jeudi, juillet 31, 2008

samedi 2 août - parcours fléché

J’ai dit ces derniers jours le plaisir que j’avais eu à écouter quelques disques, comme celui de Jimenez, comme « Tref », comme le dernier de Dazibao, et d’autres encore. Ci-dessous, quelques liens utiles pour se faire une idée, en un minimum de temps, de…

- Flaco Jimenez :

http://www.flacojimenezmusic.com/cd.asp

http://www.youtube.com/watch?v=OKZvSz4qs2w


- du quintet «Accordion Tribe »

http://musiques.de.nuit.free.fr/index.php?nomData=artistes/accordion_tribe.php

- de Dazibao et de son deuxième disque, « E 40 »

http://www.homerecords.be/francais/dazibao/E40.php

- du disque de Beghin et Laloy, « Cryptonique »

http://www.chapitre.com/CHAPITRE/fr/MUSIC/beghin-fabien-laloy-didier/cryptonique,14585579.aspx

- de leurs biographies

http://www.homerecords.be/francais/beghin_laloy/biobeghin_laloy.php

- de « Tref » en concert (une minute)

http://fr.youtube.com/watch?v=5GbpB4aDTb4&feature=related

- ou encore de Per Arne Glorvigen, dont j’avais dit, il y a quelque temps, à quel point le disque de bandonéon, « Virgin and Whore – Bach and Piazzolla», m’avait surpris et enchanté.

http://www.perarne.net/index.php?action=video

vendredi 1er août - cryptonique : la culture en acte

L'air est immobile. Léger, avec un petit quelque chose qui est annonciateur d'orage. Les portes et fenêtres sont ouvertes. Un souffle léger traverse la villa et se charge d'effluves musicales. De l'accordéon, toujours de l'accordéon.


J'ai écouté en boucle "Tref" et "E 40" de Dazibao. Etrange décalage entre ces airs venus du Nord et le calme de l'air, plutôt inhabituel sur cette côte. Quelque chose de médittérranéen sans les cigales, mais avec des écureuils espiègles.

Plus tard dans la soirée, le soleil couchant enflamme les murs de la terrasse arrière;







Peu avant l'arrivée de la troupe, les filles venant de la plage, Sébastien venant de faire un tour du lac, je mets en lecture "Cryptonique" de Fabian Beghin et Didier Laloy. Alors que Sébastien sacrifie au rite des étirements, que Françoise et Nadja étendent les affaires de plage, que Charlotte et Camille défient leurs Nintendo et que moi-même je lave pinceaux et rouleaux, c'est comme un moment d'attention qui nous surprend : "The two pennies waltz (la valse à deux balles)". Comme l'aurait dit le poète, le temps suspend son vol.
- "C'est joli, dit Sébastien, l'amateur de rock plutôt raide ; c'est du diatonique ?".
-"Un de chaque : chromatique et diatonique"... "Et ça vous plait, les filles ?".
-"Oui... ".
On danse...
Un des morceaux est dédié à tous les musiciens traditionnels bulgares qui aiment écouter Pink Floyd en lisant "L'avenir de Sofia". L'ensemble du fascicule de présentation est du même tonneau et son style ne contribue pas peu au plaisir que me procure ce disque.









jeudi 31 juillet - texmex et dazibao

Lundi matin, avant de retourner à Hossegor pour y retrouver Françoise et « les petits », je me découvre l’obligation impérieuse d’aller acheter une cartouche d’encre noire pour l’imprimante. En fait, je ne suis pas dupe, c’est un prétexte. Je sais bien qu’en allant chercher cette cartouche à l’espace culturel de « notre » hypermarché, je n’en sortirai pas sans avoir fait un tour par le rayon des disques. Petits arrangements avec la mauvaise foi… pour une bonne cause.

Deux couvertures attirent immédiatement mon regard. Inutile d’aller plus loin. Mon choix est fait :

- « He’ll Have To Go », Flaco Jimenez. Enregistrement de douze nouveaux morceaux. Studio de San Antonio, Texas. MM Records.
- « E 40 », Dazibao. Homerecords, 2007.

Flaco Jimenez m’est tout à fait inconnu, mais son visage âgé et plutôt usé, son accordéon Hohner, beau comme un camion, et le croisement entre son nom « latino » et le titre en anglais, tout cela suffit à déterminer mon choix. L’autre disque m’intéresse, car j’essaie de suivre le parcours de Dazibao. Sophie Cavez et Jonathan de Neck aux diatoniques, c’est assez pour me donner envie de les écouter.

