lundi, mai 05, 2008

mardi 6 mai - trentels images au fil des jours

J'ai la tête pleine d'images visuelles et sonores du festival de Trentels. J'ai essayé de mettre noir sur blanc mes impressions afin de les classer et de les ordonner un peu, mais en vain. D'autant plus que je n'ai pu résister au plaisir d'écouter plusieurs morceaux des disques que nous avons rapportés, si bien que mes impressions actuelles et mes souvenirs se mélangent. D'autre part, je crois que je n'ai guère envie de me lancer dans un travail d'analyse, donc de mise à distance, je préfère l'immersion. Une image me vient à l'esprit, qui m'amuse, celle de l'iceberg : des sensations, des perceptions et autres impressions émergent à ma conscience, mais je sais bien qu'elles ne sont que la partie émergée, superficielle, d'un mixte d'émotions qui ne se décanteront qu'avec beaucoup de temps. Et c'est cette partie immergée, quasi inconsciente, qui est la source du plaisir que j'éprouve à l'évocation de Trentels.

Je remets donc ce travail d'analyse et de décantation à plus tard. Pour aujourd'hui, je m'en tiens au choix de quelques photographies, des photonotes, qui me font signe quand je parcours les traces que mon Nokia a recueillies au fil des concerts.
Mieux qu'une longue description, une photographie du koto, au premier plan. Au second plan, une sorte de koto, originaire je crois de la Corée du sud. Une caisse de résonnance en bois de paulownia ; treize cordes, d'abord en soie, aujourd'hui en synthétique. On voit que l'accord se fait en glissant et déplaçant des petits chevalets sous les cordes.
Vêtu de sa veste noire, Bruno Maurice joue ici en trio.

Il a tombé la veste. Il joue deux de ses compositions : "Saumur pétillant" et "Mi-tango". Ce saumur, c'est du pur champagne ; ce "mi-tango", c'est une variation ou, plus exactement, une relecture du tango, pleine de finesse et de modernité. A deux mètres de Bruno Maurice - acoustique, tout acoustique - j'ai l'impression de sentir la réactivité de son instrument. Quelque chose comme un instrument de haute précision, un instrument quasi organique.


Jean-François Baez au milieu de son trio. Sorte de chevalier à la longue figure. Il se consume tout en jouant. Son oeuvre est pour ainsi dire obsédée par l'enfance, par ses enfants. Un jazz plein de tendresse et d'amour paternel. D'amour aussi pour sa femme à qui est dédié un titre.



Jean-François Baez solo. J'aime cette image, obscure et intimiste, avec la présence d'une contrebasse lumineuse à ses côtés.


Ponty Bone. Venu de son Texas, il est accompagné par trois bluesmen du sud-ouest : guitare, contrebasse et batterie. On a l'impression qu'il perpétue une tradition comme un officiant réalise un rite que rien ne doit venir changer. Il y a des musiques rondes et souples ; ici, c'est carré et inflexible.

Evidemment, Ponty Bone chante aussi et l'on imagine des histoires assez croquignolesques et assez imbibées...


Meriadec Gouriou, ce sont les entrailles de la terre qui jaillissent au grand jour. Quelques mots échangés avec lui au bar me font prendre conscience de l'importance qu'il accorde à ce qu'il appelle "le visuel" dans son spectacle. Et en effet, il y a de la transe dans sa prestation. Souvent la scène est noire et rouge. L'accordéon se tord et s'étire en tous sens quand il n'est pas instrument de percussion. On peut parler de métal en fusion et d'accordéon volcanique.






En contraste avec Meriadec Gouriou, les quatre mousquetaires de "Danças Ocultas". Ni contorsions, ni mouvements incontrôlés. De la mesure avant toute chose. Ils se devinent entre eux sans avoir besoin de se regarder. Les titres s'enchainent sans hésitations. Plus professionnel que ce quatuor, tu meurs...

Il y a quelque chose de hiératique dans leurs postures. Quelque chose de l'ordre du rituel. Mais un rituel tout autre que celui de Gouriou. L'accordéon sera géomètrique ou ne sera pas, disent les uns ; l'accordéon sera convulsif ou ne sera pas, dit l'autre. Un art classique versus un art surréaliste (André Breton ne disait-il pas :"La beauté sera convulsive ou ne sera pas" ?).
Dès demain, je commence à mettre un peu d'ordre dans tout ça... avec encore plein de photographies à choisir.