lundi, mars 31, 2008

lundi 31 mars - accordionspace

… reçu ces derniers jours plusieurs courriels de Sylvie Jamet pour me faire partager ses découvertes récentes de sites d’accordéonistes sur « Myspace » : « les amis de mes amis sont mes amis, les amis des amis de mes amis sont mes amis, et ainsi de suite ». Toutes ces découvertes sont pleines d’intérêt et je ne sais combien de temps j’ai déjà passé à commencer leur exploration. C’est un monde inépuisable… d’autant plus qu’il a pour principe de se développer sans cesse.

J’avoue que jusqu’ici ne n’avait accordé qu’un intérêt assez distrait à « Myspace ». Mais les pistes ouvertes par Sylvie m’ont incité à aller y regarder de plus près et j’ai été étonné par la richesse que l’on y trouve, même si j’en avais l’intuition. De cette première exploration un peu attentive, je tire d’ores et déjà deux résultats, l’un au plan pratique, l’autre au plan théorique.

Au plan pratique, suivant les suggestions de Sylvie, je me suis fait une petite sélection que j’écoute avec un grand plaisir :

- Gorka Hermosa, dont j’ai trouvé l’éditeur espagnol, mais qui, à ma connaissance, n’est pas importé en France.
- Taca, un accordéoniste japonais, élève entre autres de Daniel Mille, qui n’a pas encore sorti un cd. On peut l’écouter en solo et en duo. Sur son site, j’ai trouvé, parmi ses amis, quatre autres accordéonistes qui m’ont permis de compléter ma sélection…
- François Castiello, accordéoniste de Bratsch, dont l’album « Solo », d’où sont tirés les morceaux proposés, semble épuisé
- Vitaly Podolsky
- Muammer Ketencoglu
- Régis Huiban

… et bien sûr, je compte ne pas m’arrêter là, maintenant que le mouvement est amorcé. J’ai en particulier le projet d’en tirer quelques cds personnels.

Au plan théorique, cette exploration m’a donné à réfléchir quant à la notion de réseau. Cette notion est en effet largement répandue, tant dans les media que dans les sciences humaines (sociologie, économie, information et communication, organisation, etc...). En première analyse, elle s’oppose à la notion d’organisation pyramidale et hiérarchisée, où l’information considérée comme efficace est prioritairement l’information descendante. Mais je n’avais pas vraiment réfléchi au contenu positif et concret de cette notion. En parcourant « Myspace » ou, plus précisément ce sous-ensemble que j’appellerais « Accordionspace », j’ai mieux compris ce qui la définit.

Un réseau implique deux dimensions : d’une part un opérateur de communication (ici, le site) et un support physique correspondant (internet, ordinateurs), d’autre part un ensemble de personnes (amis) ou de groupes de personnes (amis des amis) reliées entre elles par un intérêt commun (l’accordéon) et décidées à mettre en œuvre certaines valeurs (coopération, diffusion, partage, promotion). Ces deux dimensions sont nécessaires, car sans support le réseau ne serait que potentialité, intention, fantasme, et sans les personnes et leurs actions il ne serait qu’un dispositif formel, vide et inerte.

J’ai bien compris aussi qu’un réseau, par définition, est polymorphe, et qu’il fonctionne de manière adaptative, donc fluctuante et flexible. J’ai compris aussi qu’il est, paradoxalement, ouvert et fermé : fermé parce que les membres se reconnaissent entre eux à des signes d’appartenance plus ou moins formels (style), ouvert parce qu’un réseau doit sans cesse rester informé de l’état de son environnement pour se situer et agir pour le modifier (promouvoir l’accordéon dans le monde musical).

Un réseau est en quelque sorte une structure qui se reconfigure en permanence. Sa pérennité implique des valeurs et une culture partagée (promouvoir l’accordéon et le partage), des actions communes (inscription, diffusion), un projet commun (faire vivre le monde de l’accordéon et le rendre identifiable). En fait, un réseau est toujours dérangeant – je soupçonne que cet « accordionspace » dérange un peu le monde de la musique classique, qu’il est un peu incongru – car il ne se conforme pas à une logique hiérarchique, ni aux règles de la communication ascendante ou descendante, ni aux reconnaissances officielles et labellisées, ni même aux diplômes. Il s’appuie sur des logiques floues, des ajustements permanents, des remises en question incessantes, des hiérarchies fonctionnelles et transitoires. Ses frontières sont instables et poreuses. Finalement, comme un être vivant, un réseau apprend et évolue sans cesse ; il produit de l’apprentissage expérientiel et il résulte de l’apprentissage expérientiel de ses membres. On peut parler, à propos d'un réseau, d'organisation apprenante. En contrepartie, on peut s’attendre à ce qu’il passe par des phases de développements et de replis, d’expansion et de réduction, de vitalité et de décrépitude, de complexification et de simplification… Un réseau, c’est comme un accordéon, ça se déplie, ça se replie. C’est la vie !

Bon ! Je suis content de ma déambulation dans l’univers de « Myspace ». J’y ai gagné le plaisir d’écouter de l’accordéon que je n’aurais pas connu sans cela et, à cette occasion, celui de mieux comprendre ce que signifie la notion de réseau, plaisir intellectuel certes, mais vrai plaisir. Je n’oublie pas que je le dois, au moins pour l’impulsion, aux courriels de Sylvie.

A ce jour, plus de 700 amis !

http://www.myspace.com/blogaccordeonmusique

Prévoir des sandwiches, des bières et du café avant de se mettre en route...

mercredi, mars 26, 2008

dimanche 30 mars - asperges et tempête

Mercredi après-midi. Réunion avec l'architecte à Hossegor. Du vent par bourrasques et des grains sans aucun répit. Les giboulées de mars en mars. Tout est en ordre. Pour accompagner notre trajet, nous écoutons un cd inédit et même pour ainsi dire unique. Il y a quelques jours en effet, j'ai dit le cadeau que nous avons reçu d'un ami accordéoniste et compositeur : onze compositions originales, dont j'ai fait le cd en question. Nous l'écoutons deux fois à l'aller, deux fois au retour. Sans se lasser le moins du monde. Chaque morceau est une histoire. On tend l'oreille dès les premières mesures, on attend la suite, on a envie de connaitre la fin, comme dans un récit captivant. Il y a du "Il était une fois..." dans le charme qui opère ainsi.





A quelques kilomètres d'Hossegor, au milieu d'une plaine déboisée, un champ immense de sable noir strié de longues lignes brillantes. Un champ d'asperges. Nous nous arrêtons pour en acheter quelques poches, pour nous et pour des amis. Elles ont été récoltées et lavées le matin même. Leur peau à la texture fine sous les doigts est de couleur blanc nacré avec des reflets roses. La tête que l'on devine moelleuse et savoureuse à souhait est de couleur parme, comme des paupières à peine marquées de fatigue.





Géomètrie du champ traversé de lignes parallèles. La couverture de plastique fin bruisse sous le vent rasant. C'est une sorte de sifflement continu, à peine modulé, comme un son de flûte indienne.



En quittant Hossegor, nous longeons la plage. Déserte. Le vent et les vagues rivalisent de brutalité. Le vent siffle, les vagues grondent. Chacun joue sa partition à sa façon.




