vendredi, avril 06, 2007

vendredi 6 avril

Durant les jours où nous attendions « Champlong », nous faisions le projet de nous donner de larges plages de temps pour l’écouter à plusieurs reprises dans sa totalité. Cette pratique d’écoute en boucle nous est en effet habituelle et nous aimons écouter ainsi jusqu’à saturation les disques que nos apprécions. Cette attitude monomaniaque, si j’ose dire, nous permet de nous en imprégner jusqu’à l’obsession au point de connaître les titres par cœur, suivant cette si heureuse expression.

Las, la réalité est un peu différente. Le soin que demandent mes parents aurait suffi à mettre à bas ce projet, mais d’autre part « les petits » n’ayant trouvé à Cauterets que neige humide, autrement dit de la soupe, et tempêtes ou jours blancs, ils ont décidé de redescendre et de s’installer quelques jours à Pau. Pas question donc de trouver les larges plages de temps dont nous rêvions. C’est pourquoi nous avons changé de projet : dès que nous disposons de quelques minutes de loisir, nous nous contentons d’écouter un ou deux titres, pas plus, mais intensément. Cette technique n’est pas sans vertu, car la durée limitée contribue à l’intensité de notre écoute.

De titre en titre, l’évidence d’un style s’impose à nous. Difficile à justifier ou à argumenter avec les mots dont nous disposons, cette évidence découle d’une sorte d’intuition, au sens philosophique du terme. C’est une connaissance (ou une reconnaissance) certaine : ce que l’on écoute, ici, maintenant, c’est à n’en pas douter « du Pellarin ». Cette connaissance est immédiate et ne passe par aucun raisonnement discursif pour se démontrer. C’est une certitude. Par une sorte de jeu de comparaisons multiples instantanées, nous situons immédiatement l’accordéon (au sens de composition et d’interprétation) de Jacques Pellarin. Parmi ces comparaisons, qui sont certes loin d’être closes, nous avons comme repères de proximité / différence des « gens » comme Perrone, Saluzzi, Nino Rota, Tiersen, Galliano, Colin, Klucevsek, Privat, Viseur, Mille… La liste reste ouverte.

C'est ainsi qu'on a pensé à Perrone et à Di Donato en écoutant « Mémoire d’Anna », à Saluzzi en écoutant « Milonga de l’espoir », à Nino Rota en écoutant « Série noire », Tiersen en écoutant « Rue Corinne », Mille en écoutant « Prinsengracht ». On a pensé à Pacalet en écoutant « Hautebise » ou « Une page se tourne ». De manière plus générale, les pièces du puzzle « Champlong » nous ont rappelé l’expression de Pacalet parlant de ses « miniatures » pour désigner les morceaux de « 7x7 », encore que le mot miniature nous parait ici peu adéquat, sauf en ce qui concerne l’idée de perfection du détail. Il faudrait trouver un autre terme rendant compte de l’unité des différents titres, unité externe de l’ensemble qui fait penser à une série, comme une série de gravures ou d’aquarelles, unité interne de chaque pièce, qui se déploie avec le dynamisme d’une forme naturelle, d’un être vivant, notion que j’oppose aux formes techniques de beaucoup de musiques fabriquées avec des machines ou à l’aide de prothèses électroniques.

A travers les moments que nous arrivons à gagner un à un sur les soucis et autres impedimenta quotidiens, l’écoute morcelée de « Champlong » nous donne bien des plaisirs… et ce n’est pas fini. En cela, nous sommes fidèles au "Carpe diem" des épicuriens ou du moins à l'une de ses variantes "Carpe Champlong".

post-scriptum : merci Tony pour votre message ! Le sud-ouest "épicurien" (neige, surf, foie gras et autres pastis landais, etc...) vous salue bien. Je vais de ce pas consulter votre site !