Muni de ces deux disques, en route pour Hossegor. J’ai bien l’intention d’en faire l’accompagnement de mon trajet, mais en fait la circulation fluide, mais rapide, avec beaucoup de camions, me dissuade de mener à bout mon projet. La route se fera au son de France Info et de ses informations en boucle. Curieuse impression : le rappel, à l’identique, des mêmes phrases, donne le sentiment quasi hypnotique de faire du surplace, de se déplacer sans bouger ou de bouger sans se déplacer. Mais si je renonce à écouter ces deux disques, c’est aussi par une sorte de sentiment moral : j’ai toujours mauvaise conscience en écoutant de l’accordéon en conduisant, car je sais bien que je ne pourrai lui donner toute l’attention qu’il mérite. C’est comme si je manquais de respect envers les musiciens qui ont œuvré pour produire cet objet de plaisir qu’est un disque.

C’est donc beaucoup plus tard que je pourrai écouter vraiment Flaco Jimenez et Dazibao. Pour cela, j’ai profité de deux circonstances favorables :

- le beau temps, délicieux dès le matin, et la marée propice incitent la famille à aller à la plage. Même Sébastien, qui d’habitude privilégie ses travaux de carrelage au son d’un rock plutôt musclé, dont il tonitrue les paroles à toute volée, même Sébastien donc est partant pour aller sauter les vagues. Je propose de préparer le déjeuner : piperade et brochettes de bœuf au barbecue… Seul dans la maison, j’écoute Flaco Jimenez, dont j’ai vérifié qu’on peut le retrouver sur son site web et sur YouTube. C’est donc un homme du Texas et en effet il y a de la culture tex-mex dans sa musique. Des rythmes d’Amérique du Sud, des stridences dignes de Clifton Chenier, parfois comme un souffle de fandango, mais oui ! On pense aussi au forro à certains moments. Mais surtout, un morceau me fascine : « Morenita Mia ». Du pur sirop ! J’ai une affection particulière pour Ibrahim Ferrer ; j’avais rêvé sa rencontre avec un accordéoniste de talent ; je m’étais fait à l’idée que cela resterait un rêve. Disons que j’avais fait mon deuil de cette rencontre. Eh bien, « Morenita Mia », c’est la voix d’Ibrahim Ferrer ressuscité accompagné par le « Hohner » de Flaco Jimenez. Un pur régal. Heureusement que je suis seul dans la villa, je suis sûr que ce morceau a tourné plus de sept fois de suite…
- le même beau temps ayant incité la famille à aller en soirée faire quelques brasses au bord du lac et dans le canal, j’ai proposé de peindre plusieurs portes et leurs encadrements, profitant de ce que l’air sec est favorable pour mener à bien ce type de travail. J’ai donc installé mes tréteaux en batterie (4x2) : bleu pâle pour les portes des chambres, prune pour la porte intérieure du séjour. Et pour m’accompagner : « E 40 » de Dazibao. Je trouve que leur musique a pris du corps. Je trouve qu’il y a en celle-ci de la gaîté et de la nostalgie. Une sorte de néo-folklore. Des airs venus du Nord. Parfois, une voix qui me rappelle Meriadec Gouriou. Bien entendu, ça tourne en boucle. Le temps est immobile. Je suis sûr que ma peinture s’en ressent. Je la trouve, comment dire… sereine.

Et puis l’envie me prend d’écouter « Tref » : trois accordéons diatoniques et des percussions. Wim Claeys, Didier Laloy, Bruno Le Tron et Frederic Malempre. Cette musique pourrait être dite festive, en fait j’y trouve beaucoup de gravité. J’ai beaucoup aimé « Walsque » et « Valse Hésitation ». Mais je sens que mon goût est loin d’être fixé.

Et puis la horde bronzée revient. Place au rock et aux sons synthétiques des Nintendo de Charlotte et de Camille, sons venus d’une autre planète et entrecoupés de cris de joie ou de déception. Les portes remises en place, les pinceaux et autres rouleaux lavés et séchés, il est temps de penser à l’apéro. Un petit Jurançon et ce qui va avec. Et pour le barbecue, saucisses, merguez ou filets de sardines ?

dimanche, juillet 27, 2008

lundi 28 juillet - après Junas, question de mémoire

Après Junas et son festival, Sommières et « l’Estelou », nous sommes allés rejoindre « les petits » à Hossegor. Nous avions emporté avec nous quelques disques : « Mare Nostrum », « Après la pluie », Laloy, « Accordion Tribe », « Virgin and Whore » de Per Arne Glorvigen, et quelques autres dont Philippe de Ezcurra. Mais, entre les jeux joyeux de Charlotte et de Camille, jeux joyeux et bruyants auxquels nous sommes conviés souvent, le travail de carrelage de Sébastien et les informations radiophoniques de Nadja, les disques sont restés cois. Je n’ai pas réussi encore à convaincre toute la famille des beautés de l’accordéon… même avec l’aide militante de Françoise. Parfois, quand toute la maisonnée va à la plage, je me passe l’un de ces disques, je l’écoute très fort, car même en cette fin juillet le quartier est peu habité.