L'estacade de Capbreton encaisse de lourds coups de boutoirs. Il y a quelques jours, une partie de ses vieilles poutres a cédé sous les chocs incessants. Ce qu'il en reste se dresse, noirs entrelacs, au-dessus de l'écume qui éclate comme des flocons de neige et retombe en mousse sur le sable.





Le soleil perce à travers la masse sombre des nuages. En un instant, une déchirure apparait. On croit avoir rêvé. Un bleu très pâle, un bleu d'aquarelle, s'empare du ciel . Bientôt, à gauche, à l'horizon, les côtes espagnoles vont à nouveau être visibles. Quelques instants, car déjà de noirs desseins se trament au-dessus de l'océan.



Sur le chemin du retour, nous écoutons encore et encore les onze morceaux dont j'ai parlé plus haut. Il y est question de l'Espagne, du Japon, de l'Irlande, de valse et de bien d'autres pays imaginaires. Nous sommes dans notre bulle. Nous étions partis d'Hossegor en notant que la température était de 9°. Cent-vingt kilomètres plus loin, au péage de Pau, nous lisons 4°.







samedi 29 - le pellarin nouveau est arrivé

Suite à un échange avec Jacques Pellarin, je m'en tiens pour aujourd'hui à cette seule information : on trouve sur son site ses dernières compositions, qui d'ici quelques mois donneront lieu à un nouveau cd. Et ça vaut vraiment le détour...

Pour moi, j'en suis conscient, au départ, il y a - punctum dirait Roland Barthes - le plaisir immédiat, évident et non réflexif de l'écoute. Un son, une manière de jouer sur des plans multiples. Mais, tout aussitôt après, il y a - studium - le plaisir de suivre un parcours artistique (parcours et non trajectoire ; il s'agit de tâtonnements créatifs, pas de balistique), du duo Baïkal au trio de 2008, en passant par des formations à géomètrie variable.





http://www.jacquespellarin.fr/index2.html

vendredi 28 mars - scie musicale

... reçu mercredi matin un courriel de Paul de Witasse, qui a illuminé ma journée. Un de ces courriels inattendus qui vous remplissent de joie. Je m'explique. Il y a quelques semaines, j'avais noté que Richard Galliano avait commencé par jouer du trombone. Comme Jacques Bolognesi, ce que j'ai appris plus tard. J'avais observé alors que ces deux instruments, trombone et accordéon, avaient la spécificité de se déformer ou d'être déformés pour produire des sons. Je faisais alors cette remarque qu'à ma connaissance ils étaient les deux seuls instruments à avoir cette particularité. Peut-être devrait-on ajouter à la liste la cornemuse. Ne parle-t-on pas parfois de bibiou à propos de cornemuse ou d'accordéon, comme s'il s'agissait d'un terme générique les englobant ? En tout cas, s'en suivit un échange entre Paul et moi à ce propos. Mais pendant que j'en restais là, Paul approfondit ses recherches jusqu'à ce courriel, surprenant et si réjouissant.





En un mot, il me faisait part de sa découverte, à savoir l'existence d'un autre instrument de la famille de ceux qui se déforment pour émettre des sons : la scie musicale. Je vois déjà des sourires amusés ou incrédules sur le visage de quelques lecteurs. La scie musicale ? Instrument de cirque, curiosité musicale, etc... Eh bien, sans cesser de sourire, il faut parcourir les ressources collectées par Paul. On change d'avis. On apprend par exemple que le conservatoire d'une ville du centre de la France profonde projette très sérieusement d'ouvrir une classe d'enseignement de la scie musicale. On peut écouter la rencontre musicale d'accordéons avec une scie musicale et bien d'autres choses tout aussi intéressantes. Par exemple, on découvre des virtuoses de cet instrument. Et l'on rêve de voir des entreprises, par l'intermédiaire de leurs départements "recherche", se spécialiser dans la production d'aciers spéciaux pour la fabrication de scies musicales.





On se met à imaginer aussi un quartet (ou quatuor) : accordéon, cornemuse, scie musicale, trombone. Mais il n'est que temps d'aller sur les pistes de la scie musicale, ouvertes et balisées par Paul :





http://fr.youtube.com/results?search_query=hajime+sakita&search_type=

http://fr.wikipedia.org/wiki/Scie_musicale





http://fr.youtube.com/results?search_query=musical+saw+accordion&search_type

http://fr.youtube.com/results?search_query=delicatessen+scie&search_type





http://www.dailymotion.com/relevance/search/scie+musicale/video/x43xa0_reportagefr3_creation

http://www.dailymotion.com/relevance/search/scie+musicale/video/x44pbz_reportagetl7-karine-safar_music

mardi, mars 25, 2008

jeudi 27 mars - guinguettes et new musette

Je continue à lire Pierre Sansot. « Le musette fut associé à l’univers des guinguettes et nous devons dire en quoi elles symbolisaient le bonheur et la fête. Celles-ci n’ouvraient qu’à la belle saison. « La guinguette a rouvert ses volets », ce signe nous avertissait que sans nul doute, le temps avait viré à la douceur […] Ce n’est plus la ville vouée au travail, à l’atelier, à un monde où il faut trimer pour gagner sa vie. Ce n’est pas pour autant une campagne dont les odeurs trop fortes offusquent des poumons qui n’ont plus l’habitude de tant de vivacité et de verdeur […] La guinguette est assez proche de la ville pour que l’on s’y rende à vélo ou par un autre moyen de transport peu onéreux. Et pourtant elle laisse entendre des pulsations qui n’ont plus rien d’urbain ».

Quelques lignes avant ce paragraphe, Pierre Sansot écrivait ceci : « Un objet prend tout son sens quand on le rapporte à d’autres objets, à certains lieux, à certaines pratiques. En l’occurrence, il nous parait bienvenu de mettre en relation l’accordéon avec le musette, avec la guinguette et en contrepoint avec le thé dansant, le casino ».

Cette idée nous permet, me semble-t-il, d’aller plus loin à partir des observations de Pierre Sansot sur le musette et les guinguettes. Quand le musette quitte les bords des cours d’eaux proches des villes, lorsqu’il quitte l’univers des banlieues verdoyantes, lorsqu’il se joue à n’importe quel jour de la semaine et pas seulement en fin de semaine, lorsqu’il se pratique en dehors des moments de fêtes populaires pour s’installer en ville, dans des clubs ou dans des caves, lorsqu’il s’adresse à des citadins en ville, il n’a plus pour fonction de faire danser, il devient une musique que l’on écoute assis, il ne peut alors rester sourd aux échos du jazz. Transplanté dans d’autres lieux, rapporté à d’autres pratiques, il change. Il ne peut pas ne pas changer.

En 1991, Richard Galliano ouvre une voie nouvelle et nécessaire : « New Musette », Richard Galliano Quartet. Disque enregistré en public à Sceaux les 12 et 13 avril 1991. Le musette des guinguettes n’est pas destiné à disparaître pour autant, mais il a épuisé son sens historique, même si des œuvres seront encore créées, qui s’en réclameront. A partir de cette date fondatrice, c’est le new musette qui assume une partie vivante de l’histoire de l’accordéon. Une partie, car je n’oublie pas d’autres formes comme l’accordéon concertant ou ce que j’appellerais volontiers l’accordéon métis, qui croise des traditions multiples.

mercredi 26 mars - les gens de peu

Je viens de relire quelques chapitres d’un ouvrage de Pierre Sansot, « Les gens de peu ». Pierre Sansot est un sociologue qui fonde son travail théorique sur des descriptions précises, pleines de finesse et d’originalité. Ce sont ces descriptions qui m’intéressent. Parmi ses ouvrages, on trouve « Poétique de la ville », « Jardins publics », « Les vieux ça ne devrait jamais devenir vieux », etc… Ces titres donnent déjà une idée de ses objets d’études, qu’en l’occurrence on devrait appeler plutôt sujets d’études, tant son effort d’empathie est manifeste dans les pages qu’il nous livre.

