mardi, janvier 29, 2008

mercredi 30 janvier - "accompagner", dites-vous ?

Alors que nous petit-déjeunons, Françoise, me fait remarquer, à propos de mon blog d’hier, qu’il faudrait que Jean-François Zygel fasse une série d’émissions sur l’accordéon pour que celui-ci trouve la notoriété qu’il peut légitimement revendiquer. Et je trouve cette idée très juste. Il faudra que je voie s’il est possible de lui adresser un message en ce sens… J’imagine déjà ce que pourrait être son travail passionné / passionnant de déconstruction / reconstruction avec quelques grands interprètes…

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… écouté « Annick Cisaruk chante Barbara accompagnée par David Venitucci ». J’observe qu’Annick Cisaruk, sans me faire oublier la voix de Barbara (comment serait-ce possible ? Serait-ce même souhaitable ?), arrive à donner de l’œuvre de celle-ci une interprétation très personnelle. Sa voix est certes moins voilée et moins fragile que celle de Barbara, mais sa tension est bien fidèle à l’original. Une tension incandescente, à la limite de la rupture ; un fil tendu prêt à se rompre, mais qui ne rompt pas.

Mais ce disque m’intéresse aussi par la présence de David Venitucci. Il est présenté en couverture comme accompagnateur ; au verso, on lit « accordéon et arrangement, David Venitucci ». En fait, le mot et la notion d’accompagnement me paraissent un peu inadéquats pour rendre compte de sa présence. Accompagner, dans la conception commune, c’est suivre, pour le soutenir, un interprète principal. Cette représentation ne rend pas justice du rôle de Venitucci ici. Si l’on parle d’accompagner, il faut alors lui donner le sens fort d’aller en même temps que… d’un même pas… Mais cela ne correspond encore pas à ce qu’il en est en réalité. En fait en effet il faudrait parler d’une sorte de double fonction ou de double rôle : accompagnement au sens usuel, mais aussi improvisations lumineuses, solo, qui éclairent les différents morceaux d’une signification particulière.

Cette posture de David Venitucci me parait intéressante aussi parce qu’elle s’inscrit dans un courant de plus en plus manifeste, qui donne à l’accompagnement un sens nouveau, qu’il n’avait pas jusqu’ici. On pense certes à des accompagnateurs prestigieux comme Azzola pour Brel, Galliano pour Nogaro, Romanelli pour Barbara ou d’autres encore, mais ils ne jouaient pas les premiers rôles. Aujourd’hui, j’observe de plus en plus de duos voix / accordéon où les deux partenaires jouent à égalité, chacun tenant un rôle spécifique, et où l’accordéon se fait une place de premier plan. A certains moments, c'est lui qui ouvre la voix, qui trace le chemin.

Je pense, outre cet album, au disque de Daniel Mille et J.-L. Trintignant à partir des poèmes à Lou d’Apollinaire, aux concerts de Toucas avec Michèle Bernard ou encore au spectacle de Lionel Suarez avec Jean Rochefort.

De manière générale, je préfère l’accordéon purement instrumental, mais en l’occurrence je constate que je prends goût à ces créations, qui me paraissent préfigurer par leur originalité un type de création plein d’avenir.