Dimanche, je suis revenu à Pau, pour aller rendre visites à mes vieux parents : ma mère, accablée de handicaps en sa maison de retraite à Nay, mon père seul dans sa villa de Baliros. Seul et malheureux de savoir sa femme privée de sa propre maison. Bref, une histoire plutôt triste, même si elle est fort banale. Je n’ai pas eu le cœur d’écouter un seul des disques que j’avais emportés pour la route. Mais, j’ai repensé au festival de Junas, aux trois concerts auxquels nous avons assistés. Des images me sont revenues à l’esprit, sans que je cherche à les évoquer consciemment, comme par une sorte de libre association d’images ou, plus précisément, de sensations :

- « L’Estelou », sa façade d’ancienne gare, son hall d’entrée, sa véranda et la chambre, blanche dans la pénombre. Et le bruit incessant des cigales.
- Les premières notes de « Mare Nostrum » introduites par Jan Lundgren ; quelques phrases lumineuses de Paolo Fresu ; la présence de Galliano en chemise rouge. Galliano avec ses lunettes.
- Daniel Mille mêlant sa voix à la respiration de son instrument ; Daniel Mille appuyé contre un tabouret haut et parfois comme absent ; au cours du concert de son quintet, le passage brutal du jour à la nuit.
- La présence de Salis, sa folie, sa manière de passer du piano, qu’il a malmené pour en tirer sa musique, à son accordéon, qui à son tour est bien obligé de rendre tout ce qu’il a dans le ventre. La créativité du trio, tels des explorateurs inventant l’Amazone ou quelque contrée encore plus exotique ;

Ce soir, seul dans la maison, alors que la soirée n’en finit plus de finir, j’ai disposé sur mon bureau quelques traces objectives :

- la réservation de l’hôtel, en date du 29 mars
- la facture de l’hôtel
- le programme de « Jazz à Junas »
- la plaquette correspondante
- la pochette des places achetées à la Fnac
- les tickets de caisse de la Fnac, en date du 10 avril
- « Mare Nostrum »


Ces traces, précisément parce qu’elles sont concrètes et objectives, sont pour moi comme un ancrage pour ma mémoire. Ce sont des repères sociaux, qui fixent en quelque sorte l’événement. Mais cette objectivité concrète ne suffit pas. J’ai besoin d’y ajouter d’autres traces : des photographies. Objectives apparemment, puisqu’elles ont gardé trace d’un fragment de la réalité hic et nunc, mais aussi subjectives, car ce fragment, c’est moi qui l’ait choisi, qui ai décidé de le cadrer en un instant donné. Et puis, dans leur subjectivité même, il y a encore des images, qui manifestent à mon esprit la présence de Junas et de ses concerts, bien après leur réalisation. Telle posture de Galliano ou de Fresu, qui est absente des photographies ou répartie entre plusieurs ; telle attitude de Mille, ici et ailleurs, attentif et détaché, comme en apesanteur ; tel comportement affairé de Salis, son look, son agitation contrôlée, ou l’humour qui parcourt l’espace entre les trois membres du PAF Trio. Je pourrais y ajouter, après minuit, notre sortie de Junas dans la file des voitures qui serpente entre les murs des rues étroites du village ou les cinq kilomètres jusqu’à Sommières et l’ouverture du portail de l’hôtel, qui grince.

Je prends conscience de la complémentarité de ces traces : objectives, semi-subjectives, personnelles ou intimes. Ce sont elles qui constituent ma mémoire de cet événement, qui attestent pour moi-même que je l’ai vécu à ma façon. A ma guise dirait le philosophe. Ces deux formes de mémoire, objective ou sociale d’une part, semi-subjective ou si j’ose dire d’une objectivité subjectivée, appropriée à moi-même, constituent le socle de cette mémoire faite d’images hyper-personnelles, que j’appellerais, si j’osais, incorporée, en ce sens qu’à proprement parler elles font corps avec moi. Ce sont des images que l’on ne peut anticiper, mais que l’on peut saisir au bon moment en pratiquant une attitude d’attention flottante : je ne sais pas ce qui va se produire de significatif, mais il va se produire, forcément, quelque chose de significatif et donc je dois y être prêt. Il y a du chat là-dedans : il ne sait pas quand une souris passera à sa portée, mais il sait que forcément cela se produira, c’est pourquoi il ne laisse pas passer l’occasion.