« Les gens de peu » est un ouvrage de 1991, réédité en 2002 dans la collection « Quadrige », PUF, Sociologie d’aujourd’hui. 223 pages ; 9,50 euros TTC.

Il est composé de 16 chapitres augmentés d’une postface. Quelques titres : « La chanson des rues », « Les bonheurs domestiques : la ménagère », « Les petits bricoleurs », « Les scènes de ménage », « Le football des trottoirs ». Le chapitre 1 s’intitule « Gens de peu, hommes quelconques, vies ordinaires » et la postface « Le pliant ». Mais aujourd’hui, c’est le chapitre « Les bals du 14 juillet » qui m’intéresse.

Parlant des fêtes populaires, Pierre Sansot écrit : « Dans toutes ces fêtes populaires, l’accordéon était à l’honneur : pour les valses, pour les pasos dobles mais aussi, ce qui ne va pas de soi, pour les rumbas, les danses sud-américaines, les tangos, où il aurait dû céder sa place au bandonéon. En quoi était-il l’instrument populaire par excellence ? Monumental, chromatique, il collait au corps de celui qui en usait. Il enroulait les épaules de ses bretelles, il exigeait que la poitrine, que la tête soient de la partie, l’accompagnent pour hâter sa respiration. L’accordéoniste en tirait gloire. Il prenait souvent le devant de la scène tandis que le reste de l’orchestre demeurait plus discret (il lui arrivait de s’effacer devant le batteur).
[… ] Il s’opposait, d’une manière plus ou moins explicite, au piano, ou plutôt à un certain usage du piano, celui qui apparaissait comme l’élément indispensable d’une bonne éducation, qui reposait sur de longues et ennuyeuses études, qui désirait manifester l’existence de goûts supérieurs. De l’accordéon, on pouvait en jouer dans une cuisine tandis que les parents rassemblés achevaient leur repas dans le rire et l’alcool. Le piano méritait un salon, des voilages, la sagesse et le silence ».

Plus loin, il oppose musette / guinguette et thés dansants / casino. Et ces oppositions, comme celle qui met face à face l’accordéon et le piano, donnent lieu à des descriptions qui, sans jamais se perdre et nous égarer dans les détails, nous donnent à voir et à comprendre la vie des gens.

Pourtant, un fait, que j’ai vécu récemment, m’amène à revenir sur cette opposition, qui parait aller de soi, entre l’accordéon – le piano du pauvre – et le piano – piano de salon, piano de concert. Avant le début du concert « Mare Nostrum » à la salle Gaveau, j’étais assis à côté de trois hommes, jeunes, trente cinq / quarante ans, habillés avec soin et recherche, un soupçon de sophistication dans l’accord chemise / cravate, rasés au plus près, manucurés et parfumés. En attendant… comme Godot… ils lisaient un journal financier de langue anglo-saxonne. Sur l’exemplaire de mon voisin, on pouvait déchiffrer, barrant le titre du journal, un petit bandeau portant quelques indications : le numéro d’abonnement, le titre de l’abonné : manager d’investissements d’un établissement d’assurances international, son nom et son prénom, l’adresse : un immeuble de la Défense. Normalement, ils auraient dû jouer du piano. Normalement, oui, mais en fait, peu avant que les lumières s’éteignent, celui des trois qui était assis au milieu a commencé à dire aux deux autres qu’il avait un accordéon de même marque que Galliano puis, pour répondre à leurs questions, à leur expliquer la technologie de l’instrument. Ils semblaient intéressés par ces précisions. J’ai observé, au cours du concert, que leurs applaudissements ont gagné en chaleur au fur et à mesure des morceaux. Pas au point de les pousser à se lever, comme l’ont fait certains d’entre nous après le deuxième rappel. Evolution du comportement, oui, mutation, non. Bon, bien sûr, celui qui jouait de l’accordéon ne jouait pas sur n’importe quel instrument. Le même que Galliano, c’est déjà un signe d’appartenance de classe. Mais, ce fait ne m’a pas paru anodin. Des cadres supérieurs de la finance qui assistent à un concert d’accordéon (de trompette et… de piano. L’honneur est sauf !), l’un d’entre eux qui manie le bousin, si ce n’est pas une révolution culturelle, comment faut-il appeler cela ? Certains se demandent s’il existe des traces de Mai 68 dans notre société, en 2008. Je dis « oui ! La preuve… »

lundi, mars 24, 2008

mardi 25 mars - moving landscapes / sport & couture

Donc… Françoise écrit. Son travail d’écriture me laisse des loisirs pour faire le lit, passer l’aspirateur, acheter des fruits et légumes, mettre le couvert et le débarrasser, et bien d’autres choses encore, comme par exemple écouter de l’accordéon au séjour. Au bureau en effet elle écrit avec des oreilles de Mickey collées à la tête et je ne voudrais pas que les échos de mes écoutes lui parviennent. Comme les tâches domestiques ne m’occupent pas du lever au coucher, j’écoute en alternance :

- « Moving Landscapes » de Lelo Nika, 2007 Stunt Records. Enregistré à Copenhague et à Malmoë en 2006 & 2007.
- « Sport & Couture », Amestoy Trio, Daqui (Toulouse), 2008.

J’avais commandé « Moving Landscapes » à Paris Jazz Corner et je l’avais récupéré au dépôt lors de notre récent séjour parisien. Je l’avais commandé sans rien connaître de cet accordéoniste, précisément pour avoir le plaisir de la découverte et de la surprise. J’avais bien fait, car ce que j’ai pu savoir de lui après l’avoir écouté ne correspond pas à la musique de cet album. On trouve en effet deux sites intéressants :

- YouTube, qui propose plusieurs vidéos

http://www.youtube.com/results?search_query=lelo+nika&search_type=

- Son site officiel, qui propose une douzaine d’extraits d’un cd de 2005.

http://www.lelonika.com/opener.html

Dans les deux cas, on a affaire à un virtuose serbe de naissance, roumain de culture musicale. « Moving Landscapes », c’est tout autre chose. Quelque chose comme un Ionica Minune, muni d’un Pigini Super Bayan Sirius, qui jouerait le passe-murailles ou le passe-frontières au point de se retrouver dans le monde du jazz clean – piano, accordéon -, puis dans celui du free jazz en sextet ou en septet, ou encore dans celui du rap. L’évolution de Bucarest à Copenhague ou Malmoë est impressionnante. On passe d’une musique de pays, ancrée dans un territoire repérable, à une musique urbaine, une musique de ville. Accordéon des champs, accordéon des villes. On sent bien qu’il y a de la recherche là-dedans, mais aussi une réelle créativité.

