mercredi, avril 30, 2008

jeudi 1er mai - entre deux pôles

Le texte ci-dessous a été écrit ce mercredi 30 avril, veille du 1er mai et surtout du début du festival de Trentels. Au moment où il s’affiche, nous sommes en route pour ce village du Lot-et-Garonne : Trio Miyazaki avec Bruno Maurice, Trio Jean-François Baez, Ponty Bone, Mériadec Gouriou, Danças Occultas… Excusez du peu.

Expérience étrange et pleine d’enseignements : j’écoute en alternance des morceaux de l’album de Pascal Contet, « Electrosolo » et de celui d’Aimable, « Ah ! Le petit vin blanc ». Je m’arrête en particulier sur « Valse à trois temps », titre 3 du premier, et sur « Indifférence », titre 10 du second.

J’ai choisi d’écouter ces deux accordéonistes, car j’ai quelques difficultés à les apprécier, même si je sais bien que l’un et l’autre sont reconnus au plan national et international. Quelque chose, un je-ne-sais-quoi immédiatement perceptible à l’audition, me dit que cette reconnaissance ne vient certainement pas des mêmes personnes, ni des mêmes instances. Savoir qu’ils sont appréciés est une chose, les apprécier moi-même en est une autre. En l’occurrence, ce que je sais ne modifie en rien mes impressions premières.

En fait, l’écoute de Pascal Contet me laisse froid. J’ai l’impression d’un instrumentiste tellement étonné par ce qu’il peut tirer de son instrument, que toute son activité s’épuise à essayer d’en faire le tour. J’écoute une virtuosité un peu vide. Parfois, j’ai l’impression d’entendre le klaxon d’un énorme camion et cette image ne suffit pas à satisfaire mon imaginaire. Elle le stériliserait plutôt. Je retrouve ce que j’avais noté à propos de « Bouts de souffles » : comme une respiration d’asthmatique. Des bouts de sons surgissent, ici et là, dans un espace vide. Ils apparaissent, se déploient, disparaissent et ainsi de suite… Parfois, j’ai l’impression de ne pas entendre des sons articulés entre eux, mais d’assister à la mise en scène de concepts, d’intentions conceptuelles. Je me demande si ce n’est pas un peu trop intellectuel pour moi. Ou bien il s’agit d’une sorte d’accordéon post-moderne, déjà au-delà de la modernité. Dans ce cas, c’est ma culture qui est insuffisante et qui m’empêche d’accéder à ce qui est dès aujourd’hui l’accordéon de demain.

De même, l’écoute d’Aimable me laisse froid, même si ce n’est pas le même froid que celui que m’inspire Pascal Contet. Mon impression est celle d’un accordéon superficiel, tout en surface, entièrement dans l’apparence. Je tiens « Indifférence » pour un chef-d’œuvre et j’ai le souvenir d’interprétations données par Galliano, par Rivière, par Macias, Lacaille ou encore Amestoy. Chaque fois, c’est la chair de poule. Ici, c’est ce que j’appellerais volontiers de l’accordéon au kilomètre. Certains soirs, certaines pizzerias proposent des pizzas au mètre. S’agit-il encore de pizzas ? Ici, pas de doute, c’est bien de l’accordéon, mais son clinquant dépourvu de toute intériorité me laisse indifférent, sur le seuil. Est-ce un manque de naïveté, de spontanéité, qui m'empêche de l'apprécier ?

En écoutant quasi en même temps Contet et Aimable, je prends conscience qu’ils sont, aujourd’hui, comme les deux pôles de mon goût pour l’accordéon. Ce que j’apprécie se situe entre les deux. C’est un espace déjà assez étendu. La philosophie antique décomposait l’âme en trois instances : la tête, l’intellect ; le cœur, l’affectivité ; le ventre, les pulsions vitales. Un plaisir complet mobilise ces trois instances en une sorte de mixte in-dissociable, in-décomposable et in-analysable. C’est souvent le cas. Mais en l’occurrence, tout se passe, d’où mon insatisfaction, comme si Contet ne touchait en moi que la sphère intellectuelle et Aimable que la sphère pulsionnelle. Entre les deux, les dosages de ce mixte que j’évoquais ci-dessus sont infinis et sources de plaisirs également infinis.

mardi, avril 29, 2008

mercredi 30 avril - abstrait / concret

… lu ces quelques lignes de Kandinsky : « Depuis des siècles, la musique est par excellence l’art qui exprime la vie spirituelle de l’artiste. Ses moyens ne lui servent jamais, en dehors de quelques cas exceptionnels où elle s’est écartée de son véritable esprit, à reproduire la nature, mais à donner une vie propre aux sons musicaux. Pour l’artiste créateur qui veut et doit exprimer son univers intérieur, l’imitation, même réussie, des choses de la nature ne peut être un but en soi. Et il envie l’aisance, la facilité avec laquelle l’art le plus immatériel, la musique, y atteint. On comprend qu’il se tourne vers cet art et qu’il s’efforce, dans le sien, de découvrir des procédés similaires. De là, en peinture, l’actuelle recherche du rythme, de la construction abstraite, mathématique et aussi la valeur qu’on attribue aujourd’hui à la répétition des tons colorés, au dynamisme de la couleur. »

W. Kandinsky, « Du spirituel dans l’art et dans la peinture en particulier ». Paris, Ed. Denoël-Gonthier, 1979, page 76.

En réfléchissant à cette analyse de Kandinsky et en écoutant, disons en arrière-fond, « Histoires de Jo », je suis frappé par sa justesse. En cet instant, par exemple, j’écoute « Flânerie parisienne » de Michèle Buirette, jouée par elle-même et Raouf Wahba à l’accordéon, Patrick Saussois à la guitare, Jean-Claude Béneteau à la contrebasse et Rudy Bonin à la batterie. Cette flânerie parisienne n’a évidemment pas pour but de me donner à voir une flânerie dans les rues de Paris. Il s’agit de donner forme aux sentiments, impressions, sensations, états d’âme éprouvés, ressentis, perçus au cours d’une flânerie de ce type, non de telle ou telle flânerie particulière ou singulière. En ce sens, on peut dire que cette composition est immédiatement un travail d’abstraction, puisqu’à partir d’une expérience vécue – telle flânerie à Paris – elle nous donne à sentir quelque chose de commun et de fondamental en toute flânerie, pas seulement à Paris, ici et maintenant. Il s’agit bien d’abstraction, puisqu’en un sens la composition met en forme une expérience singulière et ipso facto donne forme à toute une catégorie d’expériences du même type. Si j’osais, je dirais qu’il s’agit d’une abstraction concrète. Abstraction, car il s’agit non de reproduire ou d’imiter telle flânerie ; concrète, car elle s’adresse immédiatement à notre sensibilité. On retrouverait la même chose avec la peinture si mal nommée abstraite. La peinture dite abstraite en effet n’a pas pour but de reproduire ou d’imiter des réalités existantes, concrètes, pour en donner une représentation visible par un travail d’analyse et d’abstraction de la perception qu’on en a. Elle a, tout au contraire, pour but de faire exister des objets qui ne ressemblent à rien de connu, mais qui sont là et existent en tant que tels. Comme un arbre n’existe pas par ressemblance avec autre chose. Il existe. Point. En fait, si l’on veut bien y réfléchir deux secondes, on voit bien que la peinture dite abstraite signe en fait, historiquement, l’avènement d’une peinture concrète, qui fait exister des choses perceptibles et qui ne se contente pas de reproduire l’existant.

Quant à la musique, et en ce sens je retrouve la pensée de Kandinsky, c’est bien aussi un art créateur d’abstractions concrètes : tel sentiment, telle impression, émotion, perception particulières est l’occasion qui déclenche un travail de mise en forme (analyse, abstraction) dont le résultat est une composition (objet concret, irréductiblement individuel) qui à son tour est capable de donner forme à nos sentiments, impressions, etc… qui est capable, au sens propre, de nous in-former.

Bon, j’enregistre ces quelques lignes avant de les mettre sur mon blog. Le disque vient de s’arrêter. Je remets en écoute le titre 8, « Souviens-toi » de David Venitucci. Je ferme les yeux tout à ma perception, tout entier attentif à sa présence. Et, ça enchaine sur « Rebelle » de Jo Privat… Une sorte de flânerie, qui me rappelle toutes sortes d'images...

mardi 29 avril - paris jazz corner (8)

Depuis quelques semaines, comme mes étagères où ranger mes cds étaient saturées, j’avais accumulé mes dernières acquisitions sur un coin de mon bureau, puis sur un autre coin et finalement sur la plus grande partie. Il fallait prendre une décision, car certains équilibres devenaient fragiles. Première décision suivie immédiatement d’effet : deux étagères de livres, vestiges de mon travail professionnel, sont entassées dans des caisses destinées à finir chez Emmaüs. Chez Emmaüs et pas à la déchetterie pour la tranquillité de mon âme. Quant à savoir qui sera intéressé par quatre années complètes de la « Revue française de pédagogie », peu me chaut. L’important, c’est d’avoir fait de la place pour mes cds sans domicile fixe. Deuxième décision : ranger les « équilibristes » parmi les « sédentaires » suivant l’ordre alphabétique, que j’ai adopté parce qu’il m’a paru être le plus commode, quoiqu’insatisfaisant. Cependant, avant de procéder à cette opération nécessaire, mais un peu fastidieuse, je m’avise qu’il ne s’agit pas de traiter ces cds comme de simples objets. Les ranger pour avoir la satisfaction de les contempler au garde-à-vous, les uns à côté des autres, ce ne serait pas les traiter convenablement.

