jeudi 1er mars
Françoise s’est lancée dans une entreprise de transfert de cds d’accordéon vers son baladeur MP3. Elle se concocte des sélections très personnelles, avec une préférence très marquée pour Richard Galliano, Marc Perrone et Gotan Project. Ses choix sont bien déterminés, mais les dosages se font au trébuchet. Tous les Galliano sont sur son bureau ; elle hésite entre des sélections plutôt disparates, voire aléatoires, des sélections fondées sur diverses interprétations d’un même titre, des sélections suivant tel ou tel style. Chaque hésitation est l’occasion de nouvelles écoutes, de nouvelles découvertes ou de redécouvertes, bref occasion d’échanges et de nouveaux plaisirs.
Parmi les disques de Galliano, le dernier, « Solo », produit et distribué par Dreyfus Jazz. Sur la page de présentation, je relis le paragraphe écrit par Patrice Trapier. Il cite Richard Galliano : « une valse, si on creuse, c’est toujours un retour vers l’Afrique ». Cette phrase m’intrigue, car je n’en saisis pas clairement le sens. Mais j’en retiens cette idée que la valse peut être animée par un souffle africain et du coup je comprends mieux certaines interprétations de Richard Galliano, qu’il s’agisse de valse ou autre.
A la suite de cette phrase, énigmatique et éclairante à la fois, je relis ce passage, que j’ai déjà cité et un peu commenté : « Avec l’âge, l’exigence ne fait que croître. Le trac est bien plus fort qu’auparavant. C’est la conscience d’enjeux musicaux plus affirmés, la tension qui permet, dès les premières notes, de faire disparaître toute trace de lassitude ». J’avais noté à quel point je comprenais bien ce propos et je le trouvais très juste. Il me semble en effet bien rendre compte du mouvement qui fait avancer Richard Galliano. Le moteur de ce mouvement, c’est le trac. Quand on a atteint en effet un tel degré de perfection, on ne peut se reposer sur ses lauriers. Tout au contraire, chaque nouveau concert correspond à une nouvelle mise en jeu de cette perfection. La difficulté est moins d’atteindre le sommet que de s’y maintenir ou, plus exactement, de le vaincre à chaque nouvelle tentative. Bien plus, comment, de concert en concert, garder la capacité de se renouveler en improvisant. Comment continuer à s’étonner, car je crois que Richard Galliano nous étonne dans la mesure même où il trouve chaque fois les ressources pour s’étonner. C’est Albert Camus, je crois, qui écrivait qu’il faut imaginer Sisyphe heureux. J’imagine Richard Galliano heureux. Chaque nouveau concert est certes une épreuve, mais cette épreuve à surmonter est la seule façon de sortir du trac généré par le concert précédent. Et cette épreuve, c’est un vrai bonheur.
Au bas du texte de présentation, quelques lignes manuscrites (Paris, le 23 novembre 2006) « j’ai traversé la vie avec mon accordéon dans les bras, c’est pourquoi jouer en solo est une chose naturelle pour moi comme parler, rêver, voyager, penser, pleurer, rire et aimer. Mon accordéon fait partie de mon corps. Je respire et expire à travers lui », Richard Galliano. Où l’on voit à quel point ce qui est perçu et vécu comme "une chose naturelle" est en fait aussi et d’abord un comportement culturel, l’expression immédiate d’un certain rapport au monde. Peut-être l’expression d’une certaine conception nomade de la vie où les attaches se confondent avec des rencontres.
Parmi les disques de Galliano, le dernier, « Solo », produit et distribué par Dreyfus Jazz. Sur la page de présentation, je relis le paragraphe écrit par Patrice Trapier. Il cite Richard Galliano : « une valse, si on creuse, c’est toujours un retour vers l’Afrique ». Cette phrase m’intrigue, car je n’en saisis pas clairement le sens. Mais j’en retiens cette idée que la valse peut être animée par un souffle africain et du coup je comprends mieux certaines interprétations de Richard Galliano, qu’il s’agisse de valse ou autre.
A la suite de cette phrase, énigmatique et éclairante à la fois, je relis ce passage, que j’ai déjà cité et un peu commenté : « Avec l’âge, l’exigence ne fait que croître. Le trac est bien plus fort qu’auparavant. C’est la conscience d’enjeux musicaux plus affirmés, la tension qui permet, dès les premières notes, de faire disparaître toute trace de lassitude ». J’avais noté à quel point je comprenais bien ce propos et je le trouvais très juste. Il me semble en effet bien rendre compte du mouvement qui fait avancer Richard Galliano. Le moteur de ce mouvement, c’est le trac. Quand on a atteint en effet un tel degré de perfection, on ne peut se reposer sur ses lauriers. Tout au contraire, chaque nouveau concert correspond à une nouvelle mise en jeu de cette perfection. La difficulté est moins d’atteindre le sommet que de s’y maintenir ou, plus exactement, de le vaincre à chaque nouvelle tentative. Bien plus, comment, de concert en concert, garder la capacité de se renouveler en improvisant. Comment continuer à s’étonner, car je crois que Richard Galliano nous étonne dans la mesure même où il trouve chaque fois les ressources pour s’étonner. C’est Albert Camus, je crois, qui écrivait qu’il faut imaginer Sisyphe heureux. J’imagine Richard Galliano heureux. Chaque nouveau concert est certes une épreuve, mais cette épreuve à surmonter est la seule façon de sortir du trac généré par le concert précédent. Et cette épreuve, c’est un vrai bonheur.
Au bas du texte de présentation, quelques lignes manuscrites (Paris, le 23 novembre 2006) « j’ai traversé la vie avec mon accordéon dans les bras, c’est pourquoi jouer en solo est une chose naturelle pour moi comme parler, rêver, voyager, penser, pleurer, rire et aimer. Mon accordéon fait partie de mon corps. Je respire et expire à travers lui », Richard Galliano. Où l’on voit à quel point ce qui est perçu et vécu comme "une chose naturelle" est en fait aussi et d’abord un comportement culturel, l’expression immédiate d’un certain rapport au monde. Peut-être l’expression d’une certaine conception nomade de la vie où les attaches se confondent avec des rencontres.
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