Et puis, d’autre part, j’ai écouté « Sport & Couture », à propos de quoi j’ai trouvé un article fort intéressant et qui en tout cas me convient bien :

http://www.ladepeche.fr/article/2008/02/20/435714-Amestoy-Trio-tout-en-Sport-Couture.html

Comment dire ? J’ai beaucoup de sympathie pour le trio – Amestoy, accordéon, Carles, guitare, Dechaumont, basse -, trio rodé par moult concerts, et encore plus pour Amestoy lui-même. D’emblée cette musique composée par Amestoy ou Carles me remplit de joie. Curieusement, l’expression d’art moyen me vient à l’esprit. Ce n’est pas l’accordéon « dents blanches », démago et racoleur, loin de là, ce n’est pas non plus de l’accordéon classique, même si c’est une musique très écrite. On est dans un registre de sentiments et d’impressions sans rien de grandiloquent ni d’excessif, sans effets de manches, sans prise de tête. Mais tout est plein de charme et de délicatesse, plein de finesse et de complicités. Parmi les morceaux que j’apprécie, « Paquerette », « Le barbu », dédié à Barboza, autre humaniste, « Fantomas », « Rural Song » ou encore « Bamako ». Les grecs anciens avaient cette devise de sagesse : « Rien de trop ». Cet album, c’est exactement ça !

……

Deux courriels pour terminer…

D’une part, Sylvie Jamet, dont le site Myspace se développe de manière exponentielle, me signale deux sites, dont j’ai plaisir à répercuter les adresses, car j’ai bien apprécié… A mon tour, j’espère que ce plaisir continuera son chemin…

- Suède, Folk Rock - Tummel : http://profile.myspace.com/index.cfm?fuseaction=user.viewprofile&friendid=101867917

- Espagne, Pays basque, Catalogne - Gorka Hermosa : http://www.myspace.com/gorkahermosa

J’ai beaucoup aimé un morceau intitulé « Anatango » tiré d’un album qui me parait plein d’intérêt, «Tangosophy ».

D’autre part, un ami accordéoniste et de surcroît compositeur, me communique sa perplexité – je suis très modéré – à l’écoute des morceaux du groupe Zakarya audibles sur Myspace.

http://www.myspace.com/zakaryacontact

- Sa perplexité ? Je cite son introduction « Eh ben ! j'y comprends plus rien ! »
- Ma réponse après audition ? « Je viens d'écouter les quatre morceaux de Zakarya. Je ne suis pas étonné qu'ils se réclament de John Zorn (pour ce que j'en connais) et que leur label soit Tzadic. Il me semble avoir entendu des "choses" du même genre venant de ce compositeur et de ce label. En fait, j'entends ça comme un avatar de l'art conceptuel, où une idée tient lieu de créativité. Déjà que l'art conceptuel (musique ou art plastique) me parait dévitalisé, quand l'idée ou, comme on dit, le concept est pauvre, il reste quelque chose d'ennuyeux... en tout cas, long. A la limite, si l'on voulait vraiment "faire quelque chose de ça, je vois des pistes du côté de la musique illustrative : reportage sur les hauts fourneaux éteints et en ruines, reportage sur les créatures abyssales, reportage sur un jour de pluie dans le désert de Gobi. Mais, blague à part, je conçois que l'existence reconnue de cette "musique" puisse vous irriter ».

samedi, mars 22, 2008

lundi 24 mars - histoire vraie, histoire incroyable

Comme Françoise écrit (au fait, l'ai-je déjà dit ?), je suis allé, samedi après-midi, faire un petit tour dans les rues de Pau, histoire de profiter de la quasi absence de circulation pour voir la ville vide et sous une apparence quasi fantomatique. Les rues sont vides en effet car les parkings des hyper et supermarchés sont pleins. Les vases communicants. En ce qui concerne l'aspect fantomatique... comme je m'engage dans la rue Guichenné, une épaisse fumée semble se répandre dans tout le quartier. Brouillard ? Incendie ? L'odeur de matières plastiques carbonisées ne laisse guère de place au doute.
Comme tout bon badaud qui se respecte, je me joins aux quelques personnes présentes pour regarder d'énormes volutes de fumée s'échapper d'une cave, sous un magasin d'informatique.

Parfois la fumée est abondante, parfois rare, parfois noire, parfois blanche... Les policiers et les pompiers sont placides. Pas un mot, pas de bruit. Une ambiance bizarre. Pas de crainte excessive : pas de vie humaine en danger.


Dois-je le dire, je trouve que les incendies ont toujours une certaine beauté esthétique : les couleurs des véhicules d'intervention, les tenues des pompiers, les courbes des tuyaux, l'espace délimité et interdit au passage.



Il y a quelque chose d'irréel dans cette scène.

De retour à la maison, je dis à Françoise que je viens d'assister à deux événements extraordinaires. D'une part, un incendie dans une rue du centre de Pau, d'autre part, sur "France Musique", à une analyse par Jean-François Zygel de trois interprétations de la valse "Indifférence". Exégèse remarquable de clarté et de pertinence de ce chef-d'oeuvre. Interprétations de Gus Viseur, de Galliano et de Michel Macias. Un moment rare de critique musicale.
Françoise me regarde, sans rire... mais presque. "Pour l'incendie, je te crois ; pour Zygel, je ne te crois pas ! Pas possible !"
Effectivement, je peux lui montrer les photos de l'incendie, alors que j'aurais été bien incapable de lui apporter la preuve de l'analyse de Zygel. Et pour cause... En fait, je me rends compte que c'est une histoire triste. Je me comprends.













jeudi, mars 20, 2008

dimanche 23 mars - paris "mare nostrum" : traces

Quelques traces autour du concert "Mare Nostrum" : billets SNCF, billets du concert, billets de la fondation H C-B, serviette du "Petit Journal Montparnasse"... Ce ne sont que petites choses, morceaux de papier. Ce sont des catalyseurs d'émotions, des déclencheurs de mémoire. C'est pourquoi je les garde, sans les classer. Je n'ai pas la vertu des entomologistes, en revanche j'ai conservé, de l'enfance, le goût des petits trésors, sans valeur marchande, mais chargés jusqu'à ras-bord d'affectivité.





Suivant une habitude, je devrais dire un rituel, que j'affectionne, je mets les deux billets du concert dans la pochette de "Mare Nostrum". C'est toujours un bonheur de retrouver ces petits bouts de papier - trois côtés lisses, un côté dentelé - chargés d'indications - date, heure, lieu, adresse de la salle, prix - avant de placer le cd sur le lecteur. Puis, je relis la chronique que Françoise Jallot consacrait à cet album dans le numéro 70 de la revue "Accordéon & accordéonistes" [décembre 2007, pages 64-65]. J'en retiens quelques termes qui correspondent à mes propres impressions : jazz, perfection ; sons feutrés de Paolo Fresu ; Chet Baker et Miles Davis ; invitation au voyage, errance mélodique et méditative ; sonorité insolite et sensuelle ; mélodie fluide (à propos de Lundgren).



J'ajoute que nous avons été fascinés par le jeu de Fresu qui, parfois, assis sur son siège, se courbe jusqu'au sol donnant ainsi à sa trompette un son plein de gravité et de profondeur. Une puissance sans stridences. Galliano, qui jouait assis, ce qui est assez rare chez lui, m'a semblé moins brillant que dans d'autres concerts, mais lui aussi plein de gravité et de profondeur. Quant à Lundgren, je parlerais de ligne claire pour qualifier son style. Les notes comme des gouttes d'eau pure. Et puis aussi l'attention réciproque que se portent les trois membres du trio. Tous les trois sur le même plan, face au public, mais dans leur monde et comme reliés entre eux par un accord intuitif, résultat d'un travail que l'on imagine de longue haleine. On pourrait dire à leur sujet qu'ils se comprennent à demi-notes comme d'autres s'entendent à demi-mots. Enfin, le son du lieu... Quelle pureté !