C’est ainsi que je me rends compte que j’ai empilé successivement sur mon bureau tous les cds que j’ai commandés à « Paris Jazz Corner » sans jamais les considérer dans leur ensemble. Avant de les mettre à leur place, c’est l’occasion de les rassembler et de les écouter. Je les reprends donc suivant l’ordre d’arrivée, si je puis dire, avec comme règle d’écouter un titre de chaque. Titre choisi au hasard ou d’après tel ou tel souvenir qui me vient à l’esprit. J’attends de cette méthode des rapprochements, des comparaisons, des discontinuités, des surprises et des plaisirs inattendus.

Premier colis :
- « Ballad for Anne », Frank Marocco Groups. Un premier titre d’une suavité délicieuse ; une sorte de jazz latino : “Spain” de Chick Corea.
- « Histoires de Jo », titre 1, « Balajo » avec Marcel Azzola à l’accordéon. J’aurais pu choisir bien d’autres morceaux, mais il faut s’en tenir au principe.

Deuxième colis :
- « Reed Song », Will Holshouser Trio. Titre 5, “Inside The Park”. Accordéon, trompette, contrebasse pour une musique qui évoque Fellini, Kurt Weill et Nino Rota revus par des new-yorkais un peu froids.
- « Hradcany », avec David Venitucci à l’accordéon. Trompette, saxophones et flûte, accordéon pour un orient imaginaire. Les bords du Bosphore fantasmés. Titre 4, « Salman ».
- « Arthur Street », Angelo Di Pippo. Je retiens “Wave” d’Antonio Carlos Jobim.

Troisième colis :
- « Yamandu + Dominguinhos ». Guitare et accordéon. Titre 3 : « Joao e Maria ». Au cœur du Brésil. Un duo, rien qu’un duo.
- « Sabido », Luis Gonzaga. Des enregistrements des années 40. Titre 12 : « Saudade de San Joao del Rei ».

Quatrième colis :
- « Bouts de souffles », Andy Emler et Pascal Contet. Toujours autant de difficulté à apprécier. Toujours cette impression d’un accordéon contraint et quasi asthmatique. Quelque chose m’échappe. Encore un effort. J’ai une affection particulière pour ce disque, car il ne me touche pas et je ne le comprends pas, ce qui signifie que j’ai encore à apprendre et à découvrir des espaces qui me sont encore inaccessibles.
- « Swinguette », Marc Leseyeux Quartet. Titre 9, très gallianesque, « Tango sur Seine ».

Cinquième colis :
- « Sivuca Symphonico », Sivuca et son accordéon face à plus de soixante-dix musiciens de l’orchestre symphonique de Recife. Et encore le titre 3, « Joao e Maria ». Comme un accordéon au milieu d’une forêt tropicale.

Sixième colis :
- « Moving Landscapes », Lelo Nika. Jazz et Bayan. Titre 10 : « R.A.P. »

Septième colis :
- « Clifton Chenier, 60 minutes with the King of Zydeco ». Je retiens le titre 2 : “Louisiana Blues”. Acidité garantie.
- « Hollywood-Paris ». « La Pugnada », duo d’Ildo Patriarca et Raul Barboza. Magnifique.

Ce parcours m’a conduit à travers différents territoires. J’ai des images sonores et visuelles plein la tête. J’ai déjà envie de recommencer d’autres explorations parallèles. C’était une bonne idée !

samedi, avril 26, 2008

lundi 28 avril - perception, mémoire, culture

J’écoute un morceau de « Sivuca Sinfonico », le titre 3, « Joao e Maria ». L’accordéon de Sivuca s’inscrit, lumineux, devant la masse houleuse de l’orchestre symphonique de Recife, soixante-quinze exécutants. Il y a là une phrase musicale qui m’enchante. La composition est de Sivuca et Chico Buarque. Peu de temps après, alors que j’écoute un disque de Yamandu et Dominguinhos (« Yamandu + Dominguinhos »), une phrase musicale attire mon attention. Il s’agit bien de « Joao e Maria ». Déjà un phénomène m’intrigue : je reconnais cette phrase musicale et pourtant elle ne sonne pas pareil que dans le premier cas. Qu’est-ce que je reconnais comme pareil malgré les différences ? En tout cas, ce n’est pas une reconnaissance intellectuelle, encore moins conceptuelle. En première approche, ce que je reconnais comme pareil, ce serait quelque chose comme une structure implicite, mémorisée et reconnue sans aucun travail d’analyse ni d’explicitation, sans mise à plat. Comme une prise de conscience quasi inconsciente.

Il faudra approfondir cette question. Mais déjà une autre, qui en découle, m’intrigue à son tour. Quand j’ai écouté l’interprétation de Yamandu et Dominguinhos, je l’ai comparée immédiatement et spontanément à celle de Sivuca. Cela me donne à penser que ma perception se construit toujours sur un fond, déjà présent, de perceptions mémorisées. Il n’y a pas de perception pure, toute perception est déjà en tant que telle comme un réseau de perceptions reliées aux perceptions immédiatement antérieures, à l’anticipation de perceptions à venir et à une sorte de réservoir de perceptions passées, mémorisées depuis des temps variables. Percevoir implique donc toujours de référer les sensations actuelles à un ensemble de sensations mémorisées ; pas de perception sans mémoire. C’est la mémoire qui précède la perception et la rend possible. De là à penser que plus j’écouterai d’accordéon, mieux je le percevrai, il n’y a qu’un pas. Oui, mais trop de mémoire, trop de références mémorisées, en un mot trop de culture, comporte un risque. Le risque de rapporter ce que l’on perçoit à trop de savoir constitué. Situation difficile à gérer : pour percevoir et donner du sens à ses perceptions, il faut pouvoir les rapporter à un fonds de perceptions mémorisées, mais si ce fonds est trop présent il me conduit à trop cadrer ce que je perçois ici et maintenant, à le banaliser, à l’identifier sans surprises. Je ne perçois plus que ce que je sais.

Faire attention à ce paradoxe : sans mémoire ni culture, les perceptions sont comme un flux ininterrompu et dépourvu de sens, mais inversement trop de mémoire et de culture tend à classer toute perception actuelle et à la dissoudre dans des connaissances constituées. En pratique, comment écouter de l’accordéon pour le plaisir et par conséquent se donner une culture donnant sens à ce que l’on écoute et, en même temps, à l’instant de l’écoute, oublier cette culture pour savoir saisir ce que l’on entend dans son émergence et dans son originalité même ?

Percevoir, c’est comparer. Comparer, c’est déjà conceptualiser. Comment par exemple écouter Galliano, comparer cette écoute à ce que j’ai entendu de lui, comparer son jeu à celui d’autres accordéonistes, et conserver assez d’ingénuité, de liberté de jugement, pour ne pas le réduire à une « perception conceptuelle » ? Je ne sais pas, mais ce que je sais, et c’est sans doute une des dimensions du génie de Galliano, c’est qu’il me surprend toujours et que l’étonnement qu’il suscite en moi est bien la preuve qu’il est irréductible à cette « perception conceptuelle ». En revanche, je pense à d’autres accordéonistes, mais je n’en citerai pas les noms, qui me semblent se répéter, ne plus susciter de surprises et de ce fait tomber immédiatement dans le déjà connu, déjà classé, déjà identifié. Ils sont réductibles à un concept et c’est le plaisir qui fait défaut.

A suivre...

dimanche 27 avril - gilles cuzacq




Gilles Cuzacq joue sur Cavagnolo Odyssée Pro.
190 chemin du Clariot, 40280 Bretagne de Marsan (près de Mont-de-Marsan, Landes)
0558710587 / 0609724495
cuzacqgilles@hotmail.fr

Pourquoi parler ici de Gilles Cuzacq ? D’abord les faits. Vendredi, peu avant 19 heures, alors que je venais de rentrer à la maison - Hossegor, toujours Hossegor… - et que j’hésitais entre une bière et un porto avant de m’abandonner aux charmes du flux télévisuel et du zapping associés, un coup de sonnette me ramène sur terre. Devant le portail, Gilles Cuzacq. Je ne le connaissais pas une minute auparavant, mais il se présente immédiatement et en trois mots m’explique le but de sa visite. Lecteur régulier de mon blog, il a bien perçu dans ma chronique « sine die » quelque chose comme un soupçon de blues du bloggeur. Il regrette, me dit-il, l’interruption momentanée de mon petit travail quotidien d’écoute et d’écriture, d’autant plus que nous partageons les mêmes goûts. Et comme il passait par Pau en rentrant à Mont-de-Marsan, il avait fait un détour pour m’offrir son dernier disque, « Pays d’accordéon ». En toute simplicité, en toute gentillesse. Ma surprise était certes totale, mais je n’étais pas absolument étonné, car j’ai déjà été témoin, parfois destinataire, de tels gestes. Nous ne nous connaissions pas il y a quelques minutes, mais immédiatement « le courant passe ». L’accordéon nous relie tout de suite et j’ai plaisir à l’écouter me parler des titres de son album, comme il a plaisir à me les présenter. « Accordion & digital instruments ». Je sens bien qu’il est fier de sa création et je sens aussi que l’écoute de son cd sera l’occasion de faire repartir le moteur deux temps « écoute / écriture ». C’est l’étincelle que j’attendais. Comme il ne veut pas s’attarder, nous convenons de garder contact.

Dès son départ, je me précipite sur le lecteur de cd. C’est parti.

