lundi, mars 31, 2008

lundi 31 mars - accordionspace

… reçu ces derniers jours plusieurs courriels de Sylvie Jamet pour me faire partager ses découvertes récentes de sites d’accordéonistes sur « Myspace » : « les amis de mes amis sont mes amis, les amis des amis de mes amis sont mes amis, et ainsi de suite ». Toutes ces découvertes sont pleines d’intérêt et je ne sais combien de temps j’ai déjà passé à commencer leur exploration. C’est un monde inépuisable… d’autant plus qu’il a pour principe de se développer sans cesse.

J’avoue que jusqu’ici ne n’avait accordé qu’un intérêt assez distrait à « Myspace ». Mais les pistes ouvertes par Sylvie m’ont incité à aller y regarder de plus près et j’ai été étonné par la richesse que l’on y trouve, même si j’en avais l’intuition. De cette première exploration un peu attentive, je tire d’ores et déjà deux résultats, l’un au plan pratique, l’autre au plan théorique.

Au plan pratique, suivant les suggestions de Sylvie, je me suis fait une petite sélection que j’écoute avec un grand plaisir :

- Gorka Hermosa, dont j’ai trouvé l’éditeur espagnol, mais qui, à ma connaissance, n’est pas importé en France.
- Taca, un accordéoniste japonais, élève entre autres de Daniel Mille, qui n’a pas encore sorti un cd. On peut l’écouter en solo et en duo. Sur son site, j’ai trouvé, parmi ses amis, quatre autres accordéonistes qui m’ont permis de compléter ma sélection…
- François Castiello, accordéoniste de Bratsch, dont l’album « Solo », d’où sont tirés les morceaux proposés, semble épuisé
- Vitaly Podolsky
- Muammer Ketencoglu
- Régis Huiban

… et bien sûr, je compte ne pas m’arrêter là, maintenant que le mouvement est amorcé. J’ai en particulier le projet d’en tirer quelques cds personnels.

Au plan théorique, cette exploration m’a donné à réfléchir quant à la notion de réseau. Cette notion est en effet largement répandue, tant dans les media que dans les sciences humaines (sociologie, économie, information et communication, organisation, etc...). En première analyse, elle s’oppose à la notion d’organisation pyramidale et hiérarchisée, où l’information considérée comme efficace est prioritairement l’information descendante. Mais je n’avais pas vraiment réfléchi au contenu positif et concret de cette notion. En parcourant « Myspace » ou, plus précisément ce sous-ensemble que j’appellerais « Accordionspace », j’ai mieux compris ce qui la définit.

Un réseau implique deux dimensions : d’une part un opérateur de communication (ici, le site) et un support physique correspondant (internet, ordinateurs), d’autre part un ensemble de personnes (amis) ou de groupes de personnes (amis des amis) reliées entre elles par un intérêt commun (l’accordéon) et décidées à mettre en œuvre certaines valeurs (coopération, diffusion, partage, promotion). Ces deux dimensions sont nécessaires, car sans support le réseau ne serait que potentialité, intention, fantasme, et sans les personnes et leurs actions il ne serait qu’un dispositif formel, vide et inerte.

J’ai bien compris aussi qu’un réseau, par définition, est polymorphe, et qu’il fonctionne de manière adaptative, donc fluctuante et flexible. J’ai compris aussi qu’il est, paradoxalement, ouvert et fermé : fermé parce que les membres se reconnaissent entre eux à des signes d’appartenance plus ou moins formels (style), ouvert parce qu’un réseau doit sans cesse rester informé de l’état de son environnement pour se situer et agir pour le modifier (promouvoir l’accordéon dans le monde musical).

Un réseau est en quelque sorte une structure qui se reconfigure en permanence. Sa pérennité implique des valeurs et une culture partagée (promouvoir l’accordéon et le partage), des actions communes (inscription, diffusion), un projet commun (faire vivre le monde de l’accordéon et le rendre identifiable). En fait, un réseau est toujours dérangeant – je soupçonne que cet « accordionspace » dérange un peu le monde de la musique classique, qu’il est un peu incongru – car il ne se conforme pas à une logique hiérarchique, ni aux règles de la communication ascendante ou descendante, ni aux reconnaissances officielles et labellisées, ni même aux diplômes. Il s’appuie sur des logiques floues, des ajustements permanents, des remises en question incessantes, des hiérarchies fonctionnelles et transitoires. Ses frontières sont instables et poreuses. Finalement, comme un être vivant, un réseau apprend et évolue sans cesse ; il produit de l’apprentissage expérientiel et il résulte de l’apprentissage expérientiel de ses membres. On peut parler, à propos d'un réseau, d'organisation apprenante. En contrepartie, on peut s’attendre à ce qu’il passe par des phases de développements et de replis, d’expansion et de réduction, de vitalité et de décrépitude, de complexification et de simplification… Un réseau, c’est comme un accordéon, ça se déplie, ça se replie. C’est la vie !

Bon ! Je suis content de ma déambulation dans l’univers de « Myspace ». J’y ai gagné le plaisir d’écouter de l’accordéon que je n’aurais pas connu sans cela et, à cette occasion, celui de mieux comprendre ce que signifie la notion de réseau, plaisir intellectuel certes, mais vrai plaisir. Je n’oublie pas que je le dois, au moins pour l’impulsion, aux courriels de Sylvie.

A ce jour, plus de 700 amis !

http://www.myspace.com/blogaccordeonmusique

Prévoir des sandwiches, des bières et du café avant de se mettre en route...