dimanche, février 04, 2007

lundi 5 février

… écouté cet après-midi trois albums, comme j’aurais rencontré avec grand plaisir trois copains, plus ou moins perdus de vue.

Le premier, « Viaggio » de Richard Galliano, disque de 1993, est déjà un disque de maturité, en ce sens que l’on y perçoit en filigrane beaucoup de pistes qui seront explorées ensuite au fil des années. Rencontre d’une tradition musicale parisienne menacée d’obsolescence avec un jazz intimiste, tout en demi-teintes. Il s’agit de chuchotements, de secrets échangés à demi-mots. Pas d’éclats de voix. La présence de Biréli Lagrène, de Pierre Michelot et de Charles Bellonzi contribue à installer un climat d’apesanteur. On est finalement assez loin du style actuel de Galliano, beaucoup plus violent et débordant d’énergie, et pourtant on ne peut s’y tromper, c’est bien son style. Galliano, c’est le copain solide, qui ne fera jamais défaut.

Autre rencontre, « Son éphémère passion » de Marc Perrone. Magnifique album de 2004. Vingt et un morceaux. La générosité à l’état pur. Je me rappelais « L’échappée belle », « La marche de Victor Baton » et « La valse d’Hellemes ». Je les ai retrouvées avec émotion. Jacques Di Donato, entre autres, est admirable. Il contribue grandement au climat du disque. Si les mots ont un sens, je dirais volontiers que Marc Perrone incarne des valeurs, un esprit et une attitude de gauche. Marc Perrone, c’est le copain humaniste, idéaliste et désarmant de bonté. J’ai eu l’occasion d’écrire qu’à mon sens l’esthétique englobe l’éthique. Il me semble que Perrone vérifie assez bien cette proposition. La place du chant, de plus en plus importante au fil de ses albums, me parait contribuer à cette dimension humaniste : voix fragile, mais obstinée et sans failles, voix de proximité.

Dans les deux cas, l’accordéon n’est pas seulement ce qui enjolive la vie ; l’accordéon, c’est la vie, un art de vivre. De ce point de vue, on pourrait à bon droit les qualifier d’accordéonistes épicuriens.

Et puis, enfin, j’ai retrouvé « Confluences » de Jean-Louis Matinier, disque de 2003. Quartet avec R. Rangel à la flute, N. Veras à la guitare et R. Garcia-Fons à la contrebasse. J.-L. Matinier parle de l’influence de la Loire et de ses méandres sur son inspiration. Il qualifie son album d’itinéraire, de « Chemin de Compostelle ». Je ne peux m’empêcher de penser à cette présence constante du voyage, que l’on retrouve dans « Fuera » avec Garcia-Fons ou dans « Le voyage de Sahar » avec Anouar Brahem. Un disque intimiste. Faut-il parler de quartet ou de quatuor ? Le label, « Enja » incite à garder quartet. Matinier, c’est le copain discret et en apparence modeste, mais drôlement déterminé, avec une ligne de conduite bien tracée, ce qui ne signifie pas toute droite.