Je suis d’abord frappé par le son de son instrument. Je suis frappé aussi par ce que j’appelle un sentiment de « ligne claire », je veux dire un discours simple, par opposition à des discours compliqués, tarabiscotés, inutilement chargés. Les titres donnent une idée de l’intention générale : « On samba lance », « Playa del baile », « Muzouke », « Zdarovié », « Mariachi tyrolien », « Accordéon au Plumaçon (les arènes de Mont-de-Marsan », etc… Une diversité, que l’on peut lire dans les titres, qui sonnent comme un tour du monde de l’accordéon, mais aussi une grande unité qui tient au son de Gilles Cuzacq, que j’évoquais un peu plus haut. L'humour et le sérieux ne sont pas incompatibles. Faire avec sérieux, sans se prendre au sérieux.

Tout en écoutant « Pays d’accordéon », je pense, par analogie, à un texte que j’admire beaucoup de Raymond Queneau, « Exercices de style ». Texte qui s’inscrit dans le courant de l’Oulipo – ouvroir de littérature potentielle. Justement, « Pays d’accordéon » pourrait bien relever d’un « Ouaccpo » - ouvroir d’accordéon potentiel – voué à la création de toutes les formes potentielles de l’accordéon. Et je me rends compte, au fil de mon écoute, que je reçois l’accordéon de Gilles Cuzacq sur un double registre : le plaisir immédiat de sa musique, tonique, énergique, construite rigoureusement, et le plaisir second de « voir » comment il développe la suite de ses titres « à la manière de… ». Si j’osais, je parlerais volontiers de plaisir du pastiche et je trouve en effet excitant de saisir comment un même auteur manifeste sa culture dans un exercice « à la manière de… ». Double registre donc, sensible et intellectuel. Plaisir des phrases musicales, plaisir du jeu de l’accordéon, d’une part, plaisir intellectuel devant la résolution d’un problème, d’autre part.

Et puis, en écoutant encore « Pays d’accordéon », des images me viennent spontanément à l’esprit, images associées à un certain art de vivre du sud-ouest : des copains sont autour d’une table, sous une tonnelle qui filtre le soleil ardent ; sur la nappe à carreaux, des assiettes de Samadet, d’apparence d’abord rustique, mais fort raffinées si l’on y prête attention, et dans ces assiettes, de la daube de toro, mitonnée par le boucher des arènes. Avec la daube, quelques pommes vapeur et des cèpes. En toute simplicité. Toujours aussi simplement, on a débouché un Saint Emilion. On le déguste avec recueillement, en silence, sans phrases inutiles. J’allais oublier, juste avant, avec le foie gras, on avait ouvert le repas avec un Sauternes. Mais tout ça, sans en rajouter. Comme si c’était naturel. En toute simplicité. Un bonheur simple.

Voilà ! J’ai parlé de Gilles Cuzacq parce que j’ai été touché par son geste et parce que j’ai eu plaisir à l’écouter et enfin parce que tout ça, ces petits plaisirs, montrent, je devrais dire prouvent, que la gentillesse vaut bien la compétition pour fonder un lien social harmonieux.







mercredi, avril 23, 2008

jeudi 24 avril - robert santiago

Comme je l'ai expliqué ce mardi 21, les circonstances m'ont contraint de suspendre provisoirement la tenue de mon blog, du moins quant à son projet original : 1 jour / 1 page. Bien sûr, je ne renonce pas et je compte bien retrouver très bientôt le plaisir de mettre en mots mes plaisirs de l'écoute de l'accordéon sous toutes ses formes : disques, concerts, etc...

Mais, ce soir, j'ai reçu un courriel de Robert Santiago, dont j'avais dit en son temps toute l'admiration que je portais à son projet, à son travail et à son oeuvre. Ce sont "ses dates" pour 2008 et c'est avec le plus grand plaisir que je les répercute ici. Il ne faut pas s'y tromper, ce tipica là est d'une grande profondeur. Je tiens par exemple "La gran noticia - cancion à mi mama", titre 15 de son dernier album, "Panamericana", pour une composition et une interprétation magnifiques.



*Dates Robert Santiago au 23 avril 2008*

- Samedi 26 avril 2008 à Coullons (45)Concert privé Robert Santiago y su Tipica. Lieu dit "Les Régents". Organisé par l'Association Cirque Théâtre (A.C.T.).Rens. 02 38 29 23 49.-

- Jeudi 1er mai 2008 à Pierrefitte sur Sauldre (41). "Festillésime 41"Concert Robert Santiagoy Su Tipica. Concert d'ouverture du festival "Les Musicalies en Sologne" organisé par l'UCPS.Rens. et rés. 02 54 88 71 09 (UCPS).

- Samedi 02 et dimanche matin 04 mai 2008 à Pierrefitte sur Sauldre (41)Stage d'accordéon latino avec Robert Santiago - percussions avec Eric L'Heudé et chant avec Sandra Vargas dans le cadre du festival "Les Musicalies en Sologne" organisé par l'UCPS.Rens. et rés. 02 54 88 71 09 (UCPS).

- Samedi 17 mai 2008 à Rennes (35000)Concert Robert Santiago y Su Tipica. Dans la cadre de "La Nuit des Musées", Ecomusée du Pays de Rennes - La Bintinais - Route de Châtillon-sur-seiche, 35200Rennes à 20h30Rens. 02 54 88 71 09.Rens. 02 38 29 23 49.

- Du vendredi 30 mai au 22 juin 2008 à Meung sur Loire (45130)Exposition " Accordéons… " de Robert Santiago, Médiathèque municipale.Rens. : 02 38 46 94 94.

- Vendredi 30 mai 2008 à Meung sur Loire (45130)Vernissage de l'exposition "Accordéons..." avec R. Santiago vers 18h00 et ouverture de Festicolor 2008Rens. : 02 38 46 94 94.

- Samedi 31 mai 2008 à Meung sur Loire (45130)Conférence '' L’Accordéon et son Histoire " par R. Santiago à La Fabrique à 15h00. Entrée libre.Rens. : 02 38 46 94 94.

- Mercredi 04 juin 2008 à Meung sur Loire (45130)Animations jeune public à la médiathèque.Rens. : 02 38 46 94 94.

- Vendredi 27 juin 2008 au Mans (72000)Concert privé Robert Santiago y su Tipica.

- Dimanche 29 juin 2008 à Olivet (45160)Concert en duo avec François Lalange (Guitare Basse électroacoustique) et Robert Santiago (accordéons, cuatro, jâse au pied et chant.) Dans le cadre du "Déjeuner sur l'herbe" et du Pique Nique de la Caravane de Loire, à partir de 14h00 et jusqu'à 18h00.

- Mardi 08 juillet 2008 à Issoudun (36100)Concert Robert Santiago y Su Tipica. Dans la cadre des "Mardis de l'Eté ", cour du musée de l'Hospice Saint-Roch à 20h30.Rens. 02 54 21 66 13.

- Dimanche 10 août 2008 à Penne d'Agenais (47140)Concert Robert Santiago y Su Tipica. Dans la cadre du "Festival Convivencia" à 20h30.Rens. 05 62 19 08 08.

- Du 18 novembre au 06 décembre 2008 à Lagny sur Marne (77400)Exposition " Accordéons… " de Robert Santiago, Médiathèque Gérard-Billy , 10 allée Vieille et Gentil,Rens. : 01.60.07.62.40

- Samedi 22 novembre 2008 à Lagny sur Marne (77400)Vernissage de l'exposition "Accordéons..." avec R. Santiago vers 18h00 Médiathèque Gérard-Billy , 10 allée Vieille et Gentil,Rens. : 01.60.07.62.40

- Samedi 06 décembre 2008 à Lagny sur Marne (77400)Conférence L'' Accordéon et son Histoire " par R. Santiago, Médiathèque Gérard-Billy , 10 allée Vieille et Gentil, à 15h00. Entrée libre.Rens. : 01.60.07.62.40

lundi, avril 21, 2008

mardi 22 avril - sine die

Depuis vendredi, je n’ai pas réussi à trouver du temps pour rédiger ma page quotidienne sur mes petits bonheurs d’accordéon. Il faut dire que ce travail d’écriture, lui-même assez coûteux en temps, implique un temps d’écoute, fort variable en durée, mais non négligeable. C’est pourquoi, au fil des jours, il m’est devenu de plus en plus difficile de mener à bien mon projet. Au départ, début décembre 2005, j’avais eu cette intention, très volontariste, de garder trace, jour après jour, de ces petits bonheurs. C’était une façon de me donner un espace et un temps, comme une parenthèse, consacré à l’accordéon, à l’écoute de l’accordéon, jusqu’au bandonéon. J’avais cru, étant à la retraite, que ce projet serait possible à réaliser, sans en ignorer les difficultés. En fait, j’ai dû me rendre à l’évidence, le rythme quotidien n’est pas tenable, du moins pour moi : un jour, ce sont des obligations qui occupent le temps, un autre jour ce sont des soucis qui occupent l’esprit et empêchent une posture d’écoute sereine, un autre jour encore ce sont les circonstances qui perturbent ce moment de temps en suspens, etc…

Ces derniers jours, j’ai réussi, souvent tard le soir, trop tard après une journée pleine à ras-bord de « choses à faire en priorité », à me donner quelques minutes d’écoute. Mais il ne s’agit pas d’écouter pour écouter. Il n’est d’écoute valable que si elle est source de plaisir. Il s’agit d’épicurisme, pas de stakhanovisme. J’ai écouté à plusieurs reprises Ildo Patriarca. A chaque nouvelle écoute, j’ai éprouvé de nouvelles sensations, plus profondes, plus intimes et il me semble que j’ai saisi quelque chose de son style, de sa manière d’interpréter les grandes figures du tango sur son Zero Sette, qui sonne comme un orchestre. Mais, les soirs passant sans que je trouve le temps de garder trace écrite de ces sensations, je prends acte qu’elles resteront vécues, mais non fixées avec mes mots.

