jeudi, avril 06, 2006

vendredi 7 avril

Les camélias sont fleuris en abondance. On a le sentiment que c’est trop, trop rouge, trop abondant. Une fleur tombe, trois éclosent. Une sorte de gaspillage… Les trois glycines ont connu des fortunes diverses en traversant les gelées de l’hiver. L’une est couverte de grappes mauves ; l’autre prépare son éclosion ; de la troisième, pourtant protégée par trois bouleaux, il ne reste qu’une seule branche vivante. On sent qu’elle veut vivre à tout prix et qu’il y réussira. Chaque matin, on observe ses efforts de survie. Le chèvrefeuille, comme tous les ans, commence à envahir la haie du voisin.

- « Marc Perrone / Cinéma Mémoire », Le Chant du Monde, 1993. Disque enregistré en février 1993.

La couverture est sans éclats, sans couleurs ni graphismes agressifs ; elle est sobre et rigoureuse dans les formes et dans les tons. Sa géométrie annonce le livret informatif de quatorze pages. Elle représente un mur du hall d’entrée d’un cinéma des années d’après-guerre. Il pourrait s’appeler « Le Rex ». Accrochées à ce mur, trois photographies de vedettes : Gabin, Arletty et, entre eux, un portrait de Marc Perrone, façon studio Harcourt. Très classe ! En sur-titre, Marc Perrone accordéon diatonique. Disque de mémoire, de nostalgie, de fidélité et de vitalité.

De même que l’on trouvait dans « La Forcelle » un titre dédié « A mon Père », on trouve ici, en dédicace « A ma Mère », l’interprétation de la chanson « Le chaland qui passe » (Parlame d’Amore Mariu). Enracinement familial. Attachement. Tendresse. Et en arrière-fond l’Italie, ses mélodies, son bel canto, ses migrants, qui font passer les frontières à leurs airs familiers, comme des contrebandiers…

Page 5 du livret, Marc Perrone écrit que ce disque s’inscrit « dans la longue chaîne des musiciens connus ou inconnus, qui habitent les images du cinéma français depuis le début du parlant ». Tiens ! Il est question de chaîne et donc d’enchaînements. Il ajoute : « Cinéma Mémoire est pour moi comme un voyage dont le départ se situerait sur le pont de « L’Atalante » et qui finirait avec « Un dimanche à la campagne ». Il aura fallu attendre cinquante ans pour revoir un accordéon diatonique à l’écran, serait-ce un signe ? ». Voyage, images… N’est-il pas significatif que Perrone écrive « revoir » et non « entendre un accordéon diatonique » ? De l'image et de l’accordéon, qui accompagne qui ? La question ne se pose pas, ils sont l’un pour l’autre des compagnons. Piste que les prochains disques exploreront.

La présentation des œuvres jouées occupe plusieurs pages d’un tableau synoptique à quatre entrées : titres, films et dates, compositeurs, réalisateurs. Le choix des titres est présenté suivant un ordre à peu près chronologique. L’intention n’est pas didactique, mais elle est manifestement culturelle, au sens où il s’agit de garder vivantes les traces d’une expression artistique et d’une culture éminemment populaires, et d’en perpétuer la tradition dans des œuvres nouvelles. Il faudrait tout citer. Quelques exemples suffiront : L’Atalante / Maurice Jaubert / Jean Vigo ; Le Million / Van Parys / René Clair ; Les portes de la nuit / Kosma / Marcel Carné : Touchez pas au grisbi / Wiener / Jacques Becker ; Un dimanche à la campagne / Perrone, Sarde / Bertrand Tavernier.

Et puis, encore et toujours, les rencontres et les amitiés : Philippe Gavardin, Alain Lacombe, Bernard Favre, Bertrand Tavernier… et le souci scrupuleux de rendre à chacun ce qu’on lui doit. Marc Perrone sait bien, et il le dit, que rien ne se fait sans les autres ni rencontres. Quant au plan musical, on retrouve ce mélange entre des noms nouveaux et les noms des membres de la famille : Chantran, Tuveri, Duprat, Lubat. Pour les nouveaux, qui sont déjà aussi de la famille : Di Donato (clarinette), Delaunay (clarinette), Sanchez (arrangements et piano), Apap (alto), cavelier (violon), Peyratout (contrebasse), Méchali (batterie).