Je prends conscience qu’il y a là les linéaments d’une méthode de mémoire : rassembler des documents descriptifs, faire des photographies comme travail de cadrage et d’appropriation de la réalité du moment, se tenir en posture d’attention flottante pour ne pas laisser échapper, par inattention, le signe qui passe… A suivre et à approfondir, car c’est de plaisir qu’il s’agit finalement. Cultiver le plaisir, ça demande en effet de la méthode. Epicure et Descartes, même combat !




mercredi, juillet 23, 2008

dimanche 27 juillet - jazz à junas : photonotes salis

22h50. Antonello Salis débarque sur scène comme un phénomène venu d'une autre planète. Et en effet il arrive bien d'ailleurs, de son monde. Il essaie son accordéon tandis que l'accordeur de piano lui prépare un instrument ad hoc, ce qui n'est certes pas facile.

22h52. Il investit l'espace de la scène pour en faire son espace.

23h32. J'aime bien cette image où l'on voit Salis avec son accordéon et avec ses sacs de plastique dont il tire une musique surprenante et pleine d'une densité mélodique inattendue.


23h33. Le trio... surréaliste. La créativité à son point de fusion. On se demande qui entraine qui dans ce mouvement brownien et foutraque... contrôlé jusqu'au moindre détail.


23h34. Une autre attitude qui me touche, car elle rend bien compte de la posture de Salis. Concentration et puissance. Une sorte de sorcier.




00h22. Salis dans son environnement. J'aime bien.








samedi 26 juillet - jazz à junas : photonotes mille

On peut certainement imaginer de meilleures photographies, mais, je l'avoue, j'ai plaisir à regarder ces sept clichés tels quels avec toutes leurs imperfections techniques. Je trouve en effet qu'ils restituent bien l'ambiance du concert du Daniel Mille Quintet, la position relative des différents musiciens et surtout des attitudes bien caractéristiques de Daniel Mille lui-même. j'aime bien leur pouvoir d'évocation et de mémoire.

19h23. Les barrières n'ouvriront que dans un peu plus d'une heure. Je "vole" cette image de Daniel Mille seul sur scène après avoir peaufiné les derniers réglages.

21h14. Début du concert.
21h15.


21h24. Une image fidèle du quintet et de la posture de Daniel Mille.


21h25.




21h28.



22h08. La nuit est tombée brutalement. C'est un autre concert, c'est aussi le même. Le même et un autre à la fois. Daniel Mille doit finir sa prestation car, comme il le dit lui-même, un autre concert est à suivre, mais à partir du moment où il a annoncé un dernier morceau, on dirait qu'il ne veut pas se résoudre à quitter la scène. Comme une urgence, comme une nécessité, comme une impossibilité de rompre les liens qui viennent d'être noués avec le public.








vendredi 25 juillet - jazz à junas : photonotes galliano

18h52. Les barrières ne seront ouvertes qu'à 20h30. Nous avons le temps de manger au restaurant en plein air : daube de toro et vin rosé de Sommières. On entend, au loin, des airs connus et surtout un son inimitable. J'ai l'impression de voler cette photographie de Galliano content et détendu.
23h16. Je trouve que cette image restitue bien la géomètrie du trio. La géomètrie et la tonalité.

23h27. Fresu, pieds nus. Je ne sais pourquoi, mais sa posture me suggère l'idée de "la position de l'oeuf" d'où émerge sa trompette.


23h51. Autre photographie qui restitue bien le jeu entre les trois musiciens. L'espace entre eux est important. Ils l'emplissent sans difficulté.


23h52. Galliano tel qu'en lui-même... Les lunettes renforcent le sentiment de concentration.



00h36. Je note qu'il a mis sa chemise rouge... Et toujours debout. L'instrument et l'homme comme un seul être.









jeudi 24 juillet - jazz à junas : photonotes l'estelou

12h50. "L'Estelou" est un lieu magique. Calme et simplicité. Harmonie des couleurs chaudes et du blanc. Des aquarelles de musiciens aux murs. Des lithographies de Daniel Humair sur les meubles. Une vitrine de vins de Sommières. De bonnes odeurs d'herbes de Provence et, tout autour, le bruit des cigales qui saturent l'air sec et brûlant.
14h42. La véranda à l'arrière de l'hôtel et les plates-bandes sur le trajet des anciennes voies de chemin de fer.
17h08. Autour de la piscine, quelques clients de l'hôtel, parmi lesquels des musiciens du festival avant leur départ pour Junas et les derniers réglages à finir avant 19h30.

17h16. Les reflets de la véranda me fascinent. La lumière se répercute en échos multiples et je finis par ne plus savoir si je photographie des objets réels ou leur reflet ou le reflet de leur reflet. La réalité comme un jeu de miroirs en abîme.