Depuis vendredi donc, je n’ai pas réussi à trouver du temps pour rédiger ma page quotidienne et donner forme ainsi aux plaisirs que j'ai éprouvés à l’écoute d’accordéons. Je prends acte que ce n’est pas dû à quelque cause accidentelle, mais bien à des obstacles et résistances de plus en plus difficiles à surmonter. Je ne sais pas si ce blog s’arrête ici. On verra bien. Pour l’instant, et tout en gardant espoir de pouvoir de temps en temps le continuer, je le suspends sine die. A l’occasion d’un concert ou de la découverte de tel ou tel album, j’essaierai de reprendre mon travail d’écriture. Si les circonstances m’y autorisent…

jeudi, avril 17, 2008

vendredi 18 avril - guariguettes

« Les petits » et Françoise sont partis en milieu de matinée. Ils vont passer la journée à Hossegor. Sébastien et Nadja installent les éléments de la cuisine. Françoise lave les planchers, qui ont subi les outrages des plâtriers, avant de les poncer. Comme j’avais quelques problèmes à régler, je suis resté à Pau. Affaires faites avant midi. Comme il pleut et qu’il m’est impossible de tondre la pelouse, l’après-midi m’appartient. Un sandwich, un verre de vin, quelques fruits et du café. Je m’installe au bureau, les pieds sur la table… et tournent les galettes. Seul dans la maison, téléphone débranché pour avoir l’assurance de n’être pas dérangé en pleine écoute, accompagné par le bruissement du vent dans les branches des bouleaux et par les sifflements stridents de quelques oiseaux, j’ai choisi quatre disques. Je les écoute de manière un peu aléatoire, deux morceaux de l’un, trois d’un autre, deux ou trois d’un autre encore. Pas plus, histoire de me lever, de me dégourdir les jambes et d’éviter l’ankylose.

Au fur et à mesure de cette écoute, je finis, en fermant les yeux, par ne plus avoir nettement conscience des objets familiers qui m’environnent et par ne plus situer précisément la source sonore. C’est comme si je flottais dans la musique. Le temps s’écoule, mais les repères chronométriques s’estompent. Je ne regarde pas ma montre et j’ai du mal à situer l’heure. Un temps entre parenthèses.

C’est un vrai bonheur de pouvoir tout à loisir enchainer des titres de ces quatre albums. Petit à petit, certains se détachent, qui sont aujourd’hui mes préférences :

- « Paris Swing », composition de David Rivière in « Swing from Paris », album des « Pommes de ma douche ». plus je l’écoute, plus j’ai le sentiment que David Rivière est vraiment l’un de ceux qui perpétuent le mieux la tradition du swing manouche.
- « Louisiana Blues » de Clifton Chénier in « 60 Minutes with The King of Zydeco », 1986. Clifton Chénier, il est impossible de lui resister. C’est le mélange parfait entre la nonchalance et l’énergie. Voilà, l’énergie nonchalante. Avec ça, un son acide comme un citron vert.
- « Los Mareados » d’Ildo Patriarca in « Hollywood-Paris », 1997. Je suis prêt à parier que Maria Kalaniemi l’a écouté attentivement avant de livrer sa propre version. Le titre de l’album renvoie au fait que le disque a été enregistré en partie à Hollywood, en partie à Paris, près du Panthéon. D’où la citation de Brassens : « C’est une erreur, mais les joueurs d’accordéon, au grand jamais, on ne les met au panthéon ». Dans ce même disque, un duo avec Raul Barboza, « La Pugnalada ». Magnifique. Je serais prêt à parier aussi que ce duo sera diffusé un jour dans le cadre de l’émission de radio BLV consacrée à l’accordéon, le vendredi de 18 à 19h, « Accordéon sans frontières ». En tout cas, il y aurait sa place.
- … et puis, dans le cd intitulé « Silence… on tourne » de Frédéric Daverio, cd Iris Music de 2008, j’ai écouté en continu les dix morceaux proposés sous le titre générique « Musaïque », qui sont disséminés dans l’ensemble de l’album. On les trouve en effet répartis, comme autant de respirations, de la manière suivante : 1 en 7, 2 en 8, 3 en 9, 4 en 15, 5 en 16, 6 en17, 7 en 22, 8 en 23, 9 en 27, 10 en 28. Leur durée va de 0 :19 à 1 :10. Avec un bloc 1 + 2 + 3 = 1 :49 ; un bloc 4 + 5 + 6 = 1 :55 ; un bloc 7 + 8 = 1 :08 ; un bloc 9 + 10 = 1 :44. Des images me sont alors venues à l’esprit : j’ai pensé à Tex Avery et à Monsieur Hulot. Une référence !

J’allais oublier. Ce soir, Charlotte et Camille seront de retour à la maison, après deux journées passées chez leurs grands-parents paternels. Ce matin , j’ai acheté aux « Fruits et légumes » du quartier Berlioz deux barquettes de fraises, des guariguettes du Lot-et-Garonne, ramassées hier. Une barquette de 250 g. pour chacune, ça devrait leur faire plaisir. Avec de la chantilly…

mercredi, avril 16, 2008

jeudi 17 avril - paris jazz corner (7)

Ce matin, juste avant de partir une nouvelle fois pour Hossegor, le facteur sonne une seule fois. Un autographe pour un colissimo de "Paris Jazz Corner". Il y a quelques jours, j'avais eu l'occasion d'échanger quelques mots avec Sylvie Jamet au sujet d'Ildo Patriarca. Comme je consulte le site de "Paris Jazz Corner" pratiquement chaque soir, j'avais noté l'offre d'un disque de cet accordéoniste rare et très apprécié de ses pairs, en particulier de Raul Barboza. C'était un signe du hasard objectif, signe qu'il ne faut ignorer à aucun prix. Mais, en même temps, je ne voulais pas m'en tenir à un seul disque, 5 euros de port pour un prix de 10 euros. En fait, cet argument n'est qu'un prétexte. Evidemment ! J'y ajoutais donc un cd qui me faisait signe depuis plusieurs visites sur le site : "Clifton Chénier - 60 Minutes with the King of Zydeco".

Ce sont donc ces deux albums qui sont arrivés ce matin. Envoi toujours aussi impeccable. Notice succincte, mais bien documentée. je ne saurais trop recommander cette boutique.

Je n'ai guère eu le temps d'écouter ni l'un ni l'autre des deux cds. J'espère pouvoir le faire demain. Mais, ce que j'ai entendu d'Ildo Patriarca me donne envie d'en écouter plus. Je parlerais volontiers d'une sorte d'accordéon classique d'Amérique du Sud. La parenté avec Barboza est évidente. De bons moments en perspective.


Quant à Clifton Chénier, je trouve que dans le domaine de la musique cajun et du blues-accordéon, il y a lui et les autres. A l'instar de Viseur, de Carrara ou de Privat, il représente pour moi, dans son domaine, une sorte d'accordéon originel. On écoute une source jaillissante que d'autres renouvelleront à leur tour, mais de toute façon après... Ce qui devait être inventé l'a déjà été !



mardi, avril 15, 2008

mercredi 16 avril - hosgor encor et encor

Les choses sont parfois bizarres. « Les petits » sont en vacances (zone de Toulouse). Ils ont le projet de s’installer à Hossegor durant la semaine du 21 de ce mois et, du coup, bien que les travaux de rénovation de la villa soient loin d’être achevés, nous faisons chaque jour l’aller-retour entre Pau et Hossegor – 125 kilomètres tout de même – pour la rendre habitable.

Quand je dis à tel ou tel copain que je passe tous les jours de la semaine à Hossegor, il n’a pas assez de mots pour dire à quel point il m’envie. Tu parles ! Pendant que l’océan déroule mollement des vagues sages, qui font le désespoir des surfeurs, pendant que le ciel est imperturbablement bleu du matin au coucher du soleil, pendant que des retraités et quelques rentiers mangent des huitres et/ou des morues à la Biscayna ou encore des iles flottantes accompagnées d’un pastis landais, moi, je ponce, je décape les sols où maçons, plâtriers et peintres ont laissé leurs traces, je porte tout ce qui traine encore à la déchetterie, parfois, c’est ma récompense, je peins ou je fais les vitres. Et quand je suis un peu fatigué, j’essaie de joindre au téléphone les artisans qui m’ont promis de venir sans faute, mais qui ont été retenus sur un autre chantier ou qui ont attrapé un tour de rein sur un toit ou qui sont en panne de fournitures. L’inventivité des artisans pour différer leurs interventions est surprenante et le contact régulier (quand ils répondent au téléphone, sans laisser ce soin à leur répondeur) avec eux m’a beaucoup appris. L’aléatoire est encore ce qu’il y a de plus sûr en ce monde du bâtiment.

Quand je montre des photographies à des copains, ils me disent, unanimes : « qu’est-ce que vous serez bien ! ». Cette expression me rappelle la célèbre formule : « Demain, on rase gratis ! ». Demain… Cet été… L’année prochaine… Plus tard…

Bien entendu, comment oserais-je me plaindre d’une telle situation ? Je ne veux ni faire pleurer sur mon sort, ni moi-même m’apitoyer sur ma situation. Je note simplement qu’il y a quelque distance entre les fantasmes de farniente attachés au mot « Hossegor » et la réalité des petits travaux qui y occupent tout mon temps. Comme je ressentais quelques douleurs au genou gauche, mon médecin m’a dit : « c’est l’entorse du carreleur ». C’est le métier qui rentre. Depuis, j'admire les carreleurs et leurs genoux de cavaliers.

