vendredi, août 08, 2008

dimanche 10 août - chat pître

Je me souviens. Un soir du mois de mai 2006, à Trentels, vers 23 heures. Il avait fait une chaleur lourde durant toute la journée. Nous étions installés sur la pelouse de la salle des fêtes, par tables de deux à quatre personnes. Les FreeBidou avaient assuré le premier concert de la soirée. Pendant l’entracte la nuit était tombée. Avec elle, un coup de frais. Il fallait avoir prévu sa petite laine. Un courant d’air, mi-bienfaisant, mi-inquiétant eu égard aux risques d’orages, parcourait l’espace planté d’arbres bruissant sous la lune. Une scène de dimension moyenne, parfaitement éclairée.

Galliano solo. Au milieu du concert, il prend quelques instants pour présenter le morceau qu’il va interpréter pour l’une des premières fois, sinon la première (ma mémoire me fait défaut). Je crois me rappeler qu’il s’agit d’une composition suite à une commande de Roland Petit. Le titre « Chat-pître », que Richard Galliano, pour désamorcer le jeu de mots facile, qualifie de « jeu de mots laid ». Clin d’œil. J’ai immédiatement l’impression que ce morceau s’inscrit dans une inspiration à la Satie. Une expression me vient à l’esprit : « Chat-pitre, une œuvre satiesque ! ». En tout cas, je la situe toujours au côté des interprétations que Richard Galliano, avec diverses formations, a pu donner des Gnossiennes.

Depuis cette première fois, si mes notes sont à jour, nous avons pu écouter « Chat-pître » en direct live à sept reprises. J’ai plaisir à en recopier ci-dessous la liste pendant que le morceau extrait du live de Marciac 2006 tourne en boucle.

- Carte blanche à Richard Galliano à Marciac. 06.08.2006. Richard Galliano et Tangaria Quartet.

- Festival Jazzèbre à Perpignan. 24.10.2006. Richard Galliano et Tangaria Quartet.
- Sortie de « Luz Negra », « New Morning », Paris. 23.01.2007. Richard Galliano et Tangaria Quartet
- Festival de jazz de Foix. 23.07.2007. Richard Galliano et Tangaria Quintet.
- Sortie de « Mare Nostrum », salle Gaveau, Paris. 17.03.2008. Richard Galliano avec Jan Lundgren et Paolo Fresu.
- Toulouse, Rio Loco, prairie des filtres, scène Village, 19.06.2008, 23 heures, Martin Lubenov rencontre Richard Galliano.
- Carrières de Junas, festival de jazz. Richard Galliano Trio « Mare Nostrum ». 16.07.2008.

A chacun de ces concerts, des images sont attachées. L’espace énorme de Marciac, l’intimité dorée de la salle Gaveau, le théâtre à l’italienne de Perpignan, la présence de Clarence Penn à Foix, la brume qui monte de la Garonne et qui traverse la scène avant de rejoindre d'autres fumées chargées d'odeurs orientales, les carrières à ciel ouvert de Junas où Richard Galliano présente « Chat-Pître » comme « un morceau que je mets à toutes les sauces ». Textuel. Mais aussi la scène minuscule de la salle improbable du « New Morning » où nous avions attendu l’ouverture des portes par un froid glacial, dans un quartier peuplé de plus de policiers que d’habitants. Nous devions apprendre plus tard que le siège de campagne de Nicolas Sarkozy était situé à l’angle de la rue de cette salle de concerts mythiques. A quelques pas de là, de longues files de toiles rouges encadraient le canal Saint-Martin. Sous des porches, des masses couvertes de cartons remuaient par moments, agitées de soubresauts. A quoi rêve-t-on dans cet état de dénuement radical ? A-t-on encore assez d'énergie pour rêver ?

Pour garder traces de ces moments et surtout pour provoquer l’émergence des sensations heureuses qui y sont associées, quatre supports matériels :

- « Richard Galliano & Tangaria Quartet, live in Marciac, 2006 », Milan. Prise de son et montage du son du concert réalisés avec les moyens de radio France. Version audio et version dvd. Milan.
- « Luz Negra - Richard Galliano ». 2006. Milan.
- “Mare Nostrum - Paolo Fresu, Richard Galliano, Jan Lundgren”, 2007. ACT.

Et puis, comme je suis en train d’écrire ces notes et que je laisse « Luz Negra » enchainer ses morceaux, deux d’entre eux me rappellent qu’il y a encore d’autres merveilles… « Indifférence » en titre 8 et « Flambée Montalbanaise » en 13. Comme l’écrit Richard Galliano : « … et l’on s’amuse à latiniser la valse musette en lui donnant des accents tour à tour vénézuéliens, brésiliens, latino-jazz». Déjà, je repense à quelques interprétations de ce chef-d'oeuvre : « Indifférence » dont je garde plein d’émotions… Galliano, Macias, Amestoy, Lacaille… Me voilà déjà parti sur d’autres pistes…