mardi, février 19, 2008

mercredi 20 février - politique et accordéon

… continué à lire « Storytelling », dont je relève ici quelques passages, sans commentaires.


Page 133. Dick Cheney (futur vice-président de G. W. Bush) disait en 1992 : « Pour avoir une présidence efficace, la Maison Blanche doit contrôler l’agenda. Le plus puissant outil dont vous disposez est la capacité d’utiliser les aspects symboliques de la présidence pour promouvoir vos objectifs. Vous ne devez pas laisser la presse fixer les priorités. Ils aiment décider ce qui est important et ce qui ne l’est pas. Mais si vous les laissez faire, ils saccageront votre présidence. »

Page 134. Le White House Office of Communication est alors chargé de gérer l’agenda stratégique de la présidence… Chaque jour on élabore la line of the day (la « ligne du jour » qui deviendra dans les années 1990 la « story du jour"), diffusée auprès des différentes branches de l’exécutif et de la presse accréditée à la Maison Blanche, mais aussi à travers des messages télévisés adressés directement au public.

Page 135. Il s’agit moins désormais de communiquer que de forger une histoire et de l’imposer dans l’agenda politique. « Trousser une histoire (spinning the story), explique Maltese, cela signifie la tourner à son seul avantage, la présenter sous un jour favorable à l’administration, et la diffuser en utilisant les porte-parole, les communiqués de presse, les sources d’information amies, en veillant à ce que l’histoire soit toujours présentée sous le meilleur jour possible. Cela implique aussi d’engager les médias à jouer le jeu… »

Page 136. Si l’exercice du pouvoir présidentiel tend à s’identifier à une sorte de campagne électorale ininterrompue, les critères d’une bonne communication politique obéissent de plus en plus à une rhétorique performative (les discours fabriquent des faits ou des situations) qui n’a plus pour objectif de transmettre des informations ni d’éclairer des décisions, mais d’agir sur les émotions et les états d’âme des électeurs, considérés de plus en plus comme le public d’un spectacle. Et pour cela de proposer non plus un argumentaire et des programmes, mais des personnages et des récits, la mise en scène de la démocratie plutôt que son exercice.

Page 137. Ce n’est plus la pertinence qui donne à la parole publique son efficacité, mais la plausibilité, la capacité à emporter l’adhésion, à séduire, à tromper (comme le fameux slogan « Travailler plus pour gagner plus » de Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle de 2007).

La lecture de ce bouquin n’est pas toujours facile. L’expression n’est pas toujours limpide. C’est un livre de chercheur. Mais je trouve que l’effort pour le lire vaut largement la peine qu’on se donne. Je dirais qu’il me parait éclairant.

Du coup j’écoute avec gourmandise l’excellent album de Robert Santiago y su Tipica, « Panamericana ». J’ai déjà dit mon goût pour cet album et pour son auteur. Bien au-delà de la musique et de l’accordéon festif qui s’y manifeste, c’est d’une conception du monde, d’une vision de la vie, d’une philosophie en acte qu’il s’agit. Et tout en l’écoutant, je me dis que le plaisir que j’éprouve a quelque chose de politique puisqu’il repose en grande partie sur la rencontre d’une authenticité, d’une histoire vraie, rencontre éminemment révolutionnaire aujourd'hui. On pourrait en effet à bon droit parler de rupture avec les moeurs communicationnelles devenues habituelles. Je me demande si je ne vais pas remplacer le temps que je passe à m’informer avec les radios ou les télévisions par l’écoute systématique de Santiago… et quelques autres. Ce serait déjà un premier pas sur le chemin d’une certaine dépollution.

Dans cet album, entre autres pièces magnifiques, le titre 15 : "La Gran Noticia. Cancion a mi Mama". Ce sera "le titre du jour"...