Mais, blague à part, si je ne vois en tout cela aucune matière à me plaindre, je dois dire que je suis frustré de passer tout ce temps sans pouvoir écouter de l’accordéon. Bien sûr, j’essaie de l’imaginer, je me fais des concerts improbables, je me promets, dès mon retour à la maison, d’écouter tel ou tel titre qui tourne dans ma tête. Ecouter de l’accordéon, satisfaire cette passion, on se dit que c’est un désir bien simple, on se dit qu’il doit être bien facile de le satisfaire : un peu de temps, un peu de solitude, un peu de silence. Eh bien, il faut en convenir, ce sont là des luxes quasi inaccessibles, presque a-sociaux, peut-être subversifs.

Bon, on ne va pas en rester là : « Les pommes de ma douche » ! « Swing from Paris » ! J’apprécie tout particulièrement ce soir « Stranger in Paris » de Dominique Rouquier, guitare solo, et « Paris swing » de David Rivière. Ils perpétuent un style avec des titres tout neufs à côté de morceaux reconnus comme des classiques.

lundi, avril 14, 2008

mardi 15 avril - petits compléments

J’ai essayé d’en savoir un peu plus sur Frédéric Daverio. Je l’ai retrouvé sur myspace où l’on peut écouter quatre morceaux de « Silence… on tourne » :

http://profile.myspace.com/index.cfm?fuseaction=user.viewprofile&friendid=253098179

… et sur le site de son producteur, Iris Music :

http://www.iris-music.com/album.php?products_id=233


Quant aux « Pommes de ma douche », leur site est bien fait et tout à fait explicite. Ils se présentent en effet de la manière suivante : « ce quintet 'gadjé' blésois vous invite à voyager dans son univers musical où se côtoient jazz manouche et valses gitanes avec des essences de swing... Embarquez pour une visite guidée avec guitares, violon, contrebasse et accordéon.Entre jazz, musette et culture gitane, les Pommes de ma douche gèrent de manière tranquille et paisible l'héritage d'une lignée qui, via Tchavolo Schmitt, Biréli Lagrène et Angelo Debarre, remonte à Django Reinhardt et Stéphane Grappelli... ».

http://www.lespommesdemadouche.com/accueil1.html

En plus ils n’ont pas peur des jeux de mots distanciés : "les pommes de ma douche", ça rappelle - c'est évident !- « la pompe manouche ». Tout est dit. Avec six morceaux sur myspace :

http://www.myspace.com/lespommesdemad

lundi 14 avril - les pommes de ma douche

Malgré le peu de temps dont je dispose, j’ai quand même pu écouter la quasi-totalité des morceaux de « Swing from Paris », dernier opus des « Pommes de ma douche ». C’est une machine qui tourne. Ces cinq-là sont comme des copains fidèles. On les a vus depuis trois jours, trois mois ou trois ans, peu importe, on s’attable et l’on est tout de suite entre soi. On est sur la même longueur d’ondes.

On retrouve des standards, on découvre des compositions originales. On a affaire à un jazz manouche parfaitement rodé. Bien sûr, le violon, la contrebasse ont une place primordiale, mais David Rivière maitrise de mieux en mieux son sujet, comme on dit. Parmi les standards, « I love Paris », « Swing from Paris », « A Paris » ou encore « Fleur de Paris » et « Revoir Paris ». Parmi les compositions originales, « Scènes de Paris », « Stranger in Paris » ou « Paris Swing ». De prime abord, un disque agréable, enjoué, rythmé comme une horloge suisse. A seconde écoute, un travail méticuleux, d’un professionnalisme sans failles. Et quand on reprend les disques précédents, on se rend compte que c’est une œuvre qui patiemment et obstinément se construit.

Si seulement j'arrivais à me fabriquer du temps ou simplement à ne pas consommer celui dont je dispose en actions vaines et inutiles...

dimanche 13 avril - daverio

Décidément, ma vie est un mystère permanent pour moi-même. Une grande partie des journées est consommée en obligations et nécessités diverses, qui finalement me laissent beaucoup moins de temps que je ne le souhaiterais pour écouter de l’accordéon. C’est pour cela aussi que j’admire les créateurs. Outre leur puissance créatrice, qui est l’essentiel, j’admire leur force de caractère, qui leur permet de se donner le temps de leur passion et d’être capables de laisser les impedimenta de la vie à leur juste place.

Ce vendredi, j’ai cependant trouvé le temps d’aller, avec Camille, jusqu’à la boutique « Harmonia Mundi » de Tarbes. Bruno, le responsable du magasin, m’avait réservé un exemplaire du dernier opus des « Pommes de ma douche », « Swing from Paris ». Mais, à mon arrivée, il me montre un disque qu’il vient de recevoir : « Silence… on tourne », accordéon solo de Frédéric Daverio. Il ne l’a pas écouté. Il n’a aucune information sur cet accordéoniste. L’occasion est trop tentante de faire une découverte.

De retour à la maison, j’écoute donc ce cd mystérieux, sans chercher à savoir quoi que ce soit de son auteur.

Trente et un morceaux. Parmi ceux-ci, dix figurent sous le nom générique « Musaïque ». Comme le suggère le titre, l’ensemble évoque de la musique de films. On pense à des pièces ou fragments pour un récit sans paroles. On voit Buster Keaton, des scènes de Fellini ou de Vittorio de Sica, on voit aussi des images d’Alfred Hitchcock. Nul doute qu’une autre écoute fera surgir d’autres références. J’attendrai encore un peu avant de m’informer sur ce compositeur-interprète, dont j’ai vu cependant qu’il est sur myspace.

jeudi, avril 10, 2008

samedi 12 avril - cueillette de l'aragnon

Malgré le temps incertain et même des risques d'orages annoncés par la météo, nous sommes allés, Françoise, Camille (dont la varicelle s'estompe progressivement) et moi, passer l'après-midi à la "cueillette de l'aragnon", une ferme de quinze hectares sur la commune de Montardon, au nord de Pau. On y cueille et l'on y ramasse des fruits ou des légumes de saison, d'avril à octobre. Aujourd'hui, ce seront d'abord des fraises, des gariguettes.
La serre, qui nous tient à l'abri du vent plutôt violent, est chaude, moite et pleine de promesses.

Camille nous aide à sa façon : trois fraises dans le panier, une fraise dégustée sur place immédiatement. C'est une manière de faire baisser le prix du kilo.


Avant de rejoindre le verger, un petit détour, obligé, par les balançoires en forme de petits bateaux. On a du courage et de l'audace, mais, tout de même, ça fait un peu peur.



Camille court à perdre haleine entre les rangées de pommiers. On dirait de la neige en suspension. La lumière est presque pénible à supporter. On fait une petite halte pédagogique devant le panneau de "la cueillette des pommes".

... et l'on termine par de la salade et un chou énorme avant d'aller faire une brassée de tulipes que l'on tire du sol dans les règles de l'art, sans arracher le bulbe.

Tous ces efforts ont donné soif à Camille. On termine la récolte par une glace - citron / fruit de la passion - et deux grands verres de jus de pomme bio.
De retour à la maison, nous écoutons encore une fois "Solo" de Bogdan et "Tribute to Emile Carrara" de Chrystijo. Je me sens en accord immédiat avec la sensibilité et le monde de Bogdan ; il me faudra encore un peu de temps pour apprécier "Tribute..." à sa juste valeur. Je ne saurais dire pourquoi, mais il y a dans celui-ci une "brillance" qui me tient pour ainsi dire à distance.






vendredi 11 avril - bogdan badiu de bastille

De Bogdan Badiu, je sais peu de choses : il est né le 09/04/1980 à Bucarest. Grand-père saxophoniste, père violoniste. A étudié le piano sept années durant. Arrivé à Paris en 2000, il a découvert Piazzolla et le tango, Galliano et le jazz. Il vit à Paris. Il joue dans les couloirs du métro, à Bastille en particulier, de 18h à 22h30, quasiment tous les jours. Sur internet, j’ai retrouvé sa trace parmi les concurrents d’un concours mondial en Norvège, en octobre 2006. Il est passé sur France 2 le 26 décembre 2007, « l’accordéoniste de Bastille », d’après l’article que lui a consacré Françoise Jallot dans le numéro d’avril de « Accordéon & accordéonistes ».
Il a eu la chance de suivre l’enseignement de Frank Angelis une année durant au conservatoire de Gennevilliers.

Nous avons écouté « Solo » à plusieurs reprises aujourd’hui. Nous connaissons plusieurs interprétations de « Chiquilin… » ou de « Libertango » ; nous avons écouté maintes fois « Fou rire » de Galliano, soit sur cd, soit en concerts. Cette familiarité nous permet de saisir assez bien la spécificité de sa marque. Difficile certes à définir, mais perceptible avec évidence. Une lecture très personnelle de ces œuvres. Et puis, « Romance pour Françoise » et « Polka », deux compositions originales, qui signent un vrai style, où je continue à trouver peu de traces du phrasé roumain. Nous avons écouté "Solo" avec un plaisir constant et constamment renouvelé.

mercredi, avril 09, 2008

jeudi 10 avril - bogdan solo

... reçu, hier matin, l'album de Bogdan Badiu, " Solo".

J'avais eu connaissance de ce disque par un article, un "portrait", de Françoise Jallot dans le numéro d'avril de "Accordéon & accordéonistes", pages 46-47, et par sa chronique, page 65. Cet article m'avait d'emblée intéressé par sa présentation sympathique de cet accordéoniste, d'origine roumaine et concertiste de métro à Paris. Bref, j'avais pris immédiatement contact et c'est quasiment par retour du courrier que j'ai reçu "Solo".

Sept titres. Cela peut paraitre peu, mais leur énoncé est plein de promesses : "Chikiling des Baching" (Piazzolla), "Voyage à Paris" (Galliano), "Romance pour Françoise" (Badiu), "Fou rire" (Galliano), "Regresso del amor" (Piazzolla), "Libertango" (Piazzolla), "Polka".


