vendredi, juin 01, 2007

vendredi 1er juin

A la suite de l’échange avec Sylvie Jamet auquel je faisais allusion hier, il m’a semblé utile de revenir à une réflexion que j’avais entamée le 27 janvier et reprise pour l’approfondir le 16 février, où j’écrivais ceci :

« En réfléchissant, il y a quelques jours, aux facteurs capables de rendre compte du plaisir que l’on peut prendre à l’écoute musicale, j’avais essayé d’analyser les facteurs en jeu dans l’attitude d’écoute et par conséquent de formaliser les paramètres qui en déterminent la qualité, qui se manifeste par une sensation de plus ou moins grand plaisir ».

En l’occurrence et malgré les apparences, ce travail de formalisation n’a pas une visée théorique ou conceptuelle ; je ne l’ai pas fait pour le plaisir un peu vain de mettre une expérience esthétique en formule abstraite. Je n’avais pas assez explicité mon intention sur ce point. Ce travail a tout au contraire une double visée pratique : d’une part, permettre à chacun de pouvoir réfléchir à sa propre expérience de plaisir (ou non) en disposant d’un cadre pour en prendre conscience, pour mieux comprendre les raisons des sensations qu’il éprouve. Ce retour, cette mise à distance, n’est pas indispensable, mais c’est un outil intellectuel pour mieux se comprendre. Une manière de répondre à l’injonction socratique : « Connais-toi toi-même ». D’autre part, en cas de divergences de vue ou de désaccords sur la qualité du plaisir ressenti, le recours à la formule peut être un moyen d’analyser celles-ci et de mieux se comprendre : soi-même et entre soi. En ce sens, c’est un outil de communication, au sens de mise en commun et non au sens galvaudé que véhiculent les medias, la publicité ou la politique, c’est-à-dire une technique de manipulation et d’influence.

Continuons… Et pour cela, j’ai repris chacun des facteurs de la formalisation ci-dessous pour essayer, entre crochets, d’en donner le contenu, les éléments dégagés par l’analyse… Evidemment, la formule devient plus complexe, mais c’est inévitable pour être au plus près de l’expérience personnelle, si l’on veut la penser sans la simplifier.

« Si l’on essaie de dresser la liste des facteurs en interactions dans l’attitude d’écoute, il me semble que l’analyse conduit à dégager les éléments suivants :

- E : qualité de l’écoute [en termes de degré de plaisir éprouvé]
- f : est fonction de…
- Su : le sujet-auditeur [son histoire personnelle, sa position sociologique, son caractère, ses intérêts, sa culture, sa pratique instrumentale]
- O : l’objet-œuvre [ses caractéristiques formelles, son style, son type, ses caractéristiques spatio-temporelles]
- C : le compositeur [ses caractéristiques biographiques, sa notoriété, ses références]
- I : l’interprète ou les interprètes [caractéristiques biographiques, notoriété, références, style]
- P : le projet d’écoute de l’auditeur [ce que l’on peut traduire par la double question : «quels sont ses apriori ? quelles sont ses attentes ?»]
- M : la chaine matérielle de l’enregistrement à la restitution
- Si : situation, c’est-à-dire conditions spatiales et temporelles de l’écoute, son environnement
- A : climat affectif [suivant une expression ancienne : «l’état d’âme ». Ce facteur, qui correspond en fait à notre relation au monde et à notre propre existence à un moment donné, au moment de l’écoute, est certainement déterminant, alors même qu'il est peut-être le moins conscient. C’est pourquoi il apparaît en facteur commun dans la formule]

Si maintenant on essaie de formaliser cette attitude, je pense qu’en première approximation et sous réserve du travail critique, qui reste à faire, on peut écrire la formule suivante :

E = f [(Su, P),(O,C,I),(M,Si)].A

A suivre…