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Mais déjà il s'agit de vivre au présent. En allant faire quelques courses nécessaires à l'hypermarché, je n'ai évidemment pas résisté à l'envie de faire un saut jusqu'à l'espace culturel. Et là, qui m'attendait, tout chaud sorti du four ? "Sport & Couture", Amestoy Trio, 2008, Daqui / Harmonia Mundi. Curieux titre. Je pense à "Sports et divertissements" de Satie interprété par Anzellotti... Je ne sais si le rapprochement a été voulu, mais je sais que le trio, comme Satie, ne manque pas d'humour.

On y retrouve toute la saveur des concerts avec, en plus, une prise de son impeccable.

samedi 22 mars - paris "mare nostrum" : environnement (2)

Lundi après-midi, nous allons "faire" quelques allées du cimetière du Père-Lachaise. La tombe de Balzac, simple et fleurie de frais : une colonne supporte le buste de l'écrivain. A quelques pas, une vue sur Paris : tour Eiffel, Beaubourg, tour Montparnasse. On pense à Rastignac. Bizarrement, il ne fait pas froid. Il n'y a pas de vent. Les jardiniers s'affairent. Tous ces tombeaux, quelle vanité !








Mardi midi, déjeuner au "Petit Journal Montparnasse", à droite en sortant de la gare. Un lieu mythique, plein d'événements et de souvenirs de jazz. Marc Berthoumieux y joue demain soir, mercredi 19, mais nous serons déjà revenus à Pau. Dommage.





Une brasserie parisienne dans toute sa perfection.




Mardi soir, diner à deux pas de la salle Gaveau dans un restaurant japonais, que nous avions repéré hier.



Avant de prendre le train, à 14h45, déjeuner, face à la gare, dans une brasserie, "L'Atlantique". Service impeccable.



Après avoir quitté "L'Atlantique" et avant de prendre le train, nous nous promenons dans le "Jardin Atlantique", qui est planté au-dessus de la gare Montparnasse. Les jardiniers, comme au Père-Lachaise, s'affairent dans un silence impressionnant, rythmé par le bruit de l'eau qui court dans des rigoles et qui coule sur des murs de pierres ou par le bruit des feuilles et du vent dans les branches. De ce lieu improbable, où l'on entend sous ses pas le souffle des TGV, on voit la tour Montparnasse comme surgie d'entre les arbres. Elle donne la mesure de la verticalité et de l'immobilité dans ce monde végétal où tout n'est que courbes et mouvements imperceptibles.






Pendant la dernière partie du voyage, après Bordeaux, nous traversons les Landes où les pins se partagent le territoire avec de vastes espaces de maïs, dont le sol aujourd'hui est désertique et sombre. A travers les vitres se mélangent le paysage à l'horizon, le paysage opposé qui se reflète dans la fenêtre et l'espace du compartiment lui-même. Je pense aux photographies de Saul Leiter.



Les poteaux électriques eux-mêmes semblent marcher à grandes enjambées dans la plaine immense, à perte de vue.



Le soleil qui se couche, rouge, au-dessus de l'océan, donne l'illusion qu'un immense incendie a embrasé les pins. Encore une fois, je tire mon autoportrait. L'homme au Nokia comme un cyclope narcissique. Narcisse, dit-on, admirait son image dans une surface d'eau pure. L'espace de l'homme moderne est saturé de ses reflets. Tout nous renvoie en permanence nos images. Le monde comme un miroir.















vendredi 21 mars - paris "mare nostrum" : environnement (1)

"Mare Nostrum", c'était certes le projet principal mais pas exclusif de nos trois jours parisiens. Nous avions décidé, à cette occasion, d'aller récupérer un cd commandé peu avant à "Paris Jazz Corner". Métro République. 8 rue de Nancy. Une porte étroite. Deux pièces qui sentent la peinture fraiche. Deux personnes, jeunes et affables. Quelques mots pour leur dire à quel point nous apprécions leur professionnalisme. Nous récupérons notre commande :"Moving Landscapes" de Lelo Nika. Je n'ai pas la moindre idée de ce qui se trouve dans ce cd. Il s'agit de jazz contemporain. Lelo Nika, dit la présentation, "plays Pigini Super Bayan Sirius Six Rows Instruments - Guerrini Champion & Guerrini Champion President". Il y a aussi avec lui un rappeur et quelques autres piano, clarinette, percussions, etc...

Depuis longtemps, nous avions le projet de visiter la fondation Henri Cartier-Bresson, à qui je voue une admiration sans bornes. Actuellement, se tient dans ses locaux, une exposition d'un photographe américain, Saul Leiter. Nous aimons beaucoup. Beaucoup de clichés sont des images de reflets, que j'aurais aimé faire. Il me conforte dans l'intention d'explorer cette voie.




Une vitrine montre un portrait d'H C-B et son Leica. Etonnant petit appareil. Le cuir et le chrome sont usés. On comprend l'attachement qu'H C-B lui a porté. C'est un véritable appareil-stylographe, une machine à prendre des notes et à faire des croquis. Je comprends que la photographie et le dessin étaient des opérations très semblables pour ce photographe génial.




L'espace de la fondation a quelque chose de janséniste. Très géométrique. L'image de cet escalier me semble en donner une représentation assez fidèle. Une rigueur d'épure. Blanc sur blanc : un jeu d'ombres et de lumière.




Enfin, un petit tour par Beaubourg : encore et encore de la géomètrie. Un espace cartésien. Des files interminables. Dedans / dehors. Encore et encore.



De la cafeteria on surplombe l'espace de l'accueil. Rouge sur fond gris. Agressif.



Deux cafés longs. Des cartes pour les "filles", Charlotte et Camille. Encore de la géomètrie. Imperceptible déplacement des lignes. Noir et blanc. Je pense encore à un cliché de Cartier-Bresson. je me rends compte à quel point son art conditionne mon propre regard sur le monde qui m'entoure.


Le dernier photopoche :" Le sténopé - de la photographie sans objectif". L'art photographique réduit à l'essentiel. Aux antipodes de la course au "matos".











jeudi 20 mars - paris "mare nostrum" : accordéons du métro

Dès notre arrivée à Montparnasse, notre attention est attirée par un son qui ne nous est pas étranger. Au milieu de l'un des couloirs interminables de cette gare, un vieil homme, l'air las et usé, joue sur un bandonéon un air déchirant : fragile et obstiné. Il fait froid, mais lui le regard fixé sur l'horizon de ses rêves, semble écouter les chuchotements de son instrument. Le reste du monde passe ; il demeure. Le lendemain, nous le retrouvons à la même place. Il joue de l'accordéon. Un Fratelli Crosio. A côté de lui, des partitions et des cassettes. Il fait toujours très froid. Les gens passent ; il demeure.

Peu avant notre départ, nous croisons un dernier accordéoniste. Il joue sur un Piermaria. Il semble fier de nous voir attentifs à sa présence. Il pose pour la postérité.

