samedi 8 avril
Aller – retour entre Pau et Hossegor dans la journée. Tout le long de la route, les murs des fermes sont chargés de glycines qui ont au moins vingt ans d’âge. Les villas d’Hossegor sont encore fleuries de mimosas qui seront bientôt remplacés par les lilas et les arbres de Judée. Nous déjeunons sur la place des Landais, au « Mar y Sol » : moules – frites, crème brûlée, pichet de vin blanc. Des moineaux viennent sur notre table nous disputer de la mie de pain. Le repas n’est pas gastronomique, mais le fond de l’air n’est pas frais. L’océan est d’huile, quelques bateaux blancs sont posés comme des virgules sur la page bleue ; il n’y a pas un souffle de vent. Des couples de retraités, d’une part, et des couples avec des enfants non scolarisés, d’autre part, se baladent en musardant. Il n’y a pas de gens en âge d’être d’étudiants, car ils sont occupés à bloquer leurs universités ou à rattraper les cours annulés depuis plusieurs semaines. Est-ce cela l’avant-révolution ?
A la fin des années 60 et au début des années 70, nous avons vécu à Marrakech. Nous n’oublierons jamais notre émerveillement en découvrant un certain matin de chaque printemps la beauté explosive des Jacarandas mauves sur l’avenue Mohamed V.
- « Marc Perrone / Jacaranda », Rue bleue / Le Chant du Monde, 1995. Enregistré en public au Théâtre du Petit Montparnasse, à Paris, au cours de vingt-neuf concerts, entre le 1er mars et le 2 avril 1994.
Je retiens d’abord la structure générale du disque tiré des vingt-neuf concerts : trois actes et deux intermèdes. C’est un voyage en trois actes au cours duquel se construit la conviction que la musique se fait avec et pour les gens. Proximité et équilibre fragile : on se met en danger et c’est jubilatoire. Marc Perrone parle aussi de lente élaboration et de connivence amicale. La prise de risque et la confiance sont indissociables. La musique vivante, c’est jouer sur le fil : « toujours la même chose, mais rien n’est jamais pareil ». Dialectique du même et de l’autre. A un autre moment, il parle aussi d’ « art maigre ». Je comprends qu’il s’agit d’un art où il n’y a pas de gras, pas de superflu, en un mot un art où il n’y a rien de trop, juste l’essentiel. Je pense aux personnages de Giacometti. La beauté, c’est ce à quoi on ne peut plus rien ajouter, ni retrancher.
Il est question d’airial, ce lieu typique des Landes, apaisant comme un ventre maternel ; havre de quiétude au milieu des grands pins qui palpitent sous les coups de vent venus de l’Océan. Il est aussi question de La Serra où l’Italie et les images de l’enfance sont inextricablement tissées. Et encore de mélodies comme des berceuses… Tendresse. Ancrage. Racines.
On a quelques éclaircissements sur « la saga rocarolesque ». On apprend qu’il s’agit d’une chanson diatonique, enfant naturel né de la rencontre du coca-cola et du rock-and-roll dans la tête de tante Judith. Pour en savoir plus ( ?), il faut lire la mise en mots faite par André Minvielle. On hésite entre le dadaïsme et le lettrisme d’Isidore Isou.
L’album s’ouvre et se clôt sur deux versions de Jacaranda. La première est tendue comme un filet de voix fragile et obstiné ; la seconde, dite intégrale, est superbe, entre tension et légèreté. Elle est jouée par le trio, Perrone, Di Donato, Méchali.
Suivant une habitude maintenant bien ancrée, on retrouve trois enchaînements, dont deux me touchent particulièrement :
- Suite Cinéma. La voix du public est très émouvante. Perrone s’y accorde, l’accompagne, la suit, puis il prend la direction, donne la voie et ainsi de suite… Ce dialogue m’a fait penser à ce grand moment où Raul Barboza joue, « Live at Montmagny », une version de La foule qui dit à l’évidence ce que peut-être un moment de communion entre un musicien et disons, non pas des spectateurs, mais plutôt les participants à un concert. Le mot acteur prend ici tout son sens.
- Suite pour « Tire-au-flanc », une marche, une java, une valse… Musique pour un film muet ! Cette suite me semble préfigurer les disques à venir.