L'article de la revue était illustré par une photo, prise dans un couloir de métro, où l'on voyait Bogdan Badiu jouer avec un Victoria-piano. La couverture du cd et les autres photographies montrent un Piermaria-piano.
Que dire ? J'ai immédiatement beaucoup aimé ce disque. D'abord parce que c'est un son, qui signifie un style. Difficile à définir : précis, créatif (tous les arrangements sont originaux) avec cette qualité que j'apprécie particulièrement et que je nomme le "rien de trop". Ensuite, parce que tous les morceaux manifestent une sorte d'alchimie propre aux interprètes de talent : on y reconnait à la fois le style du compositeur et celui de l'interprète. Ce n'est pas si fréquent. Fidélité à l'oeuvre composée, mais en même temps une interprétation qui lui donne une vie spécifique.
J'ai tout aimé, qu'il s'agisse de "Chiquilin", plein d'émotion et de retenue, de "Fou rire", différent de l'interprétation de Galliano, mais très intéressant par la lecture qu'il en donne. Qu'il s'agisse de "Libertango" , tant ressassé, ou de "Regresso del amor". Sans oublier une composition originale dédiée à sa femme par Bogdan, "Romance pour Françoise", une pièce pleine de sentiment et ici encore de retenue ou de pudeur. Sans oublier non plus le dernier morceau, "Polka", dont je pense qu'il s'agit aussi d'une composition originale.
Le disque ne comporte pas de nom d'éditeur, ni de date, ni de lieu d'enregistrement. Mais on peut joindre Bogdan Badiu à son adresse courriel : b.bogdan@free.fr
Finalement, le nombre réduit des titres, sept, et le nombre réduit des compositeurs, Piazzolla, Galliano et Bogdan, lui-même, donnent une grande unité et une grande cohérence à cet opus. Il me reste à espérer une suite à ce cd, et en tout cas à souhaiter que les circonstances de la vie donnent à cet accordéoniste les occasions de manifester son talent. Un dernier mot : son origine roumaine pourrait laissr croire qu'il s'agit d'un accordéon d'Europe de l'Est, or je ne trouve pas que ce soit le cas, car son inspiration me parait dépasser ces frontières géographiques. J'ai plutôt eu le sentiment d'avoir affaire à une personnalité originale. Ce qui se manifeste d'emblée par un son qu'on n'oubliera pas de sitôt.



mardi, avril 08, 2008

mercredi 9 avril - de la communication

Françoise et moi, nous avions vingt-cinq ans en 68. Pas question ici de témoignage nostalgique ; pas question d’ajouter notre regard rétrospectif sur cette période aux innombrables pensées, réflexions et commentaires censées en donner le sens et en tirer les leçons, quarante ans après. Non, je m’en tiendrai à une seule observation, qui me parait illustrer un des aspects du changement entre 68 et aujourd’hui.

Avant 68, dans le monde scolaire – de l’école primaire aux universités -, l’enseignant avait pour mission de transmettre le savoir et éventuellement une éducation à ses élèves, qui avaient, pour leur part, le devoir d’être attentifs pour assimiler cette transmission. L’information circulait en un seul sens : de haut en bas. Il était acquis que la compréhension ne demandait qu’une écoute attentive. Il était acquis que l’explication ne demandait qu’un discours clair, bien articulé. La communication était alors bannie de l’espace scolaire. Elle ne pouvait signifier que la perturbation, le trouble, le hors-champ. Le maître s’adressait à l’élève – une abstraction, non un sujet psychologique multiple – et l’élève répondait quand il était interrogé et sommé de restituer partie du savoir dispensé par son maître. Tout échange entre élèves ne pouvait qu’être exclu. Perte de temps, vains bavardages, paroles hors de propos, etc…

L’esprit de 68 a introduit cette idée, révolutionnaire, que le savoir se transmet moins qu’il ne se construit par échanges, confrontations, débats d’idées. L’espace scolaire a alors pris une autre configuration : les rangs d’oignons ont été remplacés par des tables en cercle ou plutôt en carré. Quadrature du cercle. En tout cas, l’intention était claire : il fallait que tous les acteurs du jeu scolaire se voient et puissent s’adresser directement les uns aux autres. L’information devait circuler horizontalement et par des canaux multiples. Il ne m’appartient pas de porter ici un jugement de valeur sur ces deux régimes de communication. Mais j’ai observé, au cours de la décennie 90, que les classes ont retrouvé leur forme traditionnelle : tables individuelles ou doubles en rangs d’oignons. Les arguments techniques ou matérialistes ne manquaient pas pour justifier comme une nécessité ce retour aux sources. Aux fondements diraient certains.

Mais aujourd’hui, je discerne dans le champ social, et pas seulement scolaire, autre chose que cette opposition entre deux manières de concevoir la communication et la circulation de l’information. La communication, ce qu’il est de coutume d’appeler « la com » désigne un ensemble de techniques destinées à influencer l’opinion. Le sens de cette notion, prioritaire aujourd’hui, s’est développé dans le monde de la publicité, puis dans celui de la politique, qui apparaît de plus en pus comme dérivé du premier. La communication, au sens actuel, désigne non pas une perturbation dans la circulation de l’information, mais le régime normal de cette circulation. A ceci près que cette normalité est référée à la seule valeur d’efficacité à court terme et, en aucun cas, à une exigence de vérité ou de cohérence logique. Communiquer, c’est influencer. Point !

Pourtant, il existe un domaine où la communication a son sens plein d’échange, de partage et de participation. Je pense aux concerts. Aux concerts réussis. Tous ne le sont pas, mais quand ils le sont, alors on éprouve ce sentiment que quelque chose se passe, que quelque chose s’élabore avec l’ensemble des participants, je dirais même coopérants. Les rôles sont certes différents et même inégaux, mais de l’échange, ici et maintenant, nait un sentiment de compréhension non discursive, non verbale, non rationnelle. Quelque chose qui ressemble au sens originel du mot « communication ». Il s’agit de vérité, non pas au sens logique avec son exigence de cohérence formelle ni au sens de la rigueur expérimentale avec ses exigences de preuve, mais d’authenticité, au sens d’expression vraie, sans masque ni hypocrisie.
C’est pour cela que j’aime tant l’accordéon : Galliano, Amestoy, Macias, De Ezcurra, Mille, Rivas, Barboza et tant d’autres pour qui communiquer sa passion, le temps d’un concert, est indissociable de la passion de communiquer au sens de construire ensemble une relation qui aurait pu ne jamais avoir lieu, mais qui ayant eu lieu, apparaît d’évidence comme nécessaire.

mardi 8 avril - buren et chrystijo

J'ai amené Camille au jardin d'enfants de notre quartier. Elle est fière d'avoir surmonté ses craintes et apprivoisé sa peur. Elle ose maintenant descendre seule le toboggan des grands. Déjà ses sensations s'émoussent. Mais, tout à coup, je me rends compte que l'allée de ce jardin d'enfants est plantée de colonnes en pin, qui sont à n'en pas douter une colonnade de Buren.



Je cherche vainement la signature de l'illustre plasticien. Nulle trace de son nom. Un doute me saisit : cette oeuvre n'est pas une création de Buren, mais tout simplement le résultat du travail anonyme des ouvriers jardiniers de la ville de Pau.


Toujours est-il que cette observation me rend d'humeur joyeuse. J'ai retrouvé un état d'esprit qui me permet maintenant d'écouter Chrystijo. Dès notre retour à la maison, je mets la galette sur le lecteur.


Au terme de cette écoute, je reste perplexe. Si j'essaie d'en comprendre l'origine, il me semble que cela tient à un son trop brillant. Je ne retrouve pas le son de Carrara, son feutré, résultant sans doute des enregistrements originaux, même si la remastérisation fait des merveilles. Mais je suis attaché à ce grain, que je ne retrouve pas ici. De même, je ne retrouve pas dans les arrangements les caractéristiques du style de Carrara. "Mon amant de saint-jean" , façon samba, pourquoi pas... mais je n'en comprends pas bien l'intérêt. Je ne juge pas, je constate que je reste un peu à l'extérieur de ce "Tribute". Mais bien sûr, je ne demande qu'à comprendre et à apprécier. Par exemple, je n'ai pas saisi en quoi la version "new tango (titre 11) " de "Le Yin et le Yang" avait droit à ce qualificatif. Autre chose : la référence au Yin et au Yang se traduit par une alternance de style ou de rythme entre les morceaux, une succession de différences, sinon d'oppositions, encore moins de contradictions, alors qu'en principe les notions de Yin et de Yang renvoient à des contraires qui coexistent. Succession de contraires ou coexistence, ce n'est pas du tout la même chose. Dans un cas, on alterne des morceaux différents, dans l'autre il y a tension intrinséque à chaque morceau.


Je vais laisser reposer, écouter à nouveau Carrara, puis revenir à cet album.


Tout de même, j'ai bien aimé la valse "Monsieur Jo" et quelques autres titres.

lundi 7 avril

Nous sommes revenus de Toulouse hier soir, entre 22h et minuit. Camille, qui sort à peine d'une varicelle carabinée, qui l'a couverte de boutons en trois vagues successives du bout du nez aux doigts de pieds, s'endort dès l'entrée sur l'autoroute.



La circulation est fluide. Nous essayons d'écouter l'album de Chrystijo, "Tribute to Emile Carrara". Mais, non, décidément, le coeur n'y est pas. On a beau se dire que la vie continue, pour l'instant elle est un peu suspendue. On sent bien que, malgré son dynamisme et sa bonne humeur, ce disque ne nous remontera pas le moral. Il faut attendre un contexte plus serein. Attendons.

dimanche 6 avril - chrystijo

... reçu vendredi matin un colissimo d'Alapage contenant un cd dont j'avais lu une chronique enthousiaste dans un numéro de la revue "Accordéon & accordéonistes". Il s'agit de "Tribute to Emile Carrara, vol. Yin & Yang - jazz, musette & danse, Chrystijo".