Et puis, lundi après-midi, une surprise magnifique. Alors que nous parcourons un couloir de la station Champs Elysées - Clémenceau vers un quai de correspondance, une musique d'accordéon attire notre attention. Plus tard la correspondance... De couloirs en couloirs, nous finissons par découvrir l'accordéoniste qui au fur et à mesure de notre approche nous enchante.


Il interprète "La foule" à sa façon et c'est superbe. C'est comme s'il donnait vie et couleur à la masse des "métronomades" qui montent ou descendent les escaliers en le frôlant. En tout cas, il est certain que sa musique, même s'il n'en sont pas conscients, donne forme et rythme aux pas des automates de ce monde souterrain.
Avec son autorisation, je fais une photographie de cet accordéoniste dont, je le répète, le jeu nous tient en haleine.

Nous restons un moment à l'écouter, puis nous remontons l'escalier. Avant de tourner le dos, nous lui faisons un dernier signe amical. C'est alors qu'à son tour il nous fait signe, comme pour nous rappeler. Je descends. Il me tend sa carte de visite. Je n'en crois pas mes yeux : "François Parisi". Nous échangeons quelques mots à propos de "Paris Musette" et de "Jazz in my Musette" . En tout cas, nous lui disons combien nous apprécions son jeu d'après ce que nous avons pu écouter de lui sur ces cds.


Au fond, le hasard n'existe pas. Ou du moins, s'il existe une dimension objective du hasard, ici la rencontre improbable de nos projets : celui de François Parisi, installé dans cette station, le nôtre, qui nous a conduits à cette même station, il existe aussi une dimension subjective qui rend ce hasard possible. Ici, cette dimension subjective, c'est notre décision de changer de couloir pour aller à la rencontre de l'accordéon qui nous faisait signe. Le hasard, pour exister, exige qu'on le laisse advenir... Leçon à retenir et à respecter.




mercredi 19 mars - paris "mare nostrum" : le concert

Nous sommes partis de Pau, lundi matin, peu après 8h. Nous sommes logés dans un hôtel en face de la gare Saint Lazare, à quinze minutes à pieds de la salle Gaveau. Nous rejoignons un embryon de file d'attente à 19h45. Nous entrons à 20h. Le concert a lieu à 20h30, comme prévu. "Mare Nostrum". Paolo Fresu, trompette et fluegelhorn, Richard Galliano, accordéon et accordina, Jan Lundgren, piano. S'il n'est pas formellement interdit de prendre des photographies, on peut dire que c'est fortement déconseillé. C'est pourquoi je fais quelques clichés de la scène pendant ces instants qui précédent le début du concert. C'est toujours pour moi un moment magique où mon attente se peuple d'images suscitées par les nombreuses écoutes du disque que nous avons faites. Ecoutes qui ont accompagné depuis plusieurs semaines la préparation de ce voyage et de ce concert.
Le concert sera acoustique ou ne sera pas. Nul micro, nulle prothèse sonore. Le son pur ; tel il sort de l'instrument, tel il nous parvient.

Richard Galliano joue assis. Aucun mouvement inutile. Sa posture est significative du jeu des trois musiciens. J'ai rarement entendu une telle créativité servie par une telle économie de moyens. Je parlerais volontiers de classicisme : introduction, développement, conclusion. Chaque morceau est une histoire. On retient sa respiration. On reste suspendu aux mouvements du dialogue entre les trois membres du trio. On retrouve les titres de l'album, mais en direct, sur le vif et notre mémoire en est transfigurée.
Je ne peux résister au désir de voler un cliché. Un seul.



Salut final après deux rappels : un aria de Monteverdi d'abord, puis "Que reste-t-il de nos amours ?" commencé comme une improvisation de free jazz.



Après le départ du trio, il reste sur le sol la bouteille d'eau de Paolo Fresu et son siège, l'accordéon de Richard Galliano et des feuillets de partitions. Françoise et moi, nous voulons garder le souvenir de cette image. Nous nous attardons pendant que la salle se vide. Nous sortons sans mots dire tant la force des impressions nous rend encore incapable de les analyser. Notre premier échange est pour vérifier que nous avons été particulièrement émus par les deux morceaux où Richard Galliano joue de l'accordina. Une fragilité tenace et obstinée.



Ce concert était beau. Que dire de plus ? Il me manque les notions et les mots pour expliquer comment cette beauté a été produite. D'ailleurs je ne pense pas que ce registre analytique et explicatif pourrait rendre raison de ce qui s'est passé, ce lundi de mars, salle Gaveau. Pour en donner une idée, il faudrait être capable d'en donner des équivalences dans le registre poétique. Je n'en suis pas non plus capable. Reste le sentiment d'un moment rare...





dimanche, mars 16, 2008

mardi 18 mars - phénoménologie de l'écoute

Il y a peu, j'écrivais, en substance, que Françoise et moi nous sommes de plus sensibles dans l'écoute de Piazzolla à la tension extrême qui traverse toutes ses compositions. Au point d'avoir de plus en plus de difficultés à écouter en totalité un de ses albums, à cause de cette tension. Il y a une face écorché vif chez Piazzolla. Une sorte d'inquiétude féconde certes, mais difficile à soutenir dans la durée. J'ajoutais que d'une certaine façon cette tension est peut-être intrinsèque à la beauté même. Comme pour le feu, la beauté ne permet pas une exposition trop prolongée ou trop proche.



Cette observation m'était venue spontanément pour essayer de saisir au plus près l'impression que j'éprouve aujourd'hui à l'écoute de Piazzolla. Mais, en y réfléchissant, je me rends compte que sa portée est plus générale et qu'elle correspond en fait à une sorte de méthode d'écoute de ma part, à une démarche systématique, même si elle est spontanée et d'abord non délibérée.



Cette méthode se déroule en quelques moments-clés : dans un premier temps, si le disque m'accroche, j'écoute en boucle. C'est le moment de l'immersion, jusqu'à la saturation. Au bout d'un certain temps en effet, j'ai l'impression de reconnaitre ce que j'écoute et cette impression continue débouche inévitablement sur une sorte de coup de pompe. Trop de choses belles et fortes, c'est trop. J'hésite puis je range le disque, je le mets en attente. Quand, dans un troisième temps, je le reprends, mon écoute devient sélective. Je suis incapable d'enchainer tous les titres de l'album. C'est le moment de l'écoute en diagonale ou sélective. Du coup, j'oublie certains titres. Plus tard, c'est un quatrième moment, je reviens au disque et j'ai envie de retrouver les morceaux que j'avais mis de côté. Je découvre alors que j'avais oublié ce qui d'abord m'avait ému ou bien des aspects que je n'avais pas d'abord perçus.



Au terme de cette description un peu phénoménologique, il me semble que je peux parler à bon droit de méthode : écoute jusqu'à saturation, mise en attente, écoute sélective ou diagonale, écoute complémentaire. Il faudrait ajouter qu'après un certain temps, quelques semaines, voire quelques mois, sans que je sache pourquoi, une sorte de travail inconscient de décantation s'opère et, quand je reprends l'album en question, je sais de toute évidence quels sont mes titres de prédilection. Je les écoute et je ne suis jamais déçu.