On ne peut terminer sans mentionner encore l’amitié et la fidélité. Uzeste musical, « sans qui la réalité de mes rêves artistiques et musicaux ne serait pas la même ». Toujours rendre ce que l’on doit à qui a donné. Quant aux compagnons, on les a déjà tous rencontrés : Marie-Odile Chantran, Jacques Di Donato, Bernard Lubat, Jean-Louis Méchali, André Minvielle, Raphaël Sanchez. Une famille par cooptation.
A la fin des années 60 et au début des années 70, nous avons vécu à Marrakech. Nous n’oublierons jamais notre émerveillement en découvrant un certain matin de chaque printemps la beauté explosive des Jacarandas mauves sur l’avenue Mohamed V.
- « Marc Perrone / Jacaranda », Rue bleue / Le Chant du Monde, 1995. Enregistré en public au Théâtre du Petit Montparnasse, à Paris, au cours de vingt-neuf concerts, entre le 1er mars et le 2 avril 1994.
Je retiens d’abord la structure générale du disque tiré des vingt-neuf concerts : trois actes et deux intermèdes. C’est un voyage en trois actes au cours duquel se construit la conviction que la musique se fait avec et pour les gens. Proximité et équilibre fragile : on se met en danger et c’est jubilatoire. Marc Perrone parle aussi de lente élaboration et de connivence amicale. La prise de risque et la confiance sont indissociables. La musique vivante, c’est jouer sur le fil : « toujours la même chose, mais rien n’est jamais pareil ». Dialectique du même et de l’autre. A un autre moment, il parle aussi d’ « art maigre ». Je comprends qu’il s’agit d’un art où il n’y a pas de gras, pas de superflu, en un mot un art où il n’y a rien de trop, juste l’essentiel. Je pense aux personnages de Giacometti. La beauté, c’est ce à quoi on ne peut plus rien ajouter, ni retrancher.
Il est question d’airial, ce lieu typique des Landes, apaisant comme un ventre maternel ; havre de quiétude au milieu des grands pins qui palpitent sous les coups de vent venus de l’Océan. Il est aussi question de La Serra où l’Italie et les images de l’enfance sont inextricablement tissées. Et encore de mélodies comme des berceuses… Tendresse. Ancrage. Racines.
On a quelques éclaircissements sur « la saga rocarolesque ». On apprend qu’il s’agit d’une chanson diatonique, enfant naturel né de la rencontre du coca-cola et du rock-and-roll dans la tête de tante Judith. Pour en savoir plus ( ?), il faut lire la mise en mots faite par André Minvielle. On hésite entre le dadaïsme et le lettrisme d’Isidore Isou.
L’album s’ouvre et se clôt sur deux versions de Jacaranda. La première est tendue comme un filet de voix fragile et obstiné ; la seconde, dite intégrale, est superbe, entre tension et légèreté. Elle est jouée par le trio, Perrone, Di Donato, Méchali.
Suivant une habitude maintenant bien ancrée, on retrouve trois enchaînements, dont deux me touchent particulièrement :
- Suite Cinéma. La voix du public est très émouvante. Perrone s’y accorde, l’accompagne, la suit, puis il prend la direction, donne la voie et ainsi de suite… Ce dialogue m’a fait penser à ce grand moment où Raul Barboza joue, « Live at Montmagny », une version de La foule qui dit à l’évidence ce que peut-être un moment de communion entre un musicien et disons, non pas des spectateurs, mais plutôt les participants à un concert. Le mot acteur prend ici tout son sens.
- Suite pour « Tire-au-flanc », une marche, une java, une valse… Musique pour un film muet ! Cette suite me semble préfigurer les disques à venir.
On ne peut terminer sans mentionner encore l’amitié et la fidélité. Uzeste musical, « sans qui la réalité de mes rêves artistiques et musicaux ne serait pas la même ». Toujours rendre ce que l’on doit à qui a donné. Quant aux compagnons, on les a déjà tous rencontrés : Marie-Odile Chantran, Jacques Di Donato, Bernard Lubat, Jean-Louis Méchali, André Minvielle, Raphaël Sanchez. Une famille par cooptation.
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