La première impression est sympathique, mais bizarre, sans que je puisse déterminer clairement d'où vient cette bizarrerie. Peut-être l'accumulation de références : jazz, musette, danse, Yin, Yang...






Comme nous devions passer le week-end à Toulouse, nous avions projeté d'écouter cet album pendant le trajet. Mais, au moment de notre départ, le téléphone sonne. "M... est morte ce matin". Un cancer foudroyant. Trois semaines entre le diagnostic et son décès. C'était une amie chère. Le disque reste dans le sac de voyage.












jeudi, avril 03, 2008

samedi 5 avril - senior ? vieux, quoi !

Le mois d’avril me laisse très partagé quant aux sentiments qu’il m’inspire. C’est le mois de mon anniversaire et je ne sais si je l’aime bien ou si je le hais. Il est en effet, sinon imprévisible, du moins souvent incohérent. On croit avoir quitté les giboulées avec le mois de mars, les pluies interminables, les bourrasques de vent, les coups de froid, on croit marcher vers le printemps, mais on se rend vite compte que les giboulées dites de mars sont les plus violentes en avril, on se rend vite compte que les grains se succèdent, que les gelées sont fréquentes et qu’il est encore loin le temps où l’on pourra ranger ses petites laines. Mais, à l’inverse, c’est en avril que la végétation explose, que le gazon doit être tondu toutes les semaines, que des couleurs vives émergent ici et là dans les jardins. Tout est vert, chargé de trop de sève, tout est trop humide. Et, à Pau, au piémont des Pyrénées, le gave devient énorme, gonflé par les pluies et par la fonte des neiges. L’hiver est encore là, qui semble s’attarder interminablement, mais le printemps aussi avec ses excès de vitalité, son énergie débordante.

Le mois d’avril donc est le mois de mon anniversaire. Chaque année, peu après le 1er avril, je tourne une page. Cette année est un peu particulière, car je fêterai mes soixante-cinq ans. Biologiquement, je ne suis pas sûr que cette date induise en moi un changement ; socialement, non plus. Les aléas de ma santé ne dépendent pas du calendrier. Ma situation de retraité, comme mes ressources ne seront pas modifiées. Mais sociologiquement et psychologiquement, le changement est évident. La sociologie descriptive des enquêtes d’opinion fait en effet une distinction radicale entre les moins et les plus de soixante-cinq ans. Les entreprises de services consentent des avantages particuliers aux plus de soixante-cinq ans. A partir de ce seuil on obtient des cartes de réduction spécifiques, etc… Au plan psychologique, il y a aussi, pour moi, un effet de seuil qui me parait évident. Ces derniers temps en effet, j’ai observé que beaucoup de copains ou de connaissances ou de voisins de ma génération étaient frappés par divers ennuis de santé ou par des handicaps variés, en nombre tel qu’on ne peut les attribuer au hasard. Je me rends compte que jusqu’ici la mort, qui avait atteint des gens de mon âge ou plus jeunes, m’apparaissait comme liée à des causes accidentelles. Aujourd’hui, elle m’apparaît comme un phénomène naturel. Elle ne résulte pas de causes externes, mais d’un processus biologique inéluctable. J’espère vivre vieux, quoique… pas dans n’importe quel état, mais cette évidence fait partie maintenant de ma vision de la vie et cette prise de conscience est irréversible.

Bref, soixante-cinq ans, en dépit des euphémismes des publicitaires ou des hommes politiques, ce n’est pas l’âge où l’on entre dans le monde des seniors. C’est l’âge où l’on devient « un vieux ». D’ailleurs, j’ai observé, lorsque je présente un billet de SNCF par exemple, portant réduction aux « plus de soixante ans », que le contrôleur n’éprouve pas le besoin de me demander une preuve. C’est un signe sûr.

Comme j’étais dans cet état d’esprit un peu méditatif, j’ai eu envie d’écouter de l’accordéon. Pas beaucoup. Quelques morceaux. Mais je les voulais congruents à mon état d’esprit, presque état d’âme. Choix difficile, jusqu’au moment où, parcourant mes disques, tout s’est éclairci. J’étais tombé en arrêt devant le double cd de Jean Pacalet : « 7x7 ». Sept modules de sept pièces, qu’il nomme « miniatures ». Mais, parmi ces pièces, que choisir ? Et là, surprise ! Le module cinq – premier du second cd – a pour titre : « Scènes pour la vieillesse». 26 :24. C’est évidemment ce que je dois écouter, ici, maintenant, aujourd’hui. Cela et seulement cela.

En écoutant donc les sept pièces de « Scènes pour la vieillesse », je suis frappé par le son de Jean Pacalet. Et l’idée me vient que c’est un compositeur dialectique, au sens philosophique du terme. Il tient ensemble des contradictoires : puissance et finesse, couleurs sombres et couleurs brillantes, panorama et vision microscopique, écriture stricte et inventivité, tradition et modernité. Ce qui pourrait sembler contradictoire (ou bien… ou bien…) est ici dépassé dans un mouvement que je qualifie de dialectique. Hegel avait un mot pour désigner ce mouvement : « Aufhebung », signifiant par ce terme ce qui se développe par intégration des contraires. En écoutant Jean Pacalet, je suis ému bien sûr par son jeu. Cette émotion est le point de départ. Mais à partir de là, son écriture m’apparaît, au plan intellectuel ou abstrait, avec une évidence sensible comme l’expression et la manifestation même de cette notion de « Aufhebung ».

Mais, au fur et à mesure que j’écoute les sept pièces, une autre évidence surgit à mon esprit. Le rapprochement avec Brueghel me saute aux yeux. Brueghel, dois-je le dire, est un de mes peintres de prédilection. Ses tableaux sont construits avec la plus grande rigueur suivant des sections géométriques qui structurent ses tableaux et orientent le parcours du regard qui les contemple. Ces sections sont déterminées de manière complexe par un jeu de lignes verticales, horizontales, diagonales et obliques. Aucune n’est tracée, mais elles sont là, comme des guides bienveillants et fermes. Brueghel a aussi le génie de nous donner à voir des plans multiples : plan d’ensemble, vision générale et sens du détail, vision microscopique. En ce sens, chaque tableau est un univers. Comme « 7x7 » de Jean Pacalet.

C’est une bien belle journée que celle-ci où j’ai eu la chance extrême d’écouter une œuvre si jubilatoire. Vive la vieillesse !

mercredi, avril 02, 2008

vendredi 4 avril - hossegor encor...

Mercredi après-midi, réunion à Hossegor, encor... Un sous-traitant de FranceTélécom doit installer une ligne téléphonique souterraine, mais pour une histoire de gaines non conformes, l'affaire est remise à plus tard. Ce contretemps est de peu d'importance, car le temps de la route - 1h30, tout de même ! - nous a permis d'écouter avec grand plaisir un disque tout désigné en la circonstance : "Sur la route". Un trio : O. Cahours, guitare, J. Lignon, accordéon & accordina, T. Colson, contrebasse. En fin d'après-midi, avant de rentrer sur Pau, petite pause au "Mary Sol" sur la plage des Landais. Le temps pluvieux de ces derniers jours a laissé place à un ciel tout bleu, bleu pâle et hésitant, mais bleu tout de même. La place est quasi vide. Quelques passants hésitent à s'attabler. On a des doutes sur la stabilité des éléments. Finalement, nous prenons deux chocolats brulants à l'intérieur du bistrot, à l'abri des vitres.

Après ces deux chocolats et avant de reprendre la route, encore un petit tour sur la plage jusqu'à la frange des vagues. Vers le sud, vers l'Espagne donc, des surfeurs attendent "leur" vague. Nous nous éloignons en suivant nos pas au rythme des rouleaux qui viennent exploser contre des rochers apportés là artificiellement pour fixer le sable et retarder l'érosion.

En revenant sur nos pas, nous regardons, toujours avec le même amusement, les villas basco-landaises qui dominent la plage. De loin, on dirait des maisons de poupées.


Sur le chemin du retour, arrêt obligatoire chez le paysan producteur - distributeur d'asperges. Un nouveau panneau complète sa panoplie commerciale du côté des poissons. C'est bien tentant tout ça, et bien frais.


Je suis toujours autant fasciné par la géométrie rectiligne des rangs d'asperges. Le maïs, les asperges et les pins se partagent le paysage. Il s'agit toujours de lignes parallèles : à ras du sol pour les asperges, en rangs serrés pour le maïs, en lignes faussement fragiles pour les pins tendus vers le ciel.

Bien sûr, en faisant quelques pas entre deux rangs d'asperges, je ne peux résister au plaisir de l'autoportrait au soleil couchant.

De Peyrehorade à Pau, nous écoutons Emile Carrara, "Jazz & Swing". Du velours. En arrivant à la maison, j'écoute à nouveau quelques versions de la célébre valse, "Indifférence". Dans son envoi récent, dont nous avons parlé en route, Paul en avait en effet sélectionné pour nous deux versions extraordinaires et cela m'a donné à nouveau envie d'en écouter d'autres. C'est une composition à laquelle je reviens souvent. Je considère cette valse comme un chef-d'oeuvre, encore au-dessus des valses les plus emblématiques du répertoire de l'accordéon.






mardi, avril 01, 2008

jeudi 3 avril - les monstres sacrés de l'accordéon

"Les monstres sacrés de l'accordéon" est le titre d'une collection, dirigée et réalisée par Roland Manoury sous label RDC Records. Le disque d'Emile Carrara, "Jazz & Swing", que j'ai reçu hier est le numéro 3 de cette sélection. Vingt-trois titres, de 2:15 à 3:08, enchainés sur un tempo vif et carré, si j'ose dire. Mais je me comprends. Si le mot swing a besoin d'un exemple pour être compris, il suffit de passer ce disque pour saisir ce qu'il signifie.