17h31. Les frondaisons des arbres de la colline d'en face dans les vitres de la véranda. Le bruit fait par les cigales est assourdissant.



17h32. Mes pieds en éventail. Autoportrait en pieds...




Les plaisirs d'un festival ou d'un concert sont inséparables de l'environnement. "L'Estelou" nous met dans les meilleures dispositions d'esprit, d'autant plus que durant tout notre séjour nous croiserons sans cesse des musiciens et que nous aurons le plaisir d'échanger quelques mots avec plusieurs d'entre eux. Des mots sans importance bien sûr, trois banalités sur le temps, sur le fait que nous venons de Pau, que beaucoup situent mal géographiquement, sur la distance de notre parcours (460 kilomètres aller... autant au retour), qui les étonne, sur tel ou tel de leurs disques ou de leurs concerts auxquels nous avons assisté. Conversations ordinaires, plaisirs simples d'une conversation sans importance...




mardi, juillet 22, 2008

mercredi 23 juillet - jazz à junas : chronophotonotes

Avant Junas, apéritif sur la place du Capitole. On commence à découvrir les trois disques qui nous attendaient à la Fnac : duo diatonique / chromatique ; trio diatoniques / percussions ; Piazzolla, Teatro Regina, Edicion critica...

"L'Estelou" (l'étoile) à Sommières. L'ancienne gare comme une invitation au voyage. Un ailleurs nous attend plein de la présence des musiciens.

A l'arrière, une véranda propice à la rêverie. Magie des reflets : encore un autoportrait sur fond de piscine.

Le site du festival : les carrières de Junas. Grandiose. Aride et impressionnant. Acoustique de la pierre.



Trio "Mare Nostrum". L'équilibre. Un art classique : maximum d'effets avec un minimum de moyens. Des thèmes qui s'emboitent comme un puzzle magique. Le piano de Lundgren, la trompette de fresu, l'accordéon de Galliano... Comment dire ce qui se passe dans la nuit de Junas. Même les cigales en restent sans voix.



Promenade à vélo entre Sommières et Junas. Un pot pour se redonner des forces pour le retour sous le soleil de midi. Rencontre avec l'accordeur de piano du festival. Un portrait comme un remerciement pour son travail.




"Aux délices du Liban". Paolo Fresu comme voisin de table. Il nous donne un autographe avec simplicité et gentillesse.


A 21 heures, il fait encore jour. Daniel Mille et son quintet commencent leur concert dans la lumière déclinante. La nuit tombe vite et pour ainsi dire brutalement. Ce changement de couleur interfère avec les compositions du quintet. Mille, assis ou plus exactement appuyé contre un tabouret, propose et tisse des thèmes dont s'emparent ses collègues.

Le Trio PAF, c'est une folie contrôlée, une expérimentation qui retombe toujours sur ses pieds. Un voyage où la virtuosité des acteurs n'est jamais gratuite. Une histoire, un discours que la pleine nuit, noire, rehausse et exacerbe. Salis et son accordéon, difficile de les oublier. Présence du délire créatif.



A propos de noir, les peintures de Soulages, c'est quelque chose : poésie de la géométrie, de l'espace quasi uniforme, "quasi" étant justement l'essentiel, perfection des accrochages. Une peinture pur méditer. Pas d'anecdotes, pas d'imitation. Simplement des surfaces noires striées de diverses manières.


Place de la Comédie. Le soleil lourd frappe tout ce qui bouge. Tout autour de la place, des parasols sophistiqués abritent les gens qui mangent en projetant régulièrement au-dessus de leurs têtes une brume bienfaisante.

Une brasserie à Saint-Gaudens. encore une image à reflets. Dedans / dehors. Une autre réalité.













mardi 22 juillet - jazz à junas

« Jazz à Junas, 16-19 juillet : le Languedoc rencontre la Sardaigne ». 15 ème édition ! Nous avons retenu deux soirées sur notre agenda, les 17 et 18, pour cause - évidemment ! - de présence d’accordéons. Le premier soir, concert de « Mare Nostrum » avec Galliano, Lundgren et Fresu. Le second soir, un premier concert donné à 21 heures par Daniel Mille Quintet, suivi d’un autre donné par PAF Trio : Paolo Fresu, Antonello Salis et Furio Di Castri.

Dans un premier temps, je rassemble quelques repères chronologiques, ce qui va me permettre ensuite de puiser parmi nos photonotes pour fixer quelques moments privilégiés et cultiver les plaisirs éprouvés durant ces deux jours et autour de ces deux jours. Double bonheur : celui de « prendre des photographies sur le vif » ; celui, plus tard, d’en choisir quelques unes comme traces, comme indices, et pour ce faire de les regarder ensemble encore et encore pour en extraire tous les signes qu’elles recèlent, signes manifestes, qui sautent aux yeux, ou latents, qui ne se dévoilent qu’après une nième lecture.

