / WD – 53 :56

En toute honnêteté, je dois dire que je n’avais pas perçu ces différences de durées, ni les autres. Ce défaut de perception m’étonne. De même, si je perçois bien des différences immédiates entre les deux interprétations, je n’en comprends ni le comment, ni le pourquoi. De même, la version de Dimetrik est postérieure à celle de Väyrynen ; il la connaissait donc et a dû se situer, forcément, par rapport à celle-ci. J’aimerais saisir les traits spécifiques à chacune de ces versions, mais j’en suis tout à fait incapable. En quoi, par exemple, Dimetrik se démarque-t-il de Väyrynen. En fait, ma perception se réduit à un flux de sensations, mais il me manque les outils notionnels pour les analyser et a fortiori pour faire la synthèse des comparaisons qu’il faudrait faire entre elles. L’expérience est intéressante, car elle me permet de vérifier que si tout part des sensations, celles-ci se diluent et se perdent dans un flux sans consistance dès lors que l’on ne dispose pas des cadres et des codes qui leur donnent du sens. Si l’on part de ce que l’on sait, des connaissances a priori que l’on a sur Väyrynen ou Dimetrik, alors on passe à côté d’une expérience esthétique authentique : on plaque du savoir sur du perçu. Mais, à l’inverse, si l’on ne dispose que de la succession des sensations, alors la perception ne se forme pas, elle se réduit à un kaléidoscope d’instantanés et, du coup, toute expérience esthétique devient impossible. Toute la question est d’articuler harmonieusement la naïveté des sensations et la mise en forme, le sens, que seule la culture confère à la perception. Mais justement, cette articulation est une dialectique difficile. L’expérience esthétique, c’est comme danser sur le fil du rasoir. Trop de savoir stérilise l’expérience sensible ; l’absence de savoir condamne l’expérience sensible à la dispersion. Dans les deux cas, c’est l’expérience esthétique qui est inaccessible.
Pour l’instant, j’ai bien conscience que l’essence même des interprétations des variations Goldberg de Väyrynen et de Dimetrik m’échappe…