On pourrait dire la même chose à propos du musette avec la sélection que Paul m'a concoctée, c'est bien pourquoi, fidèle à mes habitudes, je l'écoute en boucle. Pour revenir sur tel morceau, qui m'a plu, pour revenir sur tel autre dont je ne me souviens plus suffisamment. En tout cas, mon impression première se confirme, il s'agit bien de fondamentaux, au sens de compositions et d'interprétations qui ont posé les bases de toute une histoire de l'accordéon.

Et puis, "Accordéon & accordéonistes", numéro 74, avril 2008, est arrivé-é-é... Un coup d'oeil transversal suffit à m'indiquer quels sont les articles que je vais lire en priorité. Mais d'abord, la première information qui m'a frappé se trouve page 70, la dernière avant la troisième de couverture. Il s'agit de l'annonce de la "Tête d'affiche" du numéro prévu en mai, à savoir "Jean-Luc Amestoy, Philippe de Ezcurra, Michel Macias et René Lacaille". Cela m'a fait plaisir, car j'apprécie beaucoup, individuellement et ensemble, ces quatre mousquetaires du label "Daqui". Le numéro de mai mettra donc le sud-ouest à l'honneur. Ils habitent tous en effet qui à Toulouse, qui près de Bordeaux, qui à Bayonne et même Lacaille qui habite en Lot-et-Garonne. Il ne manque que Bruno Maurice, dont j'ai appris ce matin, qu'il sortira un cd avecle trio Miyasaki le 10 de ce mois, sous label "Daqui / Harmonia Mundi".

De ce numéro d'avril, je retiens donc dans l'ordre des pages :

- un article, en "Pédagogie", consacré par Jacques Mornet à Franck Angelis. Cet article vient compléter plusieurs articles précédents. Il situe en particulier trois compositions : "Romance", "Amalgame" et "Intérieur".
- un autre article de "Pédagogie", consacré par William Sabatier à la suite d'une analyse du cd "En vivo al Regina" , présenté comme une oeuvre majeure de Piazzola.
- un dossier, essentiellement constitué d'entretiens et de portraits, sous le titre générique : "Vent d'Est et lames tziganes", dossier établi par Frnçoise Jallot, une assurance de qualité. On y trouve donc "Ersatz Musika", un groupe russe ; "La Panika", groupe de la région lilloise fusionnant des musiques tziganes, kletzmers, swing, etc... ; "Haïdouti Orkestar", qualifié de swing rebelle ; un portrait de Bogdan Badiu, qui tient concerts dans les couloirs du métro, station Bastille ; enfin, Nathalie Joly & Thierry Roques, dont le nom, "Paris-Bukarest" rappelle un certain "Paris-Moscou".
- je citerai encore l'affiche, fort alléchante, du festival d'accordéon de Drancy, du 23 au 25 mai et, pour finir, les chroniques consacrées à quelques disques : "Afan Toufan" de la Panika, "Solo" de Bogdan, "Balkan Heroes" du Haïdouti Orkestar, pour les musiques du monde. Mais aussi, en jazz, "Crackerjack" de Joe "Sonny" Barbato et, en classique, "Soir d'été" du Budapest Symphony Orchestra.

Et puis, évidemment, il y a ce plus que nous offre chaque mois cette revue, à savoir les photos de tous ces héros anonymes qui font la vie de l'accordéon. On imagine déjà ces photos découpées avec soin et encadrées, objets de toutes les admirations, trônant sur le bahut famlial à côté d'autres clichés de mariages ou de communions solennelles ou de vacances à l'étranger.

mercredi 2 avril - retour aux sources

Il y a des jours comme ça, à marquer d'une ou de plusieurs pierres blanches. Pierres blanches ou petits plaisirs. Bref, à dix heures, le facteur dépose dans la boite à lettres un colis expédié par Alapage, que je n'espérais pas avant demain, et une lettre de Paul, contenant un cd personnel.

Dans la lettre, un vrai plaisir ! le cd comprend une vidéo de François Parisi, une interview de Marc Perrone par "Télérama" et un choix de morceaux,dont la liste des interprètes suffit à dire la qualité. Baselli, Privat, Van Damme, Azzola, Galliano, Larcange, Lassagne, Gus Viseur, etc... L'unité de cette sélection, très personnelle, me ravit. Au fur et à mesure de leur écoute, les différents morceaux sont pour moi comme une sorte de retour aux sources. C'est comme si je retrouvais ce que j'appellerais volontiers des fondamentaux mélodiques. Quelque chose comme une évidence qui certes n'est pas simple, mais qui en tout cas n'est pas compliquée. Je retrouve cette notion de "ligne claire" dont on a pu parler pour désigner l'école belge de bande dessinée.
Quelle vitalité !
Dans le colis expédié par Alapage, un disque d'Emile Carrara, que j'avais commandé à la suite d'un article paru dans le numéro de mars de la revue "Accordéon & accordéonistes". "Emile Carrara, mélodiste surdoué", article "Tête d'affiche", pages 30-35, signé par Roland Manoury. Cet envoi ne pouvait mieux tomber. Il complète à merveille le courrier de Paul. Vingt-trois titres - fox trot, slow, fox swing, fox stomp.


Toujours cette impression de retour aux sources, de redécouverte des originaux de ce monde où se croisent le jazz et le swing. On se dit qu'au moment où beaucoup de médicaments sont déréférencés, quasiment renvoyés au statut de placebos, on se dit que la sécu devrait rembourser de tels cds. Emile Carrara, musicothérapeuthe post mortem, voilà une carte de visite professionnelle qui en vaudrait bien d'autres. Mais, nos hommes politiques ont-ils le temps d'écouter de l'accordéon pour comprendre le bien fondé de mon propos ?






mardi 1er avril - mémoire foraine et site nomade

... continué à explorer le site de Sylvie Jamet sur Myspace. J'y retrouve les qualités de son blog, en particulier l'ambition d'exhaustivité, qui en fait un lieu de ressources extraordinaire au sens propre. Mais, en plus, on y trouve la possibilité, propre à Myspace, d'écouter des morceaux proposés par chacun de ses "amis" à leur adresse. On est bien là à un point crucial du réseau "accordionspace" ou, pour utiliser un mot de la logique réticulaire, à un "noeud" de réseau. Si l'on voulait utiliser une image, on pourrait parler de plateforme de triage ou de centre d'aiguillage. Bref, le projet est bien le même que celui du blog, déjà indispensble, mais avec des fonctionnalités supplémentaires.

Du coup, je passe mon temps à écouter des morceaux avec gourmandise parmi la masse des propositions et à les télécharger pour en faire des sélections. Et je suis véritablement étonné par la variété et la qualité de ces morceaux.

Pour l'instant, j'ai retenu A. Messina, F. Castiello, G. Hermosa, M. Bruneau, M. Ketencoglu, "Play Bayan" (accordéoniste russe), R. Huiban, R. Taddei, R. Posselt, Taca, V. Prieto, V. Podolsky... plusieurs d'entre eux m'étaient inconnus. La plus grande partie, encore inexplorée, m'est inconnue. C'est plutôt excitant.

Pour terminer, deux remarques sans lien direct entre elles :

- il m'a semblé, en parcourant la liste alphabétique des "amis" de Sylvie, que les accordéonistes classiques de concert étaient très sous-représentés. Comme je ne doute pas qu'elle les ait sollicités, je m'interroge sur cette absence. Réflexe de classe ? On ne se mélange pas avec le tout-venant et le n'importe quoi. On reste à l'écart de ce qui n'est pas officiellement reconnu par titres et diplômes. Inertie technologique ? On ignore les possibilités et les pratiques offertes par les nouvelles technologie de communication. Sans doute, d'autres hypothèses sont possibles. La question méritait, je crois, d'être posée.

- je m'interroge aussi sur ma manière d'utiliser Myspace et en particulier "accordionspace". Je télécharge ce qui me plait avec obstination, constance et frénésie ; je n'ai qu'une envie, c'est d'en faire des sélections et de les graver sur cd. Est-ce justifiable ou n'est-ce qu'un réflexe de vieux con, qui en reste à des pratiques obsolètes ? Je suis en effet attaché au cd comme support et comme objet. Sa matérialité me rassure, mais est-ce raisonnable ? Pourquoi ne pas m'en tenir aux possibilités de l'écoute en ligne ? Au fond, je me rends compte que j'ai besoin de voir et de toucher le support matériel de la musique que j'écoute, alors qu'une mémoire externe, une mémoire foraine, est moins encombrante et tout aussi performante. De même, la lecture d'un cd sur une chaine me rassure. Mais cette assurance a un prix : l'écoute sédentaire, en lieu fixe. Il va falloir que je me mette à l'utilisation des machines nomades : portable, baladeur mp3, etc... Il va falloir que je m'habitue à l'idée que mon site, c'est-à-dire le lieu fixe où l'on peut me localiser, est en fait un "lieu nomade". Mon adresse, ce n'est plus le numéro de ma maison dans ma rue ni mon code postal ; mon adresse personnelle, c'est mon adresse e-mail, qui est là où je suis, ici et maintenant.

Révolution culturelle... Ma mémoire sera foraine ou ne sera pas ; mon site sera nomade ou ne sera pas !