Le 15, après-midi, nous rejoignons Toulouse, où nous profitons de la maison des « petits » actuellement à Hossegor. Durant le parcours, nous écoutons « Histoires de Jo », un hommage que je trouve magnifique à Jo Privat. Ce sera le seul disque que nous écouterons en voiture au cours de notre voyage, car la circulation, très dense, style rodéo, surtout avec les camions qui se doublent entre eux, nous empêche d’y prendre le moindre plaisir. Nous arrosons les plantes et la pelouse puis, en fin d’après-midi, l’envie nous prend d’aller faire un tour à la Fnac… à tout hasard. Heureuse idée. Sans avoir besoin d’entreprendre une recherche, nous tombons littéralement sur trois disques :

- « Tref, accordéon diatonique », Wim Claeys, Didier Laloy, Bruno Le Tron et Frédéric Malempre aux percussions.
- « Cryptonique », Fabian Beghin et Didier Laloy
- « Piazzolla – Teatro Regina, Astor Piazzolla y su quinteto » [Edicion critica], disque que je cherchais vainement depuis que j’en avais lu une excellente critique par William Sabatier dans un numéro de la revue « Accordéon & accordéonistes ».

Avant de rentrer à la maison, nous prenons l’apéritif sur la place du Capitole. Le temps est délicieux. Nous déchirons les enveloppes des trois disques pour commencer à les apprivoiser ou à nous les approprier. Ce moment d’attente de l’écoute est délicieux, comme le temps.

Le 16, circulation hyperdense, souvent sur trois voies, entre Toulouse et Montpellier. Peu après midi, arrivée à Sommières où nous avons retenu une chambre à l’hôtel « L’Estelou ». Sommières est à cinq kilomètres de Junas ; nous aimons la ville ; l’hôtel est magique. A double titre. D’une part, en tant que bâtiment : c’est l’ancienne gare de Sommières, rénovée de manière magnifique. D’autre part, en tant que lieu où logent de nombreux musiciens. C’est ainsi que nous croiserons, au petit matin ou en pleine nuit, dans le hall d’entrée, sur la terrasse au petit déjeuner ou au bord de la piscine, Richard Galliano, Jan Lundgren, Daniel Mille et les quatre autres membres du quintet, et, éclatant comme un perroquet, dès le matin, Antonello Salis. Manque Paolo Fresu, que nous croiserons le lendemain « Aux délices du Liban », à l’heure du déjeuner. Paolo en famille avec sa femme et Andrea, cinq mois.

En milieu d’après-midi, quand le soleil cogne un maximum, nous allons repérer les lieux : les anciennes carrières de Junas.

En soirée, deux concerts :

- Caïtos Quintet & Hautbois Languedociens : un octet qui transmue des airs languedociens traditionnels jusqu’à une bourrée en créations de jazz.
- « Mare Nostrum ». Le trio nous frappe par son homogénéité dans les capacités créatrices de chacun de ses membres. De morceau en morceau, un univers se construit avec, comme cet hiver à la salle Gaveau, en rappel magnifique, « Que reste-t-il de nos amours ? ». Il faudrait tout citer. Pour l’instant, nous nous rappelons « Mare Nostrum », « Chat Pitre », « Valzer del Ritorno », « Ma mère l’Oye » et quelques autres thèmes fragiles et obstinés dans la fraicheur de la nuit tombante.

Le 17, nous louons des vélos à l’hôtel pour rejoindre Junas par la voie tracée sur l’ancienne voie de chemin de fer. Une montée en pente douce. Un pot sur la terrasse d’un bistrot du village. Le patron nous fait visiter sa cave où se produisent des musiciens venus de Paris qu’il a connus autrefois dans la capitale. Il est très fier de ses concerts sous les voutes. Nous échangeons quelques mots avec l’accordeur de piano. Comme nous l’avons reconnu, je lui demande l’autorisation de le photographier. Il est étonné de ma démarche, mais finalement plutôt flatté.

Déjeuner à Sommières où nous sommes voisins de table de Fresu. Il accepte de nous donner un autographe, mais nous ne voulons pas le déranger. Rita Marcotulli, qui partage le repas avec lui, nous donne aussi un autographe.

