jeudi, août 23, 2007

jeudi 23 août

Charlotte et moi, nous avons passé un peu plus de deux heures au musée des beaux-arts de Pau. Charlotte avait emporté son carnet de dessin, deux crayons et une gomme. Après une première prise de contact rapide, Charlotte a décidé de copier un diptyque du peintre espagnol Taule Antoni, deux tableaux jumeaux intitulés « Brasil – Leningrad ». Il s’agit d’une sorte de variation sur « Les Ménines » de Velazquez. Sur l’un, une princesse de la cour d’Espagne pose devant un décor luxuriant. C’est le Brésil. Sur l’autre, une autre princesse, ou peut-être la même, pose devant un ensemble d’immeubles. C’est Leningrad. J’ai retrouvé la description et les caractéristiques de ce tableau de 1975 dans les collections du ministère de la culture, mais la notice ne comprend pas une reproduction photographique. Dommage !
Charlotte, sept ans et demi, a passé plus d’une heure et demie à peaufiner son dessin. Elle compte bien revenir pour s’approcher d’une réalisation satisfaisante. Cette copie est un vrai projet et ce fut un vrai bonheur de commenter avec elle ses intentions, de s’interroger sur la manière la plus efficace de résoudre tel ou tel problème. Il m’a semblé vérifier ainsi qu’il n’est d’apprentissage que dans l’action. En l’occurrence, si Charlotte apprend quelque chose, c’est parce qu’elle fait quelque chose et qu’elle a, chemin faisant, la possibilité de commenter sur le vif son action et ses tâtonnements.
Alors que nous quittions le musée, faisant allusion au titre d’un tableau, Charlotte me demande à brule-pourpoint : «C’est quoi un philosophe ? ». Je lui réponds : «Un philosophe c’est quelqu’un qui se demande tout le temps à quelles conditions on peut être heureux, si bien qu’il ne sait pas profiter des moments de bonheur qui se présentent à sa portée ». Je ne suis pas certain que Charlotte ait saisi tout le sens de ma réponse, mais il suffit qu’elle ait compris qu’on n’est pas forcément plus heureux parce qu’on réfléchit au bonheur, surtout si l’on fait profession de cette réflexion. Quant à moi, dois-je le dire, je suis assez content de ma réponse.
Avant qu’elles ne partent rendre visite à leurs grands-parents paternels avec Nadja et Sébastien, j’ai demandé à Charlotte et à Camille d’écouter « Chat pitre » dans la version « Tangaria, live in Marciac » et de me dire si ça leur plaisait ou non et si ça évoquait quelque chose pour elles, en d’autres termes si elles imaginaient quelque chose à l’occasion de cette écoute. Réponse lapidaire des deux : «Non, ça n’évoque rien, mais ça nous plait parce que ça fait danser». Démonstration à l’appui. Bon, évidemment, après, il faut ramasser deux ou trois objets bousculés en cours de démonstration, mais l’éducation esthétique et la connaissance de la psychologie de Charlotte et Camille (je n’irai pas jusqu’à parler de psychologie des enfants) vaut bien cette prise de risques et ce petit dérangement.