Voilà. C'était ma petite contribution à une phénoménologie de l'écoute de beaux morceaux d'accordéon... telle que je la pratique. Je prends conscience du peu de place que je fais ainsi à une approche technique ou culturelle de l'oeuvre... et en un sens je le regrette, même si je me méfie des risques d'une approche savante de l'écoute. Par savante, j'entends une approche qui filtre l'écoute à travers des a priori de savoirs (technique, culturel, historique, musicologique, etc...). C'est sûr que je ne cours pas ce risque et c'est sûr que je le regrette. Mais, bon, on ne peut tout faire...

lundi 17 mars - compostelle

J'ai dit, vendredi et samedi je crois, le plaisir que j'avais eu à recevoir onze morceaux inédits envoyés par un ami accordéonistes et compositeurs. Plaisir multiple. J'en ai fait un cd et, en l'absence de titre, je lui ai donné un nom de code "Compostelle".

Comprenne qui pourra. Je ne suis évidemment pas capable d'expliciter et de justifier cette intuition. Une chose est claire cependant : ce mot m'est venu, car il correspond bien à cette idée que les chemins sont multiples qui mènent à un même foyer spirituel. "Compostelle", ce nom de code dit assez bien l'impression que j'éprouve à l'écoute de ces onze morceaux : ils sont différents, ils ont chacun sa personnalité, ils sont comme les facettes multiples de quelque chose de difficile à exprimer avec des mots, mais fondamentalement ils traduisent une même recherche.

dimanche 16 mars

Françoise écrit... (voir épisodes précédents).

Cet après-midi, je rends visite à ma mère, à Nay. La maison de retraite sera en effervescence car un déménagement se prépare depuis déjà quelques semaines et, comme on dit, la pression monte. Il s'agit de passer du bâtiment ancien à un bâtiment neuf, mais le monde des résidents en est tout bouleversé. Ma mère se demande avec angoisse depuis des jours et des jours quelle robe et quelle veste elle choisira pour cet événement. Mon père, qui lui rend visite tous les deux jours, se demande comment il trouvera le bon chemin. Seuls, peut-être, parmi les résidents, ceux qui sont frappés d'Alzheimer, semblent échapper à cette pression. Pour le reste, certains, j'en suis sûr, continueront l'une à m'appeler "Maman !", l'autre à m'appeler "Papa !"

Chaque fois que cela m'est possible, je réserve l'heure de 18 à 19, le vendredi, pour écouter "Accordéons sans frontières" sur radio BLV. On croirait que la retraite est un temps libre, où tout est possible au gré des humeurs du moment. Pas du tout ! Cette semaine, par exemple, nous avons dû déplacer un rendez-vous de chantier à Hossegor du vendredi au samedi, sinon pour la troisième semaine de suite j'aurais raté cette émission, que j'aprécie tant. Bon, cela dit, même s'il a fallu négocier avec l'architecte et un artisan, je ne demande à personne de s'apitoyer sur mes états d'âme. Il y a pire problème... en tout cas, je ne regrette pas ma négociation. Quitte à passer pour quelqu'un qui aurait perdu tout sens critique, je continue à trouver que"Accordéons sans frontières" est une excellente émission. J'aime bien le rythme, la durée, le choix subjectif et toujours bien fondé, et surtout la complémentarité entre le volet jazz, musette, musique du monde assumé par Thierry et le volet classique assumé par Sylvie. Deux choses me plaisent particulièrement : l'implication des animateurs dans leur programmation (on sent bien que la ligne éditoriale, c'est d'abord des coups de coeur personnels à faire partager) et le media "radio", beaucoup plus intime que l'image visuelle.

Hier, samedi donc, Pau - Hossegor et retour. Rendez-vous de chantier et un grand coup de nettoyage après le passage des platriers. En entrant sur l'autoroute, Françoise me fait remarquer que j'ai oublié les clés. La température est de 24°. 17 kilomètres jusqu'à la première sortie. Retour ! Le vent est violent, les nuages passent dans le ciel comme des furieux en se chargeant de lourdes franges noires. Au moment où nous repassons le péage de Pau, il fait 16°. Etonnant ! Pour la route, nous avons fait le choix de trois disques :

- "Nuestro Tiempo", Astor Piazzolla y su Quinteto Nuevo Tango. Chaque fois que nous écoutons Piazzolla, nous sommes frappés par la tension qui en émane. Au point que j'ai de plus en plus de mal à écouter un disque dans sa totalité, tant cette tension est forte. J'éprouve la même impression face à des dessins de Picasso ou à des peintures de Soulages. D'une certaine façon, la beauté est insoutenable. Peut-être même est un critère de la beauté : tellement intense que, comme pour un feu, on ne peut s'en approcher trop longtemps.

- "Swinguette", Marc Leseyeux Quartet. En l'écoutant, mon imagination me conduit à évoquer Marocco, Van Damme, Baselli, Viseur, Galliano. C'est plein de références, de réminiscences et de citations. C'est comme un hommage à de grandes figures.

- "Sur la route", trio Cahours, guitare et voix, Lignon, accordéon, accordina et voix, Colson, contrebasse. Une guitare flamenca. Retour de nuit. Il pleut. Des coups de vent qui plient le sommet des arbres dans les phares. Avant de rentrer à la maison, on passe chez le boulanger pour acheter une baguette. Devant la porte, les dernières notes de la "Valse à Dimitri".

vendredi, mars 14, 2008

samedi 15 mars - cadeaux suite

Hier matin, en ouvrant mon courriel, je vois s'afficher successivement six titres, en complément des cinq reçus mercredi. Je ne reviens pas ici sur mes sentiments que j'ai décrits à la suite de leur réception, mais il s'y ajoute, lié à l'effet de nombre, une excitation comparable à celle de Charlotte ou de Camille découvrant avec surprise un plateau de desserts surabondant. Outre le plaisir de l'écoute, j'aime éprouver cet émerveillement puéril devant tant de belles choses.

Je me donne du temps, et pour bien identifier chaque morceau et pour essayer de laisser venir à moi les mots pour dire mes impressions. En tout cas, je suis frappé, par delà la variété des formes musicales, par une unité qui est à proprement parler un style.

Mais, bon, la discrétion m'impose de ne pas en dire plus...

....

Autre chose : à dix-heures, alors que je suis en train de tondre la pelouse, disons l'herbe, ce qui est moins noble mais plus exact, le facteur m'annonce "un paquet pour vous et une petite signature". Perplexité. Je n'attends rien. Colissimo : "Figuri Express", envoyé par Roberto de Brasov. Je l'avais en effet rencontré à Anglet avec Philippe de Ezcurra en décembre, mais jusqu'à ce jour je n'avais pas reçu son album, qu'il devait m'envoyer. Entre temps, je l'avais acheté à Pau. Mais, tout est pour le mieux (dans le meilleur des mondes possibles, comme le dit Leibniz), car Charlotte et Camille inventent sans cesse des chorégraphies inattendues sur ce disque et, outre le plaisir de l'écouter à nouveau, ce sera un plaisir de leur offrir cet exemplaire.

Je comprends, à l'écoute de ce disque interprété avec des musiciens de l'Ile-de-France, pourquoi le jour de la rencontre avec De Ezcurra il s'était présenté comme une sorte de musicien du monde, une sorte d'accordéoniste nomade, de préférence sinon par opposition avec une identification par son origine roumaine, que cependant il affiche dans son nom. Il s'agit bien en effet d'une musique de rencontre, de croisement plutôt que d'une musique d'ancrage ou de pays.

jeudi, mars 13, 2008

vendredi 14 mars - cadeau

Mercredi, en ouvrant mon courriel, j'ai eu la surprise d'y trouver cinq titres originaux envoyés par un ami accordéonistes, musicien et compositeur de grand talent. Ces morceaux sont destinés à figurer sur un cd à venir, mais bien entendu la discrétion m'interdit d'en dire plus.