Le soir, deux concerts :

- d’abord, Daniel Mille Quintet, avec Alfio Origlio, piano, Julien Alour, bugle, Pascal Rey, batterie et Jérôme Regard, contrebasse. C’est avec plaisir que le lendemain matin nous prendrons le petit déjeuner en discutant avec Julien Alour, qui aurait bien piqué une tête dans la piscine si des obligations ne l’avaient obligé à partir rapidement, et que nous échangerons quelques mots avec Daniel Mille au sujet des thés et des confitures proposés au buffet. Un concert délicat… je veux dire construit sur un certain nombre de thèmes pleins de finesse et de délicatesse et où Daniel Mille sait encourager la créativité de ses collègues.
- en seconde partie, PAF Trio. Un feu d’artifice musical. Sans cesse dans la prise de risques. Ne parlons pas de Fresu, ni de Di Castri, prodigieux de maitrise, parlons un peu de Salis : un expérimentateur (il faut le voir torturer le piano ou sortir une à une de son sac à dos des poches de plastique ou des feuilles de papier qu’il manipule très musicalement contre les micros), mais plus que tout un mélodiste fou… d’une folie très contrôlée. On est au-delà du free jazz. En tout cas, son jeu à l’accordéon piano est d’une puissance rabelaisienne. On s’en remet difficilement, comme après plusieurs tours de manèges dont on sort étourdi de vertige.

Le 18, nous quittons Sommières et « L’Estelou » pour aller visiter le musée Fabre à Montpellier :

- une exposition temporaire, d’une richesse extraordinaire, sur Courbet.
- une exposition permanente dédiée à Soulages. Soulages, peintre du noir. Des œuvres immenses, noires, des salles immenses, blanches, construites spécialement pour recevoir la donation du peintre. On reste sans voix devant quelque chose d’aussi beau de puissance. On pourrait croire que « noir, c’est noir », en fait le noir change sans cesse suivant la position du spectateur, suivant le mouvement du soleil et la luminosité, suivant les déplacements du public. Une œuvre certes austères, mais propice à la méditation. Une œuvre dans laquelle, littéralement, on peut s’immerger.

Nous déjeunons place de la Comédie. Une chaleur lourde, mais les parasols diffusent une brume bienfaisante. Moules au menu. En fin d’après-midi, retour à Toulouse. Circulation de style rodéo. Dès notre arrivée chez les « petits », nous arrosons les fleurs et la pelouse.

Le 19, retour à Pau. La circulation est plus fluide, mais encore dense. Les Pyrénées sur notre gauche sont magnifiques. Du coup, nous décidons de sortir de l’autoroute à Saint-Gaudens pour déjeuner dans une brasserie où nous nous arrêtions au temps de la nationale. Repas simple, mais agréable. Nous sommes les seuls clients. Comme rien ne nous presse, nous faisons la dernière partie du retour par la nationale. Circulation quasi nulle. Traversée de villages endormis depuis leur contournement par l’autoroute. La route de piémont serpente à travers des prairies grasses et des bois touffus. Les plus hauts sommets sont encore enneigés. Nous nous extasions devant la variété infinie de la couleur bleue des montagnes. On croirait voir des aquarelles. Les lignes et les formes du paysage ont pour ainsi dire disparu ; ne restent que des dégradés de bleu, du quasi noir au gris clair. Glissement des sensations. Frémissement lumineux.

En soirée, courses alimentaires à l’hypermarché. Le quotidien nous rappelle à l’ordre.

Mais déjà a commencé notre travail de rumination et d’assimilation de notre « Jazz à Junas ». Comme support, le programme et les photographies que nous avons prises… Déjà je me réjouis à l’idée de les voir et de les revoir pour les trier et en choisir quelques unes. En choisir d’abord en fonction de leur signification chronologique, ensuite en fonction de leur je-ne-sais-quoi expressif… Un je-ne-sais-quoi par lequel certaines me font signe.

dimanche, juillet 13, 2008

jeudi 17 juillet - virgin and whore

Samedi, Françoise et "les petits" étaient à Hossegor, j'étais seul à Pau. En fin d'après-midi, je suis allé chercher au "Parvis", l'espace culturel de l'hypermarché, une carte de Montpellier. Nous avons en effet, Françoise et moi, le projet d'aller écouter Galliano puis Mille au festival de Junas, les 16 et 17 de ce mois, et d'aller voir l'exposition permanente des peintures de Soulages au musée Fabre de Montpellier le 18. Une fois dans l'espace culturel, évidemment j'ai cherché un disque d'accordéon. Vainement, pendant plus d'une heure. Mais je suis obstiné. J'ai fini, à tout hasard, par parcourir systématiquement le présentoir dédié aux disques classiques quelque peu marginaux ou, si l'on veut, difficiles à classer. Et, là, tout à coup, une couverture me saute aux yeux...

- "Virgin and Whore, Bach and Piazzola", Per Arne Glorvigen, bandonéon, Sveinung Lillebjerka, violin, Simax Classics, 2008.

