mardi, août 19, 2008

mardi 19 août - feria de dax

Je n’ai pas le tempérament « festayre ». J’aime l’ambiance des fêtes, en particulier celle de la feria dacquoise, comme une parenthèse de six jours en rouge et blanc, mais je ne sais pas m’immerger dans ce tourbillon et me laisser aller au gré des rencontres de bistrots. Disons que je reste spectateur de toute cette agitation. Si mon plaisir est moins dans la participation que dans l’observation, il n’en est pas moins intense. Cette année, cette sorte de distance naturelle que j’entretiens avec le monde, et que sans doute je cultive en ayant toujours mon appareil photo numérique en main, cette distance donc m’a fait prendre conscience de la force omniprésente des rituels qui, à chaque instant, structurent la fête. On est dans un monde magique. C’est le temps des contes, « il était une fois… », non le temps de la chronologie historique. Charlotte et Camille le savent bien qui, sans consulter le programme, peuvent anticiper toutes les manifestations qui les intéressent : journée des enfants, défilé de bandas, défilé folklorique, déjeuner du 15 août dans la rue, repas landais, course des enfants, fête foraine, achat de vêtements rouges et blancs, forcément rouges et blancs, choix de foulards, etc… J’en oublie évidemment.

Parmi ces rituels, certains sont sociaux, d’autres privés. Sociaux, l’ouverture des fêtes par le maire qui remet les clés de la ville aux associations chargées de l’animation ; la clôture en plusieurs épisodes : les bandas dans l’arène après la dernière corrida, le feu d’artifice à la tombée de la nuit ; les corridas débutant à 18 heures précises ; les tertulias et autres bodegas ; les défilés de bandas ou de groupes folkloriques, etc… Privés : le choix des T-shirts, différents pour chaque journée, le choix des foulards, le panaché pris dans les arènes un quart d'heure avant le début de la corrida, la daube de toro, la cote de bœuf, le pastis landais, le choix des vins dans la cave familiale, etc… Si bien que chaque temps de la feria est comme une renaissance. A Dax, il y a pour ainsi dire deux calendriers pour marquer le temps : celui du premier de l’an, calendrier qui inscrit Dax dans l’histoire et celui de la semaine des fêtes qui inscrit Dax dans le monde des mythes et de l’éternel renouvellement.

Avant la dernière corrida, mes voisins, derrière moi, comparaient les mérites de leurs jumelles respectives. Je les entendais discuter. Ces jumelles leur servaient à mieux voir toros et matadors, mais aussi à mieux apprécier le travail des avants dans l’affrontement des mêlées de rugby, mais aussi à chasser l’isard dans les Pyrénées. A propos de chasse, on en vint tout naturellement à parler cuisine : comment accommoder le toro, comment faire cuire les cèpes, comment griller une cote de bœuf au barbecue, quels fromages avec quels vins… et avec quels copains… Et puis les clarines ont sonné le début de la corrida, à l’heure, juste à l’heure. Quelques minutes plus tard on commentait l’allure du toro, ses cornes, son moral, on appréciait la faena avec justesse et finesse, en tout cas avec une longue expérience acquisse de plaza en plaza. Je me disais que tout cela exprimait une vraie culture. Je me disais que tout cela était fondé sur quelques mythes et sur beaucoup de rites correspondants et cela me donnait confiance pour résister aux vicissitudes et aux variations du monde et de son avatar actuel, la mondialisation.

Rituels d'ouverture et de clôture des fêtes : les foulards rouges comme un mouvement de vagues au-dessus des têtes. On pourrait dire que la fête se développe entre ces deux moments... rouges.
J'aime cette image où l'on voit les enfants juchés sur les épaules des adultes pour mieux participer à la fête. Transmission de génération en génération.





Après la fin de la dernière corrida, les bandas investissent le ruedo. Une douzaine de bandas. Trois morceaux traditionnels, dont "Valencia" et l'émouvant "Agur" . On ne peut se résoudre à quitter l'arène au risque de rompre le charme.


Et encore les foulards... rouges, comme les vagues de l'océan.














Et l’accordéon ? Il n’était pas absent. Nous le verrons…