Ce cadeau m'a fait plaisir à trois niveaux :

- d'abord, parce que j'ai été touché par ce geste. J'avoue que je suis en effet très sensible à ces marques de sympathie et de gentillesse. J'y perçois toujours la manifestation d'une personnalité forte et généreuse, car on n'est jamais obligé d'être gentil. Je dirais qu'à ce niveau c'est d'un plaisir quasi moral qu'il s'agit pour moi.

- ensuite, parce que j'ai bien apprécié ce cadeau en pensant que c'était un vrai privilège. Je fais partie d'un petit nombre qui a la chance de découvrir une oeuvre d'art, une composition originale. La créativité des artistes m'a toujours fasciné et la découverte d'une création, de quelque chose qui est là dans toute son évidence, mais qui aurait pu ne jamais exister, cela me touche beaucoup.

- enfin parce que les cinq morceaux sont beaux. Je dirais que, par delà leur diversité, ils manifestent un style. Comment dire ? En les écoutant, on reconnait la présence d'un auteur et aussi une qualité de dialogue entre les interprètes. J'irais jusqu'à dire qu'on perçoit une vision du monde, une manière de le traduire.

Pour toutes ces raisons, morale, psychosociale et esthétique, c'était vraiment un beau cadeau.

mercredi, mars 12, 2008

jeudi 13 mars - histoires de pau peau pot

Les journalistes parisiens ne parlent que de Pau. Ils disent que les grands partis, UMP et PS, veulent la peau de François Bayrou. Lui-même semble hésiter entre la posture d'un Astérix béarnais et celle du saint homme percé par les flèches de la malveillance politicienne. Mais au fond il ne rêve que de s'emparer de la cité du bon roy Henri et de perpétuer mutatis mutandis le rite de la poule au pot. Pau, peau, pot... On n'en sort pas ! Il en rêve d'autant plus que, comme tout béarnais de souche, il est plus que probable qu'il descende généalogiquement de ce bon roy.
En tout cas, des journalistes au réparateur d'ordinateur en passant par le dépannage Edf situé à Bordeaux, voire d'une correspondante du site Alapage, tout le monde ne parle que de ça sur le mode "Alors, ça chauffe à Pau ..."

Ainsi donc dimanche, se dénouera un écheveau triangulaire mettant en scène les trois protagonistes suivants... Tout de même, un écheveau qui met en scène, l'image est bizarre. Passons...

- le maire actuel, élu après la mort d'André Labarrère, maire emblématique de la ville, surnommé "Toque-manettes" (Touche-mains) pour sa virtuosité dans l'art de faire les marchés. Ce maire actuel, Yves Urieta, un génie de la transparence, ex-adjoint de Labarrère , ex-Ps, est soutenu par l'UMP, ce qui en cette cité flexible, fluctuante, flexueuse et souple comme des feuilles de palmiers - l'arbre de la ville - ne saurait surprendre personne...
- Martine Lignières-Cassou, ex-adjointe du même Labarrère, présentée comme devant lui succéder naturellement, mais boutée hors par le ci-devant nommé Urieta, lors de l'élection post mortem Labarrère. Elle est soutenue par l'appareil du Ps et peut-être par les gauches de la gauche...
- François enfin, Bayrou - prononcer ay comme aïe, et non bêêê comme au nord de la Loire -, président du Mou(vement) dém(ocrate), siglé MODEM pour éviter sans doute des rires faciles s'il avait gardé le découpage syllabique "mou-dem". S'il est élu, on peut penser qu'il sera peu présent, c'est pourquoi sa seconde est une ex-adjointe d'André Labarrère.

Bref, on la compris, en cette terre où tous les gens sont plus ou moins cousins et en tout cas tous issus du même géniteur, Henri IV, cette élection est une affaire de famille. On est entre soi... copains comme cochons... cochons qui s'en dédie.

Ce Béarn n'est certes pas impénétrable et Marseille, la Corse ou le Pays basque font au moins aussi bien, la truculence en plus, mais cette tragédie des Atrides transposée dans le piémont des Pyrénées, telle quelle, avec tous ses détours et contorsions, avec ses ressorts retords, ses alliances et ses trahisons aura permis à de beaux esprits, à de subtils analystes de salons médiatesques, de vibrionner quelque temps devant nos yeux éblouis par tant de virtuosité dans l'art de la glose.

Mais, je l'avoue, peu me chaut en cette affaire de savoir qui sera élu. La seule question importante pour moi était celle-ci :"Lorsque la médiathèque pharaonique sera construite, projet que nul candidat ne remet en cause, prenez-vous l'engagement solennel d'en faire un pôle d'excellence documentaire (cds, dvds, livres, photographies) pour l'accordéon et le bandonéon ?"
Mais, bon, je n'ai pas osé poser ma question en réunion publique, par crainte de paraitre attaché à des futilités, par crainte de l'incompréhension populaire. Dans l'ignorance où je suis de la réponse éventuelle des trois candidats, je n'irai pas voter ce dimanche, mais j'écouterai de l'accordéon.

mercredi 12 mars - piazzolla édicion critica

Françoise écrit (voir épisodes précédents)…

Je viens de relire attentivement l’article de W. Sabatier « Anthologia VII – En vivo Al Regina » sur le quintet de tango nuevo d’Astor Piazzolla, dans le numéro 73 de mars 2008 de la revue « Accordéon & accordéonistes ». Il y est question en particulier d’un cd de la collection Sony / BMG, rééditant le catalogue Columbia, « Astor Piazzolla y Su Nuevo Quinteto / Teatro Regina / Edicion Critica ». Excellent article qui me donne envie d’aller voir si par hasard il ne serait pas en rayon dans l’espace culturel de l’hypermarché. Sur le chemin, petit détour par la salle de conférences, où Alain Rey doit intervenir en fin d’après-midi. Quelques photographies d’une exposition dont j’avais fait quelques clichés il y a quelques jours attirent mon attention. Je les trouve belles. De construction formelle quasi géométrique et minimaliste, elles me touchent par leur simplicité et parce que les sujets en sont des livres et des mots. Les livres et les mots qui les animent sont comme des personnes.







La salle est occupée en grande partie par une installation de mini-sculptures multiples : fines structures noires en diagonales verticales, cercles de tissu gris disposés horizontalement en contraste avec le noir et la verticalité des tubes, disposition générale en lignes parallèles avec ici ou là un petit décalage pour échapper au risque d’un quadrillage trop parfait. Je cherche en vain la signature de l’artiste plasticien qui a conçu et réalisé cette installation. Oubli ? Inattention de ma part ? Improbable modestie ?








Quelques minutes plus tard, je me rends compte que plusieurs personnes ont pris d’assaut l’installation et qu’en fait les supposées sculptures n’étaient que des sièges mis à disposition des auditeurs du conférencier. L’art contemporain y perd une œuvre, mais on y gagne en confort.



Finalement, je n'ai pas trouvé le disque recommandé par W. Sabatier, mais j'en ai trouvé magnifique : "Astor Piazzolla / Nuestro Tiempo / Astor Piazzolla y Su Quinteto Nuevo Tango", 2005, Sony / BMG, enregistrement Columbia 1962.