Le site web de Simax : http://www.simax.no/artikkel.php?id=1394

Au dos du disque, on peut lire ceci : "The strange journey of the bandoneon - from the churches of germany to the brothels of Argentina...". Quant au titre, il se traduit par "Vierge et putain, des églises allemandes aux bordels argentins".

C'est un beau disque. Duo, bandonéon et violon, avec contrebasse sur les titres 8-11.

Le programme est composé par alternance de Bach et de Piazzola : 1-2, Bach, prélude et improvisation ; 3-6, Piazzola, l'histoire du tango ; 7, Bach, adagio ; 8-11, Piazzola : quatre tangos ; 12, Bach, fugue. Parmi les interprétations de Piazzola, je retiens particulièrement "Escualo" et "Romance del Diablo". Quant aux interprétations de Bach, le bandonéon sonne comme un orgue.

Une fois de plus je vérifie que le hasard est un bon guide, à ceci près qu'il n'existe pas, ce que je vérifie encore, s'il en était besoin, à travers cet événement.

En tout cas, c'est clair, le norvégien a l'esprit tango ; comme il est tout aussi clair que Piazzola est de la même famille que Bach quant à l'écriture.

Deux pages du site de Glorvigen :

http://www.perarne.net/index.php?action=audio

http://www.perarne.net/bio.php?action=fr



vendredi, juillet 11, 2008

mercredi 16 juillet - accordion tribe

Pour accompagner ma rédaction des pages du 10 juillet à ce jour, j'écoute en boucle le dernier disque que j'ai trouvé chez virgin à Toulouse :

- "Accordion Tribe, Sea of Reeds", 2002, Intuition.

Cinq accordéonistes. Suivant les morceaux, ils sont deux ou trois, parfois plus. Les compositions sont de chacun d'entre eux. C'est une musique magnifique, puissante, chaleureuse, créative même si ses ancrages traditionnels sont patents. J'ai l'impression d'être immergé dans des vagues sonores, amples et acides... je pense à Klucevsek et à Kalaniemi.

Mais j'ai plaisir aussi maintenant à recopier le descriptif de "The Tribe", qui est déjà en tant que tel un déclencheur de rêverie :

- Bratko Bibic, Hohner Tango piano accordion
- Lars Hollmer, Zerosette piano accordion, Suzuki melodica
- Maria Kalaniemi, Lasse Pihlajama Timangi standard 5-row button accordion and Lasse Pihlajama free-bass 5 row button accordion
- Guy Klucevsek, Titano Piano Bayan with 45-key piano keyboard and convector bass (120 bass converts-to 4-row chromatic free bass)
- Otto Lechner, Hohner Lucia piano accordion

mardi 15 juillet - l'accordéon d'emmaüs

Mercredi dernier, de retour à Pau, je suis donc allé porter quelques objets au dépôt de la communauté d'Emmaüs. Je ne pouvais quitter ce lieu improbable sans aller faire un tour dans le hangar où toutes sortes de choses, comme ramassées sur des plages désertes, sont alignées en attente d'acheteurs. Il y a en effet toujours au moins un accordéon parmi les autres instruments de musique déglingués.

Mon regard est immédiatement attiré par un accordéon dans sa boite. Le prix est affiché : "300 euros". Je n'ai aucune idée de sa valeur et encore moins de la qualité de cet instrument. Il suffit qu'il me fasse rêver. La question n'est pas de savoir si c'est ou non une bonne affaire.


Mon goût pour l'accordéon, qu'il s'agisse de l'instrument de musique ou de l'objet surréaliste, a toujours intrigué et amusé Michel. Moi-même, je l'avoue, j'en suis intrigué et amusé. Sans doute un intérêt pour sa marginalité, son côté non conformiste, et pour cette sorte de souffle vital qui l'anime au point de le faire ressembler au plus au point à un être vivant.

lundi 14 juillet - crématorium

Le crématorium de Toulouse est un lieu quasi conceptuel. On croirait que ce sont des concepteurs du Bauhaus qui l'ont imaginé. Des murs nus. Des lumières à la fois tamisées et brutales. Des sons étouffés. Chuchotements. Et la machine qui fait son office. Monde de feu et de glace.

Je me suis isolé quelques minutes. J'hésite à prendre deux ou trois clichés. Je ne sais quelle retenue m'empêche de photographier ce lieu. Finalement, la géométrie de cet espace, de ce monde intermédiaire entre les vivants et les morts, de ce lieu de passage, cette fonctionnalité géomètrique emporte ma décision.

En sortant pour aller retrouver les amis et la famille de Michel mon attention est attirée par une pancarte. Comment résister au désir d'en garder l'image. L'humour des croquemorts existe. Je l'ai rencontré.