dimanche, septembre 23, 2007

samedi 22 septembre - gironde sur dropt

En cette fin d’après-midi de ce samedi 22 septembre, à 18 heures et quelques minutes, nous assistons à la projection d’un film, « Adiu Nadau, une histoire d’accordéon », dédié à Noël Bordessoulles. Nous sommes à la médiathèque de Gironde-sur-Dropt, à cent-soixante-dix kilomètres de Pau. Noël Bordessoulles a quatre-vingt-quinze ans. Il a toujours joué de l’accordéon à l’oreille, depuis sa douzième année. Faites le compte… Après la projection du film, un apéritif est prévu avec des vins de viticulteurs voisins. Il faut dire que l’on est tout près de Sauternes et de Barsac. On est en pays de Graves. C’est tout dire. Mais avant cet apéritif, Patrick Lavaud, réalisateur du film et responsable des « Nuits atypiques », invite Noël Bordessoulles à nous jouer quelques extraits de rondeaux, polkas, mazurkas, scottishes et autres congos, qui ont fait danser un nombre incalculable de mariages. Mais, à peine a-t-il donné quelques uns de ces extraits, accompagné par Patrick Lavaud, qu’un surprise surgit sous la forme de quatre accordéonistes : René Lacaille, Jean-Luc Amestoy, Michel Macias et Philippe de Ezcurra. Tous les six s’en donnent alors à cœur joie et, je l’espère, quelques photographies montreront la douceur infinie de tendresse des regards croisés. Un moment d’intense émotion, d’autant plus que la retenue est de mise. Il n’y a rien à dire. Juste à jouer.

Petite explication. Les quatre accordéonistes en question sont présents à Gironde-sur-Dropt pour donner un concert gratuit à la salle des fêtes du village, à 21 heures. Mais pourquoi ? Simplement parce qu’ils ont tous les quatre été publiés par « Daqui », le label des « Nuits atypiques », et que dans le cadre des « Nuits d’Aquitaine », opération d’actions décentralisées issues des « Nuits atypiques », un concert a été monté pour les réunir physiquement en un même lieu. C’est ainsi que sur la même scène, de 21 heures à minuit passé, nous avons eu la chance extrême d’écouter Lacaille, qui a des attaches à la Réunion et en Lot-et-Garonne, Amestoy, le toulousain avec son Accordiola à touches piano, Macias de Belin-Beliet, village de la Haute-Lande girondine et de Ezcurra, le professeur du conservatoire de Bayonne, avec son accordéon de concert, « Asturias » d’Albeniz et une pièce d’Alexander Cholminov.

Ils se connaissent peu. Ils ont eu peu de temps pour répéter ensemble. De l’aveu même d’Amestoy et Macias, leur répertoire est léger… mais de tout cela sortira finalement une soirée magique. Dans un premier temps, le dispositif est le suivant : Lacaille en solo, puis en duo avec Macias ; Macias en solo, puis en duo avec Amestoy ; Amestoy en solo puis en duo avec de Ezcurra ; de Ezcurra en solo. Pause. Deuxième temps : les quatre ensemble (futur quartet ?) jouent successivement les thèmes proposés par chacun d’entre eux. De Ezcurra par exemple propose un thème de son pays basque, repris par Macias, par Lacaille, puis par Amestoy. Et ainsi de suite… Chacun a son style et l’affirme avec force et virtuosité : le moelleux introverti d’Amestoy, des nuages, de merveilleux nuages ; l’exotisme coloré de Lacaille, une sorte de forêt tropicale ; les stridences de Macias ; la classe et l’inventivité de De Ezcurra. Et puis, sans transition brutale, ils enchainent plusieurs morceaux, dont « Indifférence » ou « Esperanza » de Marc Perrone. Certains continuent à écouter ; d’autres commencent à danser.

Aucun de ces quatre artistes n’a cherché à briller pour lui-même. Chacun a donné sa contribution avec une générosité sans calcul. Le concert, l’ai-je dit, était gratuit. Au jour d’aujourd’hui, est croyable ? Est-ce seulement pensable ? En tout cas, nous étions, eux et nous, spectateurs, tous profondément heureux.

Pour finir je voudrais ajouter que l’accueil fut des plus chaleureux : qu’il s’agisse du maire nous permettant d’assister à la répétition et nous guidant de la salle des fêtes à la médiathèque, de la responsable de la médiathèque, compétente, enthousiaste et adorable ou d’autres personnes que nous n’avons su identifier. Un moment esthétique rare, mais aussi un moment où l’on se sent bien, dans un monde à l’abri des rapports marchands…

Françoise et moi, nous avons fait quelques photos de ce concert. Dès que possible, je trie et je mets en forme ces